L’hiver dedans

Jonathan Gagnon, Marie-Ginette Guay, Catherine Hughes

Après Petit théâtre sans importance et Caresses, déjà présentées à Premier Acte, le Théâtre de Passage vous offre sa dernière production et première création : L’hiver dedans, du 20 novembre au 7 décembre 2012 à Premier Acte. 

Deux appartements aux murs mitoyens… 
D’un côté, Elle (Catherine Hughes), artiste visuelle. Grande brûlée de l’amour, frappée par le coup de foudre qui réduit en cendres, pas celui qui commence, mais celui qui termine l’histoire, elle plonge dans le trou de sa mémoire et remonte le courant de ses souvenirs entre les fantasmes, les rêves et les créations. Elle tente d’exorciser le fantôme de son ex et ressasse sans cesse cette soirée, un mardi soir 23 h 15, lorsqu’IL (Frédéric Bouffard) lui a dit qu’il la quittait.
De l’autre côté, Lui,(Jonathan Gagnon) ingénieur civil. Dans le cadre de son travail, il doit régulièrement rendre compte de l’avancement de ses travaux. Cette façon de structurer les choses le rassure. Pourquoi ne pas l’appliquer à sa propre vie? Survient sa mère (Marie-Ginette Guay) qui n’en peut plus de souffrir toute seule de la solitude chez elle et préfère venir vivre son deuil de son époux, avec son fils pour quelque temps.
Une tempête de neige sans fin s’abat sur la ville. Reclus dans leur appartement, les deux voisins qui ne se connaissent pas partagent pourtant bien plus qu’ils ne le pensent… 

Récompensé par le prix Première oeuvre de Première Ovation, L’hiver dedans parle de la solitude, de l’isolement, du deuil de l’être cher, parti pour l’au-delà ou pour une autre femme, de la peur de l’attachement. Encabanés dans leur appartement depuis des semaines, suite à l’énorme tempête de neige qui sévit, deux voisins, sans se rencontrer, se connaissent plus qu’ils ne le pensent. Ils sont le miroir l’un de l’autre, ressentant tous deux le froid, le vent, l’engelure du cœur. 

Pour bien faire ressentir au public de Premier Acte cet hiver en dedans que vivent les personnages, Maryse Lapierre y est allée d’une mise en scène fort ingénieuse et très méticuleuse, allant même jusqu’à faire installer des amoncellements de neige à l’entrée du théâtre Premier Acte, bien qu’aucune neige ne soit encore tombée à Québec. Au niveau du décor, c’est une grande pièce de style loft qui est reconstitué sur scène, tout en blanc, des murs aux accessoires, avec d’un côté, une table de cuisine et de l’autre un bain. Cet appartement est plus souvent utilisé moitié-moitié, avec un côté pour elle et un autre pour lui. Sauf qu’à l’occasion, ils empiètent dans l’espace de l’autre, bien naturellement. De plus, avec des projections vidéos et une trame sonore efficacement utilisée, les états d’âme sont accentués, au gré de la musique, du vent, du train qui passe. Mais ce qui m’a accroché le plus, ce sont les chorégraphies, d’abord au tout début de la pièce, puis à certains moments-clés, alors que les quatre comédiens, à l’unisson font exploser l’émotion par une danse, une transe, des mouvements synchronisés. Je trouve cela génial! Tout cela, pour ajouter de la poésie, de l’effet aux émotions. 

Catherine Hughes et Frédéric Bouffard

À cela s’ajoute le texte magnifique de Maryse Lapierre, où chacun leur tour, les deux voisins (et la mère) se racontent, se remémorent, s’expliquent leurs vies, leurs amours, leurs deuils. Catherine Hughes transpire la douleur de la peine d’amour. Elle se donne à fond. Autour de son bain qui est tour à tour, son lit, sa chaise et même son téléphone, elle se morfond et tente de reprendre pied dans sa vie.

Jonathan Gagnon, fidèle à lui-même, sait rendre de manière très juste le texte qui lui est offert. En deux phrases, il nous fait passer du rire à l’émotion vive. Pince-sans-rire, mi-sérieux, mi-rieur dans les yeux, on ne sait pas sur quel pied danser avec lui. Il se promène habilement sur la fine ligne des émotions.

Marie-Ginette Guay et Frédéric Bouffard viennent bien soutenir les acteurs principaux, par leurs interventions sporadiques qui viennent changer le cours des monologues et des rêveries de chacun. 

Avec l’hiver qui approche à grands pas, je pense que cette pièce est une bonne introduction à se parer pour les temps froids et pour revisiter ce qui se cache dans nos propres cœurs. Une introspection des personnages qui nous amènent à notre propre introspection. À voir! 

Fait intéressant, cette pièce a été écrite par Maryse Lapierre alors qu’elle-même venait de rencontrer sa voisine, Geneviève Lapierre, une artiste en arts visuels. Le personnage de la jeune femme dans la pièce est librement inspiré d’elle et on retrouve sur les murs de chaque côté de la scène des tableaux qui sont reliés au spectacle, mais également qui font partie de l’œuvre de Geneviève Lapierre. 

Pour en connaitre davantage sur Geneviève Lapierre et son œuvre, voici son blogue :

http://genevievelapierreart.blogspot.ca

 L’HIVER DEDANS

Par le Théâtre de Passage présenté à Premier Acte

Du 20 novembre au 7 décembre 2012 à 20 h,

et le dernier samedi, 8 décembre à 15h

 
Texte et mise en scène de Maryse Lapierre
Assistance à la mise en scène: Mary-Lee Picknell
Conception des costumes: Geneviève Lapierre
Scénographie: Karine Mecteau Bouchard
Musique: UBERKO
Concepteur Vidéo: Jean-Philippe Côté
Distribution: Jonathan Gagnon, Marie-Ginette Guay, Catherine Hughes et Frédéric Bouffard 

Crédit photos :  Gabriel Talbot Lachance