Entrevues avec les artisans du film Corbo qui prend l’affiche le 17 avril prochain!

Mes entrevues pour le film CORBO
Mes entrevues pour le film CORBO

Après un passage remarqué au Festival de Toronto, puis avoir été sélectionné dans le Canada’s Top Ten et aussi été présenté en compétition dans la section Génération de la 65e Berlinale, voilà que l’excellent film CORBO de Mathieu Denis, prendra l’affiche le 17 avril à Montréal, Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières et Gatineau. 

Montréal, printemps 1966. Dans un Québec en profonde mutation, Jean Corbo, 16 ans, un adolescent idéaliste né d’une mère québécoise et d’un père d’origine italienne, est écartelé entre ses deux appartenances. Après s’être lié d’amitié avec Julie et François, deux jeunes militants d’extrême gauche, il joint les rangs d’un groupe clandestin résolu à déclencher une révolution socialiste dans la province. Ce groupe clandestin, c’est le Front de libération du Québec (FLQ). Jean, dès lors, marche inexorablement vers son destin.

Mon appréciation du film sera disponible sur ce site à partir du 17 avril.

Voici les entrevues que j’ai réalisé avec le scénariste et réalisateur Mathieu Denis ainsi qu’avec 3 des acteurs principaux du film : Anthony Therrien, Antoine L’Écuyer et Karelle Tremblay.

Le film met aussi en vedette les acteurs Jean-François Pronovost, Simon Pigeon, Maxime Mailloux, Laurent-Christophe de Ruelle, Jean-François Poulin,  Stéphane Demers, Tony Nardi, Marie Brassard, Francis Ducharme et la participation spéciale de Dino Tavarone 

Mathieu Denis
Mathieu Denis

Mathieu Denis, (scénariste et réalisateur) : 

Ce film est extrêmement bien fait. On y retrouve des scènes très fortes, et des dialogues percutants. Je pense à la scène du grand-père avec son petit-fils, ou encore celle où Jean explique aux gens du FLQ pourquoi, lui, fils de riche, veut intégrer leurs rangs. Jusqu’à quel point ces scènes et dialogues, ou même ce film, proviennent des recherches que vous avez faites sur le sujet ou plutôt de ce que vous avez extrapolé pour en faire votre film? « C’est quand même assez proche de la réalité historique, parce que j’ai fait des recherches très exhaustives. C’est sûr qu’il y a des aménagements qu’il faut faire avec la réalité. Car les événements se passent sur une période de 5 mois et je dois mettre cela dans un film de 2 heures. Donc, on a par exemple fusionné divers événements. Mais de manière générale, ce qu’on voit dans le film s’est produit. Pour ce qui est des dialogues, j’ai surtout tenté de saisir l’essence de tous les personnages impliqués dans ces événements et j’ai essayé de leur faire dire des choses qui correspondent à cette essence-là. Pour ce qui est de la famille de Jean, plusieurs membres de sa famille m’ont parlé de lui et de son grand-père. Par exemple, on m’a dit que son grand-père était un mordu de la musique d’opéra. Donc, j’ai utilisé cet élément-là dans les dialogues. Également, le fait que le grand-père s’est désintéressé de la politique, alors que le père, lui, était très impliqué dans le PLQ, tout cela m’a servi dans les dialogues. » 

Quelles étaient les qualités que vous recherchiez pour le rôle de Jean Corbo et qui a fait en sorte que ce soit Anthony Therrien votre choix? « Tout d’abord, j’ai décidé dès le départ, et ce, pour tous les personnages, que même si ce sont des personnages historiques, je n’essaierais pas de trouver une ressemblance physique entre l’acteur et le personnage à jouer. J’ai préféré y aller avec ce que je croyais être l’essence du personnage pour trouver le bon acteur. Dans le cas de Jean, lors de mes diverses entrevues pour apprendre à le connaître, certains m’ont dit qu’il était jeune, ne savait pas ce qu’il faisait et s’était laissé embarquer dans ce groupe. Tandis que d’autres personnes, qui l’ont côtoyé de proche, m’ont affirmé qu’il était quelqu’un d’engagé et déterminé. J’ai donc voulu rechercher cette détermination tranquille et une certaine intériorité chez l’acteur pouvant le jouer. Et ceci, je l’ai vu rapidement chez Anthony qui bizarrement est le premier acteur que je voyais en audition. Et bizarrement, après chaque audition (et j’en ai passé vraiment beaucoup) je la comparais toujours avec celle d’Anthony. Finalement, j’ai bien vu que c’était Anthony que je voulais voir dans mon film. »

