L’opérette «Cousin cousine»: un mariage harmonieux entre humour et musique

Cousin CousineDepuis 11 ans les Productions Belle Lurette présente en mars une opérette peu connue mais toujours drôle et extravagante. Cette année ne fait pas exception avec «Cousin cousine» de Gaston Serpette, auteur de plus d’une trentaine d’opérettes. Créée à Paris en 1893 d’un livret de Maurice Ordonneau et Henry Kéroul, cette production est divertissante et pleine de rebondissements. Elle fait mouche avec une brochette de bons interprètes et de belles voix sur des chansons entrainantes.

«Cousin cousine» raconte l’histoire de Thérèse qui est très amoureuse de son cousin Pomerol. Mais ce dernier ne peut la sentir  à cause d’une vieille querelle familiale. Pomerol ne la reconnaissant pas, Thérèse se fait donc passer pour sa meilleure amie, Henriette. Le jeune homme en tombe amoureux. Grâce aux manigances du notaire, c’est sur une belle note que l’histoire se termine.

Marie-Philippe Bois (Henriette) et Eugénie Préfontaine (Thérèse)
Marie-Philippe Bois (Henriette) et Eugénie Préfontaine (Thérèse)

Le co-fondateur de Belle Lurette (http://www.bellelurette.org) Étienne Cousineau (semi-finaliste à La Voix) est le metteur en scène et chorégraphe de cette opérette. Il a su insufler un dynamisme et juste assez de folie pour en faire un spectacle des plus divertissants. Il n’y a aucune faiblesse vocale parmi la distribution qui est bien équilibrée et avec des voix justes. Les personnages colorés de cette histoire sont bien développés pour dérider et faire rire le spectateur. Seul petit bémol c’est le vieux langage utilisé dans cette pièce qui passe mal dans la bouche de certains interprètes moins habitués à cette langue ancienne. Par contre on apprécie l’accent développé par d’autres pour identifier leurs personnages comme Véronique, Mme Moutonnet ou Perdrigeon.

Benoît Godard (notaire), Sylvain Paré (Pomerol) et Philippe Gobeille (Jolivet)
Benoît Godard (notaire), Sylvain Paré (Pomerol) et Philippe Gobeille (Jolivet)

Eugénie Préfontaine (Thérèse) excelle par ses aigus cristallins et puissants avec un vibrato rapide, tout spécialement quand elle joue avec les nuances. On aime bien sa prononciation précise durant ses envolées vocales. Sylvain Paré (Pomerol) qui joue son prétendant est un interprète complet et vrai autant par son jeu que sa belle voix chaude pleine de graves, avec beaucoup de puissance autant dans les graves que les aigus. Mais c’est lors de leur duo qu’on réalise que leurs deux voix se complètent à perfection mettant en valeur la voix de l’autre.

La beauté de cette oeuvre c’est la place donnée à tous les personnages secondaires. À commencer par Benoît Godard (Notaire Tapenôtre) avec sa belle voix solide et un vibrato bien contrôllé. Il sait raconter son histoire avec une voix ronde et nuancée. Son jeu est juste et sa maladresse réussit à nous faire rire à tout coup. La directrice de la pension, Mme Moutonnet, est jouée par Jocelyne Cousineau qui est très expressive et donne envie de rire à chaque intervention. Ses scènes avec le notaire sont parmi les plus cocasses de la soirée.

Benoît Godard (notaire), Jocelyne Cousineau  (Moutonnet) et le choeur
Benoît Godard (notaire), Jocelyne Cousineau (Moutonnet) et le choeur

On remarque la voix expressive de Marie-Philippe Bois (Henriette) qui se marie bien aux autres avec ses aigus puissants. Marie-Josée Corneau (Véronique) est intense et vraie dans son jeu à chaque présence, tout spécialement dans son jeu de séduction avec le notaire. Frédérike Bédard (Mme Tapenôtre) est exceptionnelle dans le rôle de la femme trompée. Son jeu naturel n’a d’égal que sa belle voix mature de soprano. Michel Métayer (Baron) est très amusant en vieux courailleux de jupons. Sa baronne Anne-Sophie Tougas parvient à divertir la galerie avec son utilisation des subjonctifs à répétition.

Philippe Gobeille (Jolivet) est un bon faire-valoir pour Pomerol. Le choeur qui sert de soldats et d’assistants au notaire est une des belles trouvailles de ce spectacle. Mené par des interprètes très expressifs (Nathan LeLièvre et Serge Turcotte), ce groupe nous fait crouler de rire dans «Amis, célébrons tous en choeur» et surtout dans «Faisons halte, qu’on s’arrête» qui est non sans rappeler les numéros de style Bollywood.

Sylvain Paré (Pomerol) et le choeur
Sylvain Paré (Pomerol) et le choeur

La sonorisation de la salle est idéale: l’équilibre entre les voix et l’accompagnement au piano est parfaite. De beaux costumes et coiffures d’époque complétés par des décors simples et efficaces couronnent un spectacle haut en couleur. D’une durée de 2h35 avec entracte, ce spectacle plaira à toute la famille, jeunes et vieux. Les numéros du choeur et plus spécialement les finales de chaque acte avec du contrepoint sont notamment bien réussies. La chanson grivoise par Mesdames Moutonnet et Tapenôtre est un vrai petit bijou. Mais c’est l’ensemble de la distribution et la qualité vocale des interprètes qui apporte le plus à ce succès.

Les bons coups: distribution bien choisie, chansons entrainantes, humour, belles voix, chorégraphies amusantes, complicité de jeu

Les moins bons coups: vieux langage pas toujours approprié pour certains, stationnement difficile sur le Plateau

Équipe de création
Mise en scène et Chorégraphie: Étienne Cousineau
Décors: Philippe Gobeille
Costumes: Diana-Carmen Ratycz
Coiffures: Marie-Josée Corneau
Régie et éclairages: Mylène Pilon
Au piano: Pierre McLean

Michel Métayer (baron) et Benoît Godard (notaire)
Michel Métayer (baron) et Benoît Godard (notaire)

Distribution
Eugénie Préfontaine (Thérèse), Sylvain Paré (Pomerol), Benoît Godard (Notaire Tapenôtre), Marie-Philippe Bois (Henriette), Marie-Josée Corneau (Véronique), Jocelyne Cousineau (Mme Moutonnet), Frédérike Bédard (Mme Tapenôtre), Anne-Sophie Tougas (Baronne), Soleil Dion (Blanche), Marie-Pierre Rioux (Emma), Marie-Cindel Resco-Surprenant (Ursule), Michel Métayer (Baron), Philippe Gobeille (Jolivet), Ludovic Jean (Blancminet), Nathan LeLièvre (Perdrigeon), Serge Turcotte (Poliveau), Philippe Bolduc (Rigobert).

Présenté en français au Théâtre Rouge du Conservatoire de musique et d’art dramatique de Montréal, 4750 Henri-Julien, Montréal. Du 13 au 15 mars 2015 (vendredi 20h, samedi 14h et 20h, dimanche 14h).
Les billets disponibles au Conservatoire ou sur http://www.admission.com/ à 35$ et 30$ (étudiant) incluent taxes et frais.

Photos: Jean-René Beaupré