On ne badine pas avec l’amour Musset – Poissant

On ne badine pas avec l'amour  © photo courtoisie
On ne badine pas avec l’amour © photo courtoisie

« Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches,

méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses

et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent

et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime,

 c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. »

                                               On ne badine pas avec l’amour, Alfred de Musset.

La saison 2015-2016 du Théâtre Denise-Pelletier (TDP) débute dans la grande salle avec l’un des plus beaux et cruels dialogues amoureux de la littérature romantique : On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset, présenté du 30 septembre au 24 octobre 2015. Claude Poissant signe la mise en scène de cette pièce phare de l’œuvre de l’auteur. Il monte ainsi Musset pour la troisième fois, après Lorenzaccio au TDP (1999) et Les Caprices de Marianne au Théâtre du Trident (2000). Pour incarner les deux amoureux d’On ne badine pas avec l’amour, Perdican et Camille, Claude Poissant a choisi deux comédiens inspirés, Francis Ducharme (Cinq visages pour Camille Brunelle, PàP,  2013-2015) et Alice Pascual (J’accuse, Théâtre d’aujourd’hui, 2015).

Drame romantique sur la naissance et la mort de l’amour, publié en 1834 – Musset a alors 24 ans – On ne badine pas avec l’amour tire largement son origine de la relation amoureuse tumultueuse entre Musset et l’écrivaine et poétesse Georges Sand.

La pièce : Après dix ans de séparation, Perdican retrouve Camille. Mais comme la candeur de l’enfance est disparue sous la jeunesse, les deux amoureux semblent incapables de s’avouer leur flamme. Camille préfère se donner à Dieu plutôt que d’épouser Perdican et les discours de fantoches risquent fort d’aggraver la situation…

La pièce ne sera présentée sur scène que vingt-sept ans après sa publication.  Irrité par la critique, Alfred de Musset fait paraître à partir de 1832 ce qu’il nommera « Un spectacle dans un fauteuil », offrant ainsi aux lecteurs du théâtre à lire. Parmi ses autres pièces dites pour un fauteuil, il y a Fantasio, Lorenzaccio et Les Caprices de Marianne.

Par sa liberté formelle, On ne badine pas avec l’amour tient une place à part dans le théâtre de l’époque. À la fois comédie et drame, la pièce met en scène des personnages sans statut héroïque, qui touchent le spectateur par la lucidité de leurs discours sur l’amour. Perdican et Camille sont des personnages autonomes de parents, rompant ainsi avec une longue tradition dramaturgique française, d’où leur modernité. Si leurs sentiments qui s’opposent les poussent vers le drame,  les personnages d’adultes autour d’eux s’avèrent plus légers, plus fantoches, ce qui crée d’immenses contrastes.

Ainsi, l’exaltation du sentiment amoureux mêlée à l’humour et au tragique inscrit l’œuvre parmi les plus marquantes du romantisme, même si Musset a toujours été tiède à l’idée de faire éloge de ce grand mouvement à la fois littéraire et politique. Musset s’isole ainsi, ne se réclamant d’aucun mouvement. Sa passion, son infinie mélancolie, l’art comme remède à sa douleur, ses dérives amoureuses et ses nuits blanches, puis son œuvre imprévisible, moins construite que celles de ses semblables, plus impulsive et toute aussi politique parce que sans concession, en font pourtant le plus limpide des romantiques.

Claude Poissant fouille l’intemporalité de cette pièce, tentant de cerner comment jouer avec modernité cette œuvre aussi importante qu’indéfinissable. En choisissant un espace plus poétique que tangible, Poissant propose, sans morale, trois portraits de jeunesse : Camille, Perdican et Rosette (Rachel Graton), qui offrent, sans ménagements et usant parfois de stratèges, leurs forces et leurs faiblesses, de l’espoir à l’orgueil, de la naïveté à la destruction.

Claude Poissant : mise en scène

Directeur artistique du Théâtre Denise-Pelletier depuis 2014, il a été auparavant codirecteur artistique et l’un des fondateurs (1978) du Théâtre PàP, une compagnie vouée à la dramaturgie contemporaine. Figure de proue du théâtre québécois depuis plus de trente ans, Claude Poissant est un défricheur et un défenseur de paroles. Parmi ses mises en scène récentes, rappelons Le Traitement de Martin Crimp, Je voudrais me déposer la tête de Jonathan Harnois, Abraham Lincoln va au théâtre de Larry Tremblay, Mutantès de Pierre Lapointe, Rouge Gueule d’Étienne Lepage, The Dragonfly of Chicoutimi de Larry Tremblay,  et Tom à la Ferme de Michel Marc Bouchard.  Il a également signé les mises en scène de Tristesse animal noir de Anja Hilling, Après moi, le déluge de Luisa Cunillé, Bienveillance de Fanny Britt, Marie Tudor de Victor Hugo, Cinq visages pour Camille Brunelle de Guillaume Corbeil et, dernièrement, de Grande Écoute de Larry Tremblay, une réflexion mordante et insidieuse sur la compassion.

Texte : Alfred de Musset

Mise en scène : Claude Poissant

Avec Adrien Bletton, Henri Chassé, Francis Ducharme, Olivier Gervais-Courchesne, Rachel Graton, Martin Héroux, Alice Pascual, Christiane Pasquier et Denis Roy

Conception : Angelo Barsetti, Catherine Desjardins-Jolin, Éric Forget, Simon Guilbault, Victor Lamontagne, Julie Measroch, Alexandre Pilon-Guay, Marc Senécal et Jean-Simon Traversy

Du 30 septembre au 24 octobre 2015

Salle Denise-Pelletier du Théâtre Denise-Pelletier

4353, rue Ste-Catherine Est, Montréal

Billetterie : 514 253-8974 www.admission.com

www.denise-pelletier.qc.ca