Ce film en est un d’époque, avec beaucoup de lieux, de figurants, et c’est en plus basé sur des faits historiques. Qu’est-ce qui a été le plus grand défi pour vous dans ce film? « Il y en avait plusieurs. Disons qu’il y a eu un grand défi à l’écriture et un autre au tournage. À l’écriture, il y a eu ce dilemme que j’ai ressenti entre la justesse historique, le respect des événements et entre le fait que je fais une œuvre dramatique et en fin de compte c’est mon point de vue sur ces événements. C’était donc de faire la juste mesure dans tout ça. Ma première version de scénario, ce n’était qu’une enfilade d’événements historiques, et c’était d’un ennui mortel. Comme autre défi, au niveau du tournage, ce fut de faire un film d’époque, avec les moyens qu’on a au Québec. Souvent, quand on fait un film d’époque au Québec, on en fait un huis clos, dans un nombre restreint de lieux. Mais moi, le scénario que j’avais, m’amenait dans plusieurs lieux à Montréal, à la campagne, avec plein de figurants qu’il faut tous habiller, coiffer et maquiller comme à cette époque. Et je voulais pouvoir faire de grands plans, avoir une ampleur, prendre du recul, qu’on puisse voir les lieux. Cela a été très complexe de trouver ces lieux qui pouvaient ressembler à 1966.  » 

Que voulez-vous que l’on retienne de votre film, sur Jean Corbo et ce qui s’est passé en 1966? « Il est certain que quand on parle des gens qui ont été dans le FLQ, on ne peut pas en parler avec frivolité ou désinvolture. Il faut remettre en question le choix des moyens qu’ils ont pris. Ils ont fait le choix d’avoir recours à la violence pour faire avancer les choses. On ne peut pas vraiment applaudir ça c’est certain. Mais il faut se poser des questions par rapport à ça. Oui il y avait des raisons qui les amenaient à faire ça et c’est bien de les savoir. Mais, qu’on approuve ou non ce choix des moyens là,  la chose que j’ai trouvé assez fascinante et inspirante chez Jean Corbo et chez les gens qui l’entouraient au FLQ, c’est qu’eux avaient vraiment la profonde conviction que c’était possible de changer le monde dans lequel ils vivaient. Ils pensaient pouvoir poser des gestes concrets qui permettraient de changer le monde. Et je pense que c’est quelque chose qu’on a beaucoup perdu avec le temps. On dirait qu’on vit dans une époque où on se sent un peu résigné. On se laisse un peu porter par les choses. Et ce n’est pas la voie à suivre, je pense. Il faut qu’on retrouve un peu cette impression-là que s’il y a des choses qui ne nous plaisent pas, il suffit juste de retrousser les manches pour faire changer les choses. Et pas seulement penser que les choses sont comme elles sont et qu’on ne peut rien y changer. Si cet esprit-là qui animait les personnages qu’on voit dans le film pouvait un peu déteindre sur mes contemporains, ce serait déjà beaucoup. » 

Anthony Therrien
Anthony Therrien

Anthony Therrien (rôle de Jean) 

D’avoir le premier rôle dans un film et en plus de jouer quelqu’un qui a déjà existé et qui a eu un impact sur le Québec, cela représente quoi pour toi ? « Dans ce cas-ci, Jean est décédé très jeune et on avait peu d’informations sur comment il était exactement. Mathieu a rencontré certains membres de sa famille pour cerner qui il était en fait. Et c’est donc Mathieu qui a développé sur papier le personnage de Jean Corbo. Il me l’a décrit, on l’a travaillé ensemble et ensuite je l’ai interprété comme un autre personnage de fiction pour moi. » 

Et comment le décrirais-tu ce personnage de Jean Corbo? « Jean est un jeune italo-québécois de 16 ans qui habite Westmount. Il est tiraillé dans ses origines, avec un père italien et une mère québécoise. D’un côté comme de l’autre, il ne réussit pas à s’intégrer. Il parle peu italien et il se fait traiter de wop par les Québécois. Il se pose donc la question, qui suis-je ? Et qu’est-ce que je veux faire? Il décide de choisir le côté québécois et embarque dans le FLQ. Dans cette recherche d’identité, il va finir par se perdre en même temps qu’il va se trouver. »

