Visit’arts-Québec, visiter l’art autrement

Visit'arts-Québec
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Visit’arts-Québec

Les 21 et 22 juin, près de 90 artistes en arts visuels exposaient leurs oeuvres le long de la Promenade Samuel-de-Champlain, près du quai des Cageux, à Québec. L’évènement Visit’arts-Québec, organisé par la Société artistique et culturelle de Québec (SACQ), célébrait sa dixième édition sous la présidence d’honneur de l’artiste peintre Yves Ayotte.

Au Québec, on assiste depuis peu à une reprise économique dans le secteur du marché de l’art. Si certains artistes, choyés par la qualité d’une clientèle fidèle, ont à peine senti la crise de ces dernières années, d’autres, par contre, ont été contraints de trouver refuge dans un boulot de survie. Il est de plus en plus rare de nos jours de trouver des artistes en arts visuels qui vivent entièrement des ventes de leurs tableaux. Ils ont, pour la plupart, un « boulot alimentaire » qui les aide à poursuivre parallèlement leur carrière artistique. Certains artistes proposent des cours en arts pour rester dans le contexte, d’autres n’ont pas d’autres choix: ils doivent aller travailler chez un employeur. Une situation qui nuit à la quantité d’œuvres produites et à la qualité de la production chez l’artiste qui n’a plus le temps ni l’énergie de reprendre les pinceaux comme avant. Cette « perte » d’artistes professionnels à temps plein pourrait bien affaiblir encore plus le marché de l’art québécois, déjà en mauvaise santé par rapport au marché européen.

Suzanne Lavigne
Suzanne Lavigne

Les symposiums de peinture au Québec sont une nécessité pour les artistes qui ne sont pas dans des galeries et une épine dans le pied pour les galeries d’art qui ont vu leur clientèle, au plus fort de la crise, se tourner vers des œuvres moins dispendieuses trouvées dans des symposiums. Aujourd’hui, il existe près de 300 symposiums de peinture répertoriés auxquels participent les artistes québécois pour vendre leurs œuvres et se faire connaître aux quatre coins de la province et même au-delà. Si les galeries ont des ententes d’exclusivité avec leurs artistes permanents leur interdisant de vendre hors galerie, certains artistes de symposiums s’étonnent encore de ne pas être repérés par des galeristes après une expérience d’une centaine de symposiums. Ce clivage artistico-économique fait partie des réalités du marché de l’art québécois; on dissocie les artistes des symposiums de ceux qui sont dans des galeries, alors que la qualité peut se trouver aussi bien dans ces deux sphères du marché. Insidieusement, on a créé des castes chez les artistes québécois en arts visuels.

Dans une société de consommation comme la nôtre, on oublie souvent la condition de vie des artistes et leurs conditions de travail; ils vivent de peu et n’ont aucune sécurité financière. L’art est une vocation de moins en moins valorisée; trop de gens qualifient encore la peinture de passe-temps ou de loisir. On coupe aveuglément dans les arts et la culture, les subventions semblent être des miettes de table que seuls une catégorie d’artistes hors normes peuvent se partager, on négocie les œuvres au rabais lors de l’achat, etc. En un mot, on veut du « beau-bon-pas-cher » sans l’étiquette « made in China » et sans devoir mettre un sou dans le développement culturel des futures générations. A l’ère du numérique, où même l’art traditionnel est menacé par un art de reproduction où les giclées (parfois rehaussées par les artistes à la demande du vendeur) prennent de plus en plus la place des œuvres originales, vers quelle qualité d’œuvres allons-nous si on néglige aujourd’hui nos artistes peintres ? Quel héritage laisserons-nous aux prochaines générations ?

Gabriell (Gabriel Lavoie)
Gabriell (Gabriel Lavoie)

Quand un évènement de qualité est organisé – surtout dans un cadre aussi délicieux que la Promenade Samuel-de-Champlain – c’est l’occasion de sortir rencontrer les artistes. Une reprise économique dans le secteur de l’art est en cours, plus visiblement depuis le printemps 2013. Nombreux sont les amateurs d’art qui se laissent plus facilement tenter par un coup de cœur depuis cette timide reprise. Ensuite, avec ce que les deux paliers du gouvernement ont instauré comme incitatif fiscal, sous forme d’amortissement pour une société ou un individu en affaires, même les investisseurs-collectionneurs peuvent y trouver leur intérêt.

Il faut rappeler qu’une œuvre originale prend de la valeur avec le temps, une qualité qu’une reproduction ne pourra jamais offrir. En achetant une œuvre originale d’un artiste vivant, vous ne contribuez pas seulement qu’à réanimer notre marché de l’art, vous aidez aussi un artiste professionnel à vivre de son art.

Crédit photos: HeleneCaroline Fournier