Entrevue avec les artisans du film NELLY, qui prend l’affiche le 20 janvier prochain!

Anne Émond et Mickaël Gouin pour le film Nelly
Anne Émond et Mickaël Gouin pour le film Nelly

Le film Nelly librement inspiré de la vie et de l’œuvre de l’écrivaine Nelly Arcan, scénarisé et réalisé par Anne Émond, prend l’affiche dès le 20 janvier 2017, partout au Québec et mets en vedette Mylène Mackay dans le rôle-titre de Nelly (Isabelle Fortier), représentée sous 4 facettes : l’écrivaine; l’amoureuse; la putain et la star. Un bel hommage à l’œuvre littéraire de Nelly Arcan et à l’artiste complexe et mystérieuse qu’elle était.

Mon appréciation du film est disponible via ce lien :

https://info-culture.biz/2017/01/19/nelly/#.WIFMZdThDvY

 

 Voici mon entrevue réalisée avec Anne Émond et l’acteur Mickaël Gouin.

Résumé

Un film librement inspiré de la vie et de l’oeuvre de Nelly Arcan. Le portrait d’une femme fragmentée, perdue entre ses identités irréconciliables d’écrivain, d’amoureuse, de putain et de star. Plusieurs femmes en une seule, naviguant entre grandes exaltations et grands désenchantements. Un film à l’image d’une vie violente et d’une oeuvre radicale; un hommage à une écriture dense, glaçante et nécessaire.

Anne Émond
Anne Émond

Questions pour Anne Émond  Comment est né ce projet de scénarisation et de réalisation de ce film Nelly? « Je n’ai jamais connu personnellement Nelly Arcan. J’ai environ 10 ans de plus jeunes qu’elle et j’étais étudiante lors de la sortie de ses premiers romans. Et je dois dire que j’étais vraiment très impressionnée et admirative de son œuvre. Et j’étais à la fois parfois irritée par ce qu’elle dégageait lors de ses sorties médiatiques. Sa mort, en 2009, je l’ai appris sur Facebook et cela m’a énormément touché. J’avais l’impression de perdre une amie, alors que je ne l’avais jamais rencontré. À ce moment, je me suis dit qu’un jour je ferais un film ou du moins un projet inspiré d’elle. Mais c’est en 2012 que Nicole Robert m’a approché pour travailler sur son histoire et même si je trouvais que c’était tôt après sa mort, j’avais envie de le faire. » 

Qu’aviez-vous justement comme mandat ou quelle idée de film aviez-vous au départ? et qu’avez-vous fait comme recherche sur Nelly (Isabelle Fortier) ? « J’ai d’abord fait énormément de recherches. J’ai rencontré des ex, des amis, de la famille, psychanalyste, éditeur, et j’ai écrit un biopic conventionnel de 100 pages et cela m’a pris un an. Et cela racontait sa naissance à Lac-Mégantic, son enfant, son adolescence, etc.. Et quand je l’ai lu après un an, j’ai trouvé ça plate, plate, plate. J’étais découragée. Car en plus, c’était comme un gros mensonge. Les faits étaient là, mais ça ne collait pas du tout à Nelly Arcan le personnage explosif, un peu névrosé, sexy et souvent en montagne russe que l’on connaissait.  De plus, ses romans sont tout sauf conventionnels. Il n’y a pas de début, milieu, fin, dans ses œuvres. Alors, de faire un film conventionnel sur elle, cela ne marchait pas du tout. Et bien sûr, mon film soulève plus de questions qu’il ne donne de réponses. Mais soyons clairs, les réponses, c’est elle qui est partie avec ses réponses. Même son père ne savait pas pourquoi Nelly était si dark. Le mystère qui l’entourait n’a jamais été éclairci de son vivant. Et de faire un film et prétendre comprendre ce personnage qu’est Nelly Arcan, cela aurait été prétentieux. Tandis que ce film a été fait pour lui rendre hommage. C’est son écriture qui est mise de l’avant. Ses thèmes sont vraiment là. On sent ses douleurs. Il y a des pistes qui donnent une idée de son drame. On parle de la prostitution, de son angoisse par rapport aux critiques et aux médias. On parle de ses relations amoureuses très houleuses et toxiques. On parle de son besoin d’être désirée par le plus d’hommes possible. Même elle, j’ai l’impression que lorsqu’elle a commis son geste ultime, elle ne savait plus elle-même qui elle était. Je pense qu’elle était complètement perdue. »