 Quel a été le plus grand défi pour toi dans ce film? « Jean n’est pas un jeune homme qui s’exprime beaucoup ou qui va parler ouvertement à ses parents, de ses projets, de ses idéaux. Il a beaucoup d’intériorité. Donc, c’est un jeu qui est vraiment intérieur. Mais il y a aussi le concept de se mettre dans la peau d’une jeune de 16 ans à cette époque-là. Moi, j’avais 15 (presque 16 ans) lorsque j’ai tourné ce film. Et je me demandais, est-ce que moi à mon âge je me serais vu aller porter une bombe pour une cause qui me tient à cœur.  Vraiment, et totalement pas. Sauf qu’il fallait que je me mette dans la peau de ce personnage, que je sois convaincant dans ce rôle. C’était donc un gros défi de faire croire aux gens que je suis tellement convaincu de mes idées que je veux tellement arriver à mes fins, que je vais aller poser des bombes pour un mouvement radical qui, pour eux,  le seul moyen d’arriver à leurs fins c’est d’utiliser la violence. »

Sur quoi travailles-tu présentement? As-tu d’autres projets? « Au début de l’été, je vais tourner un autre film, qui s’appelle Miséricorde. C’est un premier rôle, et c’est réalisé par Fulvio Bernasconi et c’est une coproduction Suisse Montréal. Sinon, pour le reste, je suis à terminer mon secondaire V à l’école Armand-Corbeil à Terrebonne en option art dramatique. Et je suis accepté au CEGEP Lionel-Groulx à Ste-Thérèse en gestion de commerce. Je vais au CEGEP en gestion de commerce, car c’est important pour moi d’avoir un plan B, même si je veux poursuivre mon métier d’acteur. Dans le cinéma québécois il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus, alors il est important d’avoir un plan B. » 

Antoine L’Écuyer
Antoine L’Écuyer

Antoine L’Écuyer (rôle de François) 

Comment décrirais-tu le genre de ce film de Mathieu Denis? « Je pense que Mathieu a fait un film qui sort des sentiers battus. Il a osé faire quelque chose que bien peu de réalisateurs auraient osé. C’est son premier long métrage qu’il fait tout seul et je ne crois pas que ce sera son dernier. »

Parle-moi de ton personnage de François dans le film. Comment tu le perçois? « François c’est un gars déterminé. C’est un militant d’extrême gauche. C’est grâce un peu à lui et Julie justement que Jean va décider d’embarquer dans le FLQ. François donc se bat pour sa cause, jusqu’à un attentat dans le film, où là, il y a comme une cassure. Alors, l’humanité de mon personnage ressort et il va même jusqu’à se demander si c’est pour les bonnes raisons qu’il pose ces gestes-là. Donc, c’est quelqu’un de très humain, mais avec de fortes convictions.»

Le fait que ce soit une personne qui a déjà existé que tu doives jouer et que ce sont des événements réels, qu’est-ce que cela représente pour toi de plus? « Moi, je suis quelqu’un de très militant dans la vie. Je vais par exemple boycotter des compagnies, ou ce genre de truc. De faire ce film m’a permis de voir à quel point il y a des gens, dans l’histoire, dans mon pays, qui ont eu le courage que beaucoup aujourd’hui n’ont pas. C’est sûr que leur choix de moyens d’action est extrême, sauf que je ne connais personne dans mon entourage qui irait aussi loin dans ses convictions. À l’époque ces gens avaient l’espoir de changer le monde en se battant pour leurs convictions. Alors qu’aujourd’hui, le discours que j’entends beaucoup c’est, on ne peut pas changer les choses. C’est comme ça et c’est tout. Et ça, je ne suis vraiment pas d’accord avec cette façon de penser-là. »

Sur quoi travailles-tu présentement? As-tu d’autres projets? « J’ai un film qui sort à la fin de l’été. Le bruit des arbres de François Péloquin, avec Roy Dupuis. Sinon, je n’ai pas d’autre tournage en vue, et je me consacre à terminer mes études, mon secondaire V présentement. Ensuite, on verra ce qui s’offrira à moi.» 

