Rhinocéros au Théâtre du Trident du 5 au 30 mars

Jean et Béranger

Le Théâtre du Trident présente du 5 au 30 mars Rhinocéros une pièce d’Eugène Ionesco mise en scène par Alexandre Fecteau. Cette pièce raconte l’histoire de Béranger et de son refus de devenir un rhinocéros qui symbolise le conformisme et les instincts grégaires de l’homme. Elle souvent vue comme la métaphore de la montée du Nazisme en Europe. La troupe d’acteurs du Trident a su mettre en valeur les personnages et les archétypes du théâtre de l’absurde.

D’une part, il est à parier que redécouvrir la pièce « Rhinocéros » de Ionesco est toujours à propos. Surtout que les dictateurs et le conformisme n’ont pas terminé leur longue danse en travers des sociétés humaines. En fait, ce qui pousse l’homme à rentrer dans la bergerie s’apparente le plus souvent à l’acceptation commune sans réflexion faite au préalable. Les acteurs de la production du Trident, tout particulièrement Israël Gamache, ont un jeu qui dépasse celui même de la pièce originale. La voix des personnages du nom de Béranger  et Jean est le plus flagrant des contrastes de la pièce. Les deux personnages portent une amitié réciproque qui est très bien exposée par les deux acteurs. La rencontre entre la certitude de Jean et le doute de Béranger occupe l’espace actanciel d’une amitié étrangement belle. De plus, les discours criards du vieux logicien, la mise en valeur du stéréotype de la secrétaire Daisy, l’hésitation du juriste Botard à devenir un rhinocéros, le désespoir de Béranger ne sont que quelques-uns des aspects de la pièce qui marquent l’esprit du spectateur. Les répliques et le tact sont impeccables et exécutés par la rigueur scénique des acteurs et c’est ce qui pousse une vision au-delà du théâtre de l’absurde, parfois difficile saisir pour un public méconnaissant ce type d’humour des années 50.

D’autre part, la réactualisation de la pièce dans un contexte où les indices temporels tels les ordinateurs portables ou les équipements d’exercice d’un gym se succède est un pari audacieux qui est brillamment gagné par Alexandre Fecteau . En outre, l’insistance et la profusion des symboles dans la pièce « Rhinocéros » maintient le spectateur dans un constant dilemme entre rire ou trouver ça bizarre. L’exemple le plus flagrant est sans doute celui de la dispute entre le Jean et Béranger à savoir si le rhinocéros avait deux cornes ou une seule. Dans cette scène, le vieux logicien donne une explication peu compréhensible sur le sujet en imageant les rhinocéros comme des cornets pointus de crème glacée. Le choix des costumes est assez téméraire. Les rhinocéros portent tous un costume doré et gonflé comme une armature de super héros et, bien entendu, orné d’une corne à leur front. La couleur or de leur peau se détache du blanc crème des décors sur deux étages de la pièce.

Pour finir, la pièce « rhinocéros » présentée au Grand Théâtre de Québec a le pouvoir de nous émouvoir, de nous faire rire des travers des personnages tout en reproduisant avec justesse une image honteuse pour toute société digne : celle de l’acceptation d’une réalité outrecuidante.

Crédit phot : Vincent Champoux

 

Distribution : Marie-Josée Bastien, Normand Bissonnette, Frédérique Bradet, Anne, Marie Côté, Jean-Michel Déry, Jonathan Gagnon, Israël Gamache, Noémie O’Farrell, Réjean Vallée

Scénographie : Marie-Renée Bourget Harvey

Costumes : Élène Pearson

Éclairages : Hubert Gagnon

Musique : Yves Dubois

Maquillages : Élène Pearson

 

Théâtre du Trident

269, boul. René-Lévesque Est

Québec (Québec)

G1R 2B3

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