Le parlement du Québec, parcours photographique: notre Histoire en un monument dévoilé

Louise-Andrée Laliberté, Daniel Tremblay : Le Parlement du Québec © photo : courtoisie
Louise-Andrée Laliberté, Daniel Tremblay : Le Parlement du Québec © photo : courtoisie

Louise-Andrée Laliberté et Daniel Tremblay nous ont depuis quelques années habitués à leur regard photographique croisé sur le patrimoine architectural du Québec. Cette spécialiste multidisciplinaire en illustration d’édition et ce portraitiste d’Art doublé d’un photographe d’architecture ont ainsi sillonné le Québec et ont publié plusieurs livres résultats de leurs campagnes photographiques qui sont autant de témoignages sur notre histoire et notre patrimoine.

Aujourd’hui avec Le Parlement du Québec, parcours photographique, c’est le résultat d’un travail d’un cheminement qui nous est livré et transmis. Des années pendant lesquelles les deux photographes ont pu explorer de fonds en comble, accédant avec l’aval et le soutien des autorités et l’aide toujours attentive des fonctionnaires qui ont en charge ces lieux, l’ensemble de cinq édifices qui constituent avec les jardins, la Colline parlementaire. Des années aussi pendant lesquelles ils ont du aussi faire la sélection parfois déchirante de ceux, parmi tous les clichés pris,  qui figureront dans le livre, pour construire ainsi leurs itinéraires de découverte.

Le Parlement du Québec est de ces lieux que chacun croit connaître parce qu’ils sont partie intégrante de notre univers individuel et collectif visuel. Parmi ceux-ci, les bâtiments patrimoniaux et ceux qui incarnent notre pouvoir politique et législatif occupent évidement une place bien particulière surtout si, comme le Parlement, ils incarnent en un seul ensemble ces deux dimensions. Cette omniprésente dans notre univers visuel est due tout à la fois parce qu’ils sont maintes fois reproduits, cartes postales, images lors des informations ou toute autre émission d’actualités politiques, illustrations des manuels scolaires sans même parler de nos passages devant le bâtiment lui-même lorsque nos pas nous amènent à leur proximité et parce que nous les ne voyons jamais ou presque sans que leur symbolique forte de cadre dans lequel notre système politique se déroule, n’y soit associée. Nous pensons donc tous connaître ces bâtiments qui se confondent dans notre esprit et notre imaginaire avec l’institution qu’ils abritent et dont, parfois, ils portent même le nom.

Pourtant que connaissons-nous réellement de ces lieux derrière lesquels siègent ceux qui nous gouvernent, qui plus est en notre nom? Peu de choses en réalité. Une façade, un hall d’honneur, la salle où siègent les parlementaires, le bureau du Premier ministre… Et là encore, connaître est un bien grand mot. Qui de nous est vraiment un jour entré dans la bâtisse. Qui de nous a eu un jour le droit, l’occasion, de pénétrer dans le Salon bleu ou dans un bureau officiel. Qui ne nous se sent véritablement le droit de pénétrer dans ce bâtiment avec le sentiment d’être un peu le propriétaire de ce bâtiment collectif? Qui de nous serait capable de citer de mémoire le nom des cinq édifices qui le composent, ou encore leurs architectes et même les différentes fonctions qu’il abrite réellement. Bien peu en réalité. Pourtant connaître ce monument c’est effectuer un voyage dans notre Histoire et dans nos institutions. C’est décrypter, pour partie, de quoi est faite notre identité collective. C’est comprendre par l’organisation spatiale du monument notre système politique, notre démocratie. C’est avoir une attitude du citoyen éclairé parce que vouloir connaître et comprendre le bâtiment c’est en même temps vouloir connaître et comprendre cette réalité avec laquelle il fait corps : Le Québec en tant que collectivité qui s’est donnée une existence légale et institutionnelle.

Un voyage dans l’Histoire car ces cinq édifices, l’Hôtel du Parlement, l’Édifice Pamphile-Le May,  l’Édifice Honoré-Mercier, l’Édifice André-Laurendeau, et l’Édifice Jean-Talon ne serait-ce que par leurs seuls noms retracent  l’Histoire et plus particulièrement celle de l’évolution de nos instituions. Ainsi, la disparition du Sénat se lit dans la nouvelle dévolution donnée au Salon rouge. La montée en puissance de l’État se lit tout autant dans l’ajout des ailes au bâtiment d’origine. Mais cette histoire se lit aussi parce que de façon volontariste les bâtisseurs de la Colline parlementaire en ont fait un livre d’Histoire. C’est ainsi que des vitraux historisant retracent le premier voyage de Champlain de Honfleur en Nouvelle-France; que les statues qui se dressent  devant la façade principale sont des hommages aux grands Hommes qui ont fait le Québec et son Histoire, et que cette même façade porte ce qui s’est affirmé comme la devise du Québec: Je me souviens. Un voyage dans nos instituions puisque ce qui s’y rapporte du moins pour ce qui concerne notre vie institutionnelle provinciale s’y trouve rassemblé. Visiter les lieux c’est donc en même temps avoir un guide sur celle-ci. À chaque lieu ou presque sa fonction dans le fonctionnement de notre démocratie. À chaque lieu une parcelle de la compréhension et de la connaissance de cette démocratie.

