Charlotte before Christ

 

Charlotte before Christ

Charlotte étudie la danse. Elle a des cicatrices sur le coeur : jamais connu son père, pas un sou, une fille brisée. Sacha, un gosse de riche, est à l’Université en microbiologie pour prendre la relève de son père à sa retraite dans sa compagnie qui fait de la recherche. Mais il est atteint de la maladie de Still, sorte d’arthrite qui l’empêche parfois de bouger tant la douleur est grande.

 Sacha et Charlotte sont amoureux. Amoureux fous et prêts à tout. Entre deux cours, ils squattent des maisons, font du vandalisme, écoutent beaucoup de musique, dialoguent sur internet et ne passent jamais plus de douze heures sans se texter qu’ils s’aiment. Et surtout, ils partagent un journal intime, le Black Book.

 J’adore découvrir de nouveaux auteurs québécois et j’aime bien quand ceux-ci nous surprennent avec leur style, nous étonnent avec leurs histoires, leurs personnages. Je peux dire que ce qui m’a d’abord attiré chez ce premier roman d’Alexandre Soublière, c’est le titre plutôt intrigant et la page couverture assez fascinante. Je savais que j’aurais droit à une histoire rocambolesque avec comme point de mire la génération de ces enfants-rois devenus adultes.

 Alexandre Soublière fait un excellent travail avec ce livre pour le moins déroutant, mais fascinant. Il nous propose des personnages très colorés, égocentriques (comme le sont bien des jeunes de nos jours), mais surtout, complètement à la dérive, à la recherche d’eux-mêmes.

 L’histoire principale tourne autour de la relation de Sacha et sa blonde Charlotte (leurs soirées en solitaire, à s’embrasser à l’épicerie, à voler dans les magasins, à regarder de la porno, à se filmer en train de baiser). C’est principalement de leur relation que cela parle, du point de vue de Sacha qui en est le narrateur. On y inclut parfois leurs amis David, Olivier et Paul et leurs soirées passées à prendre de la dope et faire le party et vandaliser les maisons de riches en vacances.

 Comme tous bons jeunes adultes de la génération des vingt ans, ils ont un langage très axé sur l’anglais et les réseaux sociaux. Leurs champs d’intérêt sont la musique, les films, la baise, la dope, le prochain party, le prochain délit.

 J’aime bien l’écriture de l’auteur. Il a une façon originale d’écrire ses dialogues.

« – Non, va-t-en pas, elle me supplie.

… – Est-ce que tu m’aimes? Un ton essoufflé

 … – T’étais où? Ça fait deux jours qu’on s’est parlé! je commence.

…- O.K. j’arrête, mais… Qu’est-ce qui se passe? Tu m’inquiètes, je dis avec ma voix tremblotante. »

 Il alterne bien entre les moments de narrations songées, les descriptions très détaillées et les dialogues rythmés. Le tout sur un ton parfois assez cru, sans gants blancs, il nous dresse un portrait d’une génération avec comme trame de fond un Montréal gris aux partys underground. Voici un petit extrait pour donner une idée de son style.

 « Elle commence à taper lémur dans Google, mais n’utilise pas l’accent aigu. La fonction de l’historique dans mon ordinateur montre les choix déjà recherchés commençant par LE. Charlotte cesse de taper lémur et regarde les choix : lee, leopard, lesbian emo, lesbian porn, le tigre, lettres de papier. Elle me regarde en souriant, comme si elle venait de découvrir un gros secret. Comme un détective qui découvre l’arme du crime. Comme Columbo, mais en moins attardé.

–         Ahhh ouin, lesbian porn ? elle s’esclaffe.

Je ris parce que je ne sais pas quelle autre réaction me permettre. Elle clique sur les mots et commence la recherche.

–         Fait que c’est ça que tu checkes quand tu te touches? …

–          Es-tu malade! Ça, c’est de la porn de bas étage. Genre de filles avec des fakes tits qui crient ben trop, je dis. …»

 Avec ce premier roman, Alexandre Soublière vient de me séduire comme nouvelle lectrice. Reste à savoir s’il pourra se renouveler et continuer à me surprendre!

 

Alexandre Soublière

Alexandre Soublière a aussi écrit pour le web de Radio-Canada (TOU.TV) et collabore avec plusieurs blogs. Il obtient un premier contrat de rédaction professionnelle pour une pièce de théâtre à l’âge de 17 ans. Après un DEC en littérature et un baccalauréat en communication profil vidéo à l’université Concordia, il se rend à New York pour participer à divers ateliers de scénarisation. Ses professeurs le remarquent pour la qualité de son écriture et, surtout, pour sa créativité. Alexandre apprécie la liberté que lui offre la littérature et les productions indépendantes. Avec peu de moyens, lui et son ami, le réalisateur Sébastien Landry, traînent une équipe à Havre-St-Pierre pour y tourner leur premier long-métrage durant l’été 2011. Son écriture est conséquente avec l’univers proposé par Montoire, son groupe de musique et collectif. Il se démarque par son sens du rythme et du dialogue.

 

En librairie depuis le 17 janvier 2012.

 

 224 pages

Prix : 22.50 $

 L’auteur parle de son livre :

http://blogue.editionsboreal.qc.ca/2012/01/17/video-entrevue-avec-alexandre-soubliere-qui-publie-son-premier-roman/

Éditions Boréal

http://www.editionsboreal.com