« L’autre hiver », l’après drame passionnel de Rimbaud Verlaine

L’Autre hiver © Kurt Van der Elst
L’Autre hiver © Kurt Van der Elst

Le 10 juillet 1873, dans leur petite chambre d’hôtel située à Bruxelles, Paul Verlaine tire un coup de revolver sur son jeune amant Arthur Rimbaud et le blesse légèrement à la main. Cet événement qui vaudra de la prison à Verlaine, marque aussi et surtout la fin d’une des liaisons les plus houleuses et troublantes de l’histoire de la littérature.

Brisant les règles de la poésie, également celles de la morale ainsi que les conventions de la société, Rimbaud prône le dérèglement de tous les sens pour le poète et son art. Il faut rompre les amarres, partir à la dérive… En plein hiver, sur un navire rempli de passagers fantomatiques dont de nombreux enfants – bateau ivre bravant les flots d’une mer glacée, sombre et agitée – les deux hommes se retrouvent bien après leur rupture. Cette rencontre n’a probablement jamais eu lieu. Sans doute n’est-ce que le rêve d’un Verlaine inconsolable et déchiré par sa rupture, et dont la main s’est transformée en revolver.

Sur le pont du navire, devant les effigies de passagers témoins et pétrifiés dont les visages seulement s’animent, avec la neige qui se mêle à l’écume des vagues, les amants terribles font un retour poétique et musical sur leur amour, leur passion et jusqu’aux trahisons de leur relation impossible. La passion amoureuse a mené à l’amour passionnel et au crime passionnel de l’amour de Verlaine qui ne s’en remet pas.

« Je est un autre ». La phrase bien connue d’Arthur Rimbaud sert de trame à l’opéra fantasmagorique, théâtre musical onirique, drame symboliste et intemporel à la manière de Maeterlinck, qu’est L’autre hiver de Normand Chaurette, Denis Marleau et Stéphanie Jasmin sur une musique mystérieuse de Dominique Pauwels. Un chœur d’enfants accompagne les belles voix sopranos de Lieselot de Wilde et de Marion Tassou. Car ce sont des femmes qui interprètent les rôles des deux hommes dans cet opéra du XXIe siècle avec six musiciens dirigé par un chef d’orchestre sur scène, et des chœurs enregistrés. Les passagers sont des mannequins sans pieds, inachevés, emmitouflés dans leurs imperméables, et dont les visages parlant et chantant sont des projections semblables à celles que la compagnie de création UBU a déjà réalisés lors de la grande exposition sur Jean-Paul Gauthier. Derrière le pont, en fond de décor, un écran géant accueille les projections vidéo de la mer calme dans laquelle se reflète le navire, ou très agitée qui reçoit la neige tombée du ciel ou encore celle des visages innocents des enfants.

L’Autre hiver © Kurt Van der Elst
L’Autre hiver © Kurt Van der Elst

Tout l’opéra est placé sous les auspices du visage enfantin. Verlaine semble à la recherche de l’innocence enfantine qu’il dût percevoir chez son amant de 17 ans au moment de leur rencontre. Verlaine a connu le bonheur absolu. Et c’est comme si l’enfance, si fragile et innocente, devait se métamorphoser en malheur absolu (Thanatos) au contact d’Éros…

L’autre hiver est un spectacle plein d’émotions, à la fois délicat et mystérieux, très beau et passablement inquiétant; une sorte de voyage onirique sur la mer agitée de l’amour impossible.

L’Autre hiver les 1er et 2 juin 2016 au Centre Pierre-Péladeau – Salle Pierre-Mercure à Montréal

Normand Chaurette + Denis Marleau et Stéphanie Jasmin + Dominique Pauwels, Gand + Mons + Montréal

En français avec surtitres français et anglais

Coproduction du FTA

Informations : http://fta.ca/spectacle/lautre-hiver-opera-fantasmagorique/

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