Mais un lieu aussi chargé symboliquement ne peut pas non plus ne pas avoir une grandeur, une puissance architecturale. Tous les gouvernements, quels qu’ils soient, monarchies ou démocraties, ont toujours voulu que leur puissance s’incarne symboliquement dans le faste architectural. Le Parlement du Québec n’échappe à cette règle. Regarder le Parlement c’est donc découvrir qu’au delà de tout son utilitarisme et sa symbolique ce bâtiment est un réel ensemble de l’Art architectural et des Arts décoratifs.

Mais il y a regarder et voir. Le rapide coup d’œil individuel du néophyte que nous sommes souvent ne nous permet évidement pas de découvrir véritablement ce monument y compris les parties qui nous sont accessibles. Dominés par la grandeur aussi bien réelle que symbolique de l’ensemble nous ne savons où véritablement poser le regard et bien souvent nous ne percevons qu’un tout. Beau assurément mais que nous ne comprenons pas réellement parce que nous ne savons pas le déchiffrer, le lire.

La photographie est le médium indispensable pour nous guider dans cette démarche. C’est ce dont les auteurs de ce parcours photographique Louise-Andrée Laliberté et Daniel Tremblay nous convainquent. Grâce à leur travail, nous parvenons au cœur de l’édifice, de son histoire et de sa création artistique. Leurs yeux de photographes savent voir et donc nous faire voir ce que nous voyons sans voir, sans comprendre : Le détail d’un décor pourtant lourd de sens historique; les lignes géométriques savamment ordonnées d’un escalier qui naissent dans leur regard là où nous ne voyions qu’un escalier utilitaire; la perspective sur la Ville et le fleuve au travers d’une fenêtre et qui affirme l’emprise du Parlement sur l’espace et le temps de notre collectivité…

Mais bien plus qu’un médium, la photographie dans ce livre peut fièrement revendiquer son statu d’Art. Il n’est pour nous en persuader que d’admirer les somptueuses photographies, couleur ou noir et blanc, la subtilité des angles de vue, les jeux de lumières, la capacité de passer du détail à la prise de vue générale sans que jamais l’un fasse carte postale et l’autre insignifiant. Comme tout Art, cette photographie là sait nous révéler le réel pour en magnifier sa force et la symbolique, nous faire toucher à l’esprit et à la beauté des lieux tout en gardant sa puissance et son individualité intrinsèque hors de toute fonction utilitariste. Mais privilège aussi, la photographie prend dans ce livre aussi une autre de ses dimensions et non des moindres : Celle d’un Art qui rend hommage, décrypte et restitue l’esprit comme les réalisations des autres Arts : Celui de bâtir, celui de décorer, celui de gouverner.

Le Parlement du Québec, parcours photographique est tout à la fois un livre citoyen et un magnifique livre d’Art qu’il faut lire, découvrir pour mieux connaître et s’approprier notre patrimoine collectif et à travers lui notre démocratie.

Le Parlement du Québec, parcours photographique
Auteurs : Louise-Andrée Laliberté et Daniel Tremblay
Projet dirigé par Ophélie Delaunay
Conceptrice graphique : Véronique Loranger
Rédactrice des légendes : Louise-Andrée Laliberté
Rédactrice des textes d’introduction : Camille Lapointe
Réviseur historique : Gilles Gallichan
Préface de John R. Porter, historien de l’art et ancien conservateur du Musée national des beaux-arts du Québec.
Éditions Québec-Amérique : www.quebec-amerique.com
ISBN : 978-2-7644-1178-0  version papier
ISBN : 978-2-7644-2669- 2 version PDF
ISBN : 978-2-7644-2676-0 version ePub
29,95 $
176 pages
Avril 2014

Avec le soutien du Conseil des Arts du Canada et de la Sodec Québec

Les libraires: http://www.leslibraires.ca/livres/parlement-quebec-parcours-photographique-louise-andree-laliberte-9782764411780.html/1e72eafe83315fba1c013cb92454e55b4f51240b63b6185fe91d2d2b6f47b5fb8e0e77d452726ba9a2865993e5c3bda6f3c593ab9411ffdf1b3b38e0fb35d867/?u=4850

© photo : courtoisie