Comment s’est fait le choix de Mylène Mackay pour le rôle de Nelly? «Quand on a annoncé qu’on allait faire ce film, il y a eu énormément de comédiennes qui ont voulu auditionner pour le rôle, et on a en passé une quarantaine en audition. Au niveau de la ressemblance physique, ce n’était pas un prérequis d’être semblable, car Nelly a eu tellement de chirurgies dans sa vie qu’elle ne se ressemblait plus de l’adolescence à l’âge adulte. Et je n’avais pas non plus nécessairement envie d’une actrice trop connue qu’on reconnaitrait trop facilement. Lorsque Mylène a fait son audition, elle était comme une bombe! Elle avait toute une énergie! On sentait qu’elle voulait vraiment le rôle. C’était beau à voir. Et elle connaissait toute l’œuvre de Nelly et elle savait exactement dans quoi elle embarquait. Elle a énormément de talent. On a parlé beaucoup du rôle, du film, de chaque scène. Mais à partir du moment où on tournait, je n’avais presque rien à lui dire. Et elle avait des scènes vraiment difficiles à jouer, des scènes de violence, des scènes de nudité et pourtant cela semblait facile.»  

La musique, les chansons sont très belles et appropriées dans le film. Je crois qu’il y a plusieurs pièces originales de Dear Criminals. Pouvez-vous me parler de cette collaboration? «Dear Criminals est un groupe qui vient de Montréal. Ils sont trois. Je les avais vus en spectacle et je connaissais quelques-unes de leurs chansons et je les aimais vraiment beaucoup. J’écrivais le scénario en écoutant certains de leurs albums et je trouvais que le style allait bien avec mon film. Je leur ai donc demandé de composer pour le film. Donc, dans le film, il y a des pièces exclusivement écrites pour Nelly et d’autres pièces de leurs autres albums. Il y a aussi des chansons d’ailleurs comme celle de Dalida et celle de François Hardy. Dear Criminals a aussi sorti un mini-album des chansons qu’ils ont composées pour le film et il contient aussi des pièces qui n’ont pas pu se retrouver dans le film, car je voulais aussi laisser des silences et de la place pour les mots de Nelly Arcan.»

Le film a été présenté dans plusieurs festivals. Quelle est la réaction des gens dans les festivals et est-ce que c’est différent d’un pays à l’autre? « Oui c’est sûr. Hier on a présenté le film à Gatineau devant un public québécois. Et c’était la première fois qu’il était montré devant un public qui connaissait Nelly Arcan. Et j’étais vraiment stressée. Car ici, ils ont leur Nelly. Ils ont des attentes. Ils pensent peut-être qu’ils trouveront des réponses à leurs questions.  J’ai voyagé avec le film, et ce n’est pas la même chose dans ces autres endroits. Cela a commencé à Toronto en septembre au TIFF, puis il y a eu des festivals en Europe et aux États-Unis. Alors dans les festivals ailleurs, comme ils ne la connaissent pas, pour eux, c’est un film sur ce que cela veut dire d’être une femme aujourd’hui. L’espèce de tyrannie de la beauté, de la jeunesse, du succès.  Nelly se doit d’être la meilleure prostituée, la meilleure écrivaine, la meilleure amante. C’est comme ça qu’ils l’ont vécu à l’extérieur. Et ils étaient tous très curieux après le visionnement et ils voulaient voir des photos de la vraie Nelly Arcan et cherchaient à commander ses livres, car il y a beaucoup de place dans le film pour ses mots et on voit que c’est de la grande écriture.  »