Karelle Tremblay
Karelle Tremblay

Karelle Tremblay (rôle de Julie) 

Parle-moi de ton personnage de Julie, une jeune recrue du FLQ, dans le film. Comment tu la perçois? « Mathieu nous a très bien expliqué son film et chacun de ses personnages, si bien qu’on a eu énormément de temps pour bien comprendre notre personnage. Ce que j’aime beaucoup du personnage de Julie c’est qu’elle était une des rares femmes (jeune fille même) à cette époque-là à faire partie de groupes radicaux comme ça. Ça ne se faisait pas beaucoup dans ce temps-là chez les femmes. Et en plus, Julie n’était pas différente des garçons. Elle était traitée comme leur égal. »

Il est comment Mathieu comme réalisateur justement? « Il est excellent, car il connaît tellement son sujet. Le fait qu’il le connaisse sur le bout de ses doigts, son sujet, cela fait en sorte que peu importe ce qu’il va nous dire, cela sera pertinent pour notre jeu, notre compréhension. De travailler avec lui c’était vraiment enrichissant et informatif à un point tel que je pense avoir plus appris sur ce tournage-là que dans tous mes cours d’histoires que j’ai eues au secondaire. Il est le spécialiste de cette époque-là. On pouvait poser une petite question sur un truc et pour bien nous expliquer, il nous ramenait parfois super loin en arrière et bouclait la boucle par la suite. Cela nous a permis d’être hyper confiant et de connaître l’histoire comme si on l’avait vécu. »

Quel a été le plus grand défi pour toi dans ce film? « Le fait que je n’ai pas connu moi-même cette époque, cela faisait partie du défi. Car d’interpréter une jeune fille de l’époque de mes grands-parents c’est bien différent que d’interpréter une jeune fille dans notre monde contemporain. Ce n’est même pas une question de langage, mais plutôt une question de posture. Les gens à cette époque se tenaient droits, pas un peu mou, ou relâché comme nous maintenant. Donc, j’ai dû faire attention à ma posture, ma démarche et ma gestuelle pour qu’elle soit représentative de l’époque, et donc contre mon propre gré. »

Sur quoi travailles-tu présentement? As-tu d’autres projets? « J’ai terminé le tournage du prochain film d’Anne Émond, les êtres chers, qui va sortir au courant de l’automne. Ensuite, je vais tourner dans le prochain film de Podz, King Dave, à la fin mai, début juin. » 

Voici la galerie de photos lors des entrevues :

https://www.flickr.com/photos/infoculturephotos/sets/72157651962225441/

Genre: drame historique

Durée: 1h59

Sortie en salles: 17 avril 2015

Tournage: Montréal et ses environs, du 3 septembre à la mi octobre 2013

Budget approximatif: 4,1 M$

 

Production

Max Films Média Inc.

 

Jean Corbo ANTHONY THERRIEN

François ANTOINE L’ÉCUYER

Julie KARELLE TREMBLAY

Nicola Corbo TONY NARDI

Mignonne Corbo MARIE BRASSARD

Frère de Jean JEAN-FRANÇOIS PRONOVOST

Achille Corbo DINO TAVARONE

Mathieu FRANCIS DUCHARME

Jacques SIMON PIGEON

Alain MAXIME MAILLOUX

Louis LAURENT-CHRISTOPHE DE RUELLE

Robert JEAN-FRANÇOIS POULIN

Professeur Lacasse STÉPHANE DEMERS

 

Scénariste MATHIEU DENIS

Réalisateur MATHIEU DENIS

Productrice FÉLIZE FRAPPIER

Producteur exécutif ROGER FRAPPIER

Productrice associée SYLVIE LACOSTE

Distribution – Canada LES FILMS CHRISTAL / LES FILMS SÉVILLE

Ventes internationales BE FOR FILMS

Image STEVE ASSELIN

Direction artistique ÉRIC BARBEAU

Costumes JUDY JONKER

1ère assistante à la réalisation JEANNE LEBLANC

Distribution des rôles CATHERINE DIDELOT (Films de la Pleine Lune)

Distribution de la figuration CAROLE DIONNE

Directrice de production MARIE-CLAUDE BEAULIEU

Preneur de son CLAUDE LA HAYE

Concepteur sonore PATRICE LEBLANC (Bande à part)

Mixeur BERNARD GARIÉPY STROBL

Musique originale OLIVIER ALARY

Monteur NICOLAS ROY

Photographes de plateau PHILIPPE BOSSÉ, BERTRAND CALMEAU,

MARLÈNE GÉLINEAU PAYETTE

www.corbo-lefilm.com

Facebook : https://www.facebook.com/CorboLeFilm

Crédit photos : Réjeanne Bouchard