L’école des femmes

Le 8 avril 2010


 

«Que dire de Jacques Leblanc? Il est époustouflant!
Un Molière musulman… un tour de force assurément!»

  

 

Voilà une idée de génie et d’audace qu’a eu Jean-Philippe Joubert, de rendre actuel et de transposer la pièce deMolière l’École des Femmes en milieu musulman.

Pour cette dernière pièce de la saison 2009-2010, on peut dire que le Théâtre de la Bordée a décidé de frapper fort et de terminer en grâce et beauté avec une pièce brillamment jouée par, en autres, son directeur artistique Jacques Leblanc.

La pièce
Arnolphe (Jacques Leblanc), un homme près de la cinquantaine, veut épouser Agnès (Laurie-Ève Gagnon), sa jeune pupille de dix-sept ans. Complètement obsédé par l’adultère et par la liberté de pensée, il la tient à l’écart de toute instruction et du regard des hommes. Mais elle rencontre Horace (Olivier Normand), un jeune homme de son âge qui est aussi le fils d’un ami d’Arnolphe. Sans se douter qu’il s’agit de son rival, Horace lui confie ses sentiments. Le bonhomme tente alors de s’interposer entre les jeunes amants, mais quand l’auteur s’appelle Molière, on se doute du dénouement!

 


Agnès et Arnolphe, Horace et Arnolphe

 

Tous les ingrédients sont réunis dans cette pièce de deux heures, pour rendre hommage à la culture orientale et nous faire rêver de leurs danseuses du ventre, Raqs al sharqi accompagné de la musique très typique de ces pays du Maghreb et du Moyen-Orient. Leurs magnifiques minarets, ces belles grandes tours de mosquée d’où le muezzin invite les fidèles musulmans à la prière, qui s’élèvent vers le ciel. En contrepartie de cette célébration de la culture musulmane, il y a le côté plutôt pessimiste du rang auquel est relégué la femme dans ces pays, et à l’époque de Molière. Ainsi, on a droit à des répliques succulentes de Jacques Leblanc, sur le rôle de la femme dans un couple, qui se rapproche malheureusement trop bien du sort réservé à ces femmes voilées. Il faut dire qu’on aime bien rire de ce qui nous dérange alors dans ce cas-ci, nous sommes bien servis.

Qui plus est, nous nous régalons aussi des quiproquos installés entre Horace, Arnolphe, et Agnès. Nous sommes complètement réjouis des réactions et des  malaises de Monseigneur Arnolphe qui voit toujours ses plans se revirer contre lui.Que dire de Jacques Leblanc? Il est époustouflant!

Laurie-Ève Gagnon est sublime de beauté, d’innocence et de pureté dans son rôle d’Agnès qui se titille d’amour pour le bel Horace. Un personnage tout en fraîcheur venant de cette actrice accomplie.

Olivier Normand quant à lui, semble avoir de l’énergie à revendre. Il saute par-dessus les clôtures, grimpe aux arbres pour s’approcher de sa belle dans la haute tour de la Mosquée. Il culbute, bondit, sautille d’une agilité d’acrobate. Un vrai jeune homme amoureux plein d’entrain.

Bertrand Alain et Sylvie Cantin, ce couple de domestiques, un peu sot, qui est engagé pour s’occuper d’Agnès, forment un duo désopilant. Ils se complètent à merveille et déclenchent le rire à tout coup qu’ils apparaissent. Une belle complicité.

 


 

Tout compte fait, la musique arabe accentue certains moments opportuns de la pièce, renforçant le caractère musulman du spectacle. Les décors d’une grande beauté et efficacité, mettent en relief ces beaux pays, et l’utilisation de la chambre toute au haut de la mosquée est une excellente idée. Il va sans dire que c’est au balcon que la pièce est, à mon avis, la mieux appréciée puisqu’on peut voir plus aisément ce qui se passe dans la chambre du haut. Les costumes, représentatifs du peuple musulman, sont très adéquats et avec un souci du détail les rendant encore plus crédibles. Et la mise en scène de main de maître de Jean-Philippe Joubert ne peut qu’être célébré. Un Molière musulman… un tour de force assurément!

Présenté au théâtre de la Bordée, jusqu’au 1er mai 2010 à 20 h, sauf les mardis, à 19 h 30. Réservations au 418 694-9721.

Texte de Molière.   
Mise en scène de Jean-Philippe Joubert (assisté d’Andrée Beaulieu). 
Avec : 
Jacques Leblanc : Arnolphe
Olivier Normand : Horace
Laurie-Ève Gagnon : Agnès
Vincent Champoux : Chrysalde
Bertrand Alain : Orante et Alain
Martin Boily : Enrique
Sylvie Cantin : Georgette
 
Conception : 
décor : Monique Dion;  
costumes : Julie Morel
éclairages : Sonoyo Nishikawa;
musique : Mathieu Campagna.

Théâtre de la Bordée

 

 

Crédit photos : Nicola-Frank Vachon – Théâtre de la Bordée