Montagne Rouge (SANG)

  Le 2 juin 2010

 

«…troublant, émouvant… une poésie déchirante sur le suicide et le deuil.»

 

Un an après le suicide de son amoureux, une jeune femme retourne sur la montagne rouge où ils avaient l’habitude de se rendre ensemble. Profondément démunie face à la mort de celui qu’elle a immensément aimé, elle peine à se reconstruire. En se rendant en pèlerinage sur les lieux de ce qui fut autrefois leur refuge, elle choisit d’inventer son propre rituel de deuil dans l’espoir de s’affranchir de sa douleur « une bonne fois pour toutes ».

Une immense table en bois massif, deux chaises, un sac à dos, un fond noir, c’est tout ce dont ont besoin Steve Gagnon et Claudiane Ruelland comme décor et accessoires pour nous faire vivre leur histoire d’amour, de mort et de deuil. Le texte magnifique de Steve, ils nous le livrent comme un poème, avec un rythme musical, accompagné à l’occasion de musique qui vient renforcer les temps forts.

 


 

Le talent indéniable de ces deux interprètes nous permet de vivre toutes leurs émotions en même temps qu’eux. On se promène dans leur passé, durant les doux moments qu’ils partagent, on est déchiré du mal de vivre de cet homme. On ressent la même rage qu’elle de se sentir impuissante à le garder en vie.

La mise en scène de Frédéric Dubois est géniale. Un travail énorme a été accompli pour nous transposer cette montagne, qui est représentée par la table, où se réfugie cet homme lorsqu’il veut fuir la vie et son mal de la vivre cette vie. Et, cette danse entre ces deux êtres, qui tantôt se rapprochent et se cajolent, tantôt se frappent et s’injurient. Un duo sublime, avec des émotions à fleur de peau, tout au long de ce nouveau rituel de deuil.

 


 

Suite à la présentation de la pièce, Marie Gignac (directrice artistique du Carrefour de théâtre), Frédéric Dubois, Steve Gagnon et Claudiane Ruelland ont gentiment répondu aux questions des gens dans la salle.

L’auteur (Steve Gagnon) mentionne que le besoin d’écrire ce texte lui est venu du fait que les gens n’ont plus vraiment de structures liées aux rituels de deuil, et ceux qu’on a maintenant sont dérisoires. Autrefois, les gens revêtaient des vêtements noirs et pendant un an, ils vivaient leur deuil et ceux autour d’eux les savaient vulnérables et leur portaient attention. Maintenant, on expose le corps, on a une cérémonie où un curé qui ne connaît pas vraiment cette personne lui rend hommage, puis après quelques sandwichs pas de croûte, on est supposé être capable de reprendre notre vie normale. J’ai donc cette angoisse-là à vivre le deuil un jour. La mort c’est un rite, et on a le droit de le vivre. Frédéric Dubois renchérit :..de vivre nos émotions et ne pas les étouffer. On ne sait plus gérer nos émotions. Souvent on les endort avec des pilules, on fait tout pour ne rien sentir.

Au niveau de la mise en scène, Frédéric mentionne que ce travail s’est fait sur une période d’un an et demi. On se rencontrait, on travaillait, on a ensuite pris du recul, on laissait dormir les choses et quand on se revoyait, on y voyait plus clair. Au niveau du décor par exemple, j’ai longtemps pensé que le tout devait se passer dans un lit, puis ce fut entre deux chaises que je pensais que cela se passerait. Steve a même proposé un échafaudage à un moment donné. Finalement, c’est la table qui s’est imposée. Elle est en bois et représente la nature, la montagne. On peut y voir aussi en dessous que c’est la tombe ou bien cela représente le passé, il y a plusieurs possibilités.

Finalement, pourquoi parler du deuil lors d’un suicide au lieu d’une mort accidentelle? D’abord parce que le suicide c’est une décision arrêtée, un choix longuement réfléchi de ne plus vivre, d’arrêter de souffrir. Cette décision, ce sont ceux qui restent après qui doivent vivre avec. Alors, cette femme vit avec ce sentiment de culpabilité de n’avoir pu le retenir auprès d’elle. Elle vit aussi une rage contre la vie, contre lui de l’avoir laissé tomber, et elle vit sa peine liée au deuil.

 


 

Pour plus de photos http://espace.canoe.ca/breton2010/album/view/837042

En résumé, c’est désespérant, troublant, émouvant cette pièce, qui est en fait une poésie déchirante sur le suicide et le deuil.

Cette pièce est présentée au Studio d’Essai de Méduse,
Mercredi, 2 juin à 22 h, 
jeudi 3 juin à 19 h, 
vendredi 4 juin à 21 h, 
samedi 5 juin 19 h.

Durée 1 h 15

Texte Steve Gagnon
Mise en scène
 Frédéric Dubois
Assistance à la mise en scène et régie 
Adèle Saint-Amand
Interprétation 
Steve Gagnon et Claudiane Ruelland
Décor
 Sébastien Dionne et Frédéric Dubois
Costumes 
Sébastien Dionne
Mouvement 
Geneviève Dorion-Coupal
Musique 
Marco Morin
Production 
 Théâtre des Fonds de Tiroirs

 

http://www.carrefourtheatre.qc.ca/

http://www.meduse.org/

 

 

Crédit photos : Lise Breton