Anne et Mickaël Gouin
Anne et Mickaël Gouin

Questions pour Mickaël Gouin Parlez-moi de votre personnage et ce qui vous plaisait dans l’idée de faire partie de ce film?« Le gros trip de faire ce film, c’est que mon personnage n’est pas basé sur une personne réelle en particulier. Ce n’était pas un ancien amoureux de Nelly, concret sur lequel je devais baser mon personnage. Anne a plutôt décidé de bâtir le personnage à partir de plusieurs relations amoureuses tumultueuses que Nelly a eues. Anne avait une bonne idée du genre de personnage et elle m’a beaucoup nourri avec ses indications. Elle voulait quelque chose de rock, un peu déjanté, quelqu’un toujours sur le party. Elle m’a envoyé des musiques, des images, des looks pour m’aider. Et j’ai développé le personnage à partir de tout ça. Ensuite, Anne a fait ce que je l’ai déjà vu faire sur le film les êtres chers. Au moment où on commence à tourner, elle me donne d’autres indications sur le personnage. Ce n’est pas contradictoire, mais plutôt complémentaire, et surtout différent de ce qu’elle m’avait donné comme infos. Ainsi, elle m’a fait adapter le personnage pour qu’il soit plus juvénile, jeune punk. J’ai modifié mon personnage qui était plus mature, plus posé, plus sensuel, pour le rendre plus aérien, plus mobile et donc, plus nuancé aussi. Donc, je crois bien qu’Anne au final sait exactement ce qu’elle veut et elle a eu bien raison de me donner toutes ces indications.»

Et jouer avec Mylène, c’était facile d’avoir cette chimie avec elle? Vous vous connaissiez avant? « Oui, Mylène et moi on a fait l’école National de théâtre ensemble. Elle était une année plus jeune que moi. Donc, en fait, on a été 3 ans ensemble sur 4,  à l’école. Et c’était important pour Anne que Mylène et moi on se crée une complicité rapidement parce qu’on avait des scènes assez complexes et intimes à jouer. Il fallait y croire. Et il fallait qu’on soit game d’embarquer dans ce projet. Donc, cela a beaucoup aidé du fait qu’on se connaissait bien avant. On a une belle chimie ensemble et on aime ça jouer ensemble. »

Vous ne participez qu’à une portion du film et vous avez de l’interaction avec une seule des personnalités de Nelly. Comment avez-vous trouvé le produit final lorsque vous avez vu le film? « C’est particulier, car même si j’ai participé juste à une portion du film, j’avais quand même lu le scénario au complet. Alors, je savais où ça s’en allait, l’histoire et tout. Mais quand même, au visionnement, j’ai été bien déstabilisé, mais de manière positive, par le film. C’est un genre de film qu’on ne voit pas assez souvent. J’ai trouvé ça très original, quand cela aurait pu être vraiment plate en fait, de raconter banalement la vie d’une artiste tumultueuse, insaisissable. Je trouve plutôt qu’Anne en a fait un objet artistique vraiment le fun. Et il n’y a pas d’autres manières de faire une biographie pour une artiste comme celle-là, aussi éclatée, aussi originale, aussi déstabilisante que Nelly. Je trouve qu’Anne a fait une réalisation à l’image de ce que cette artiste-là est. »

Quels sont vos autres projets en cours ? « Il y a des choses qui s’en viennent, mais que je ne peux pas vraiment parler pour l’instant. Mais je vais être au théâtre d’Aujourd’hui à Montréal dans une pièce qui s’appelle Toccate et fugue (du 11 avril au 6 mai 2017), qu’on risque de venir présenter éventuellement à Québec aussi. Il y a des projets de films qui s’en viennent, et j’écris aussi des séries télés… alors, on risque de me voir plus souvent très bientôt.»

Nelly prend l’affiche dès le 20 janvier 2017, partout au Québec!

FICHE ARTISTIQUE

Nelly Mylène Mackay

Isabelle Fortier 13 ans Mylia Corbeil-Gauvreau

François Mickaël Gouin

Suzanne Sylvie Drapeau

Peggy Catherine Brunet

 

FICHE TECHNIQUE

Réalisatrice et scénariste Anne Émond

Productrice Nicole Robert

Directrice photo Josée Deshaies

Direction artistique David Pelletier

Casting Nathalie Boutrie

Costumes Patricia McNeil

Montage Mathieu Bouchard-Malo

Son Claude LaHaye

Sylvain Brassard

Maquillage Djina Caron

Coiffure Martin Lapointe

Musique : Dear Criminals

Visitez le site officiel du film : nelly-lefilm.com.

http://www.dearcriminals.com/music

Crédit photos : Réjeanne Bouchard