Entrevue avec Louise Portal et Jacques Hébert pour le film l’érotisme et le vieil âge

Louise Portal et Jacques Hébert
Louise Portal et Jacques Hébert

Après le documentaire Le vieil âge et le rire (prix du public au Rendez-Vous du cinéma Québécois en 2012), Fernand Dansereau renoue avec le thème de la vieillesse avec le documentaire L’érotisme et le vieil âge, en salle le 10 février 2017.  Avec des témoignages et commentaires entre autres de Janette Bertrand, Louise Portal, Jacques Hébert, Jean Beaudin et plusieurs spécialistes en santé, médecine et psychologie, ce documentaire se penche sur un aspect de la vie des personnes âgées (la sexualité) rarement abordé au cinéma.

Résumé

Il règne dans nos sociétés un puissant tabou en ce qui concerne la sexualité des personnes âgées. Comme si l’intérêt pour la chose ne pouvait trouver justification que dans la jeunesse, l’âge de la procréation. Pourtant, l’attrait pour la sexualité ne disparaît pas avec l’âge. Ni les multiples pratiques qu’elle suscite! L’érotisme et le vieil âge, un film qui interroge profondément les conceptions courantes non seulement de la vieillesse, mais de l’expérience sexuelle elle-même, est un bouleversant témoignage sur l’amour et l’intimité qui lie les êtres humains.

Voici le lien pour mon appréciation du film l’Érostime et le vieil âge  :

 https://info-culture.biz/2017/02/09/erotisme_et_le_vieil_age/#.WJzoAtThDvY

Ensemble depuis 24 ans
Ensemble depuis 24 ans

Voici mon entrevue avec Louise Portal et son conjoint Jacques Hébert. Ils se sont connus au début de la quarantaine, et ils sont ensemble depuis 24 ans déjà.

Comment en êtes-vous arrivé à collaborer sur ce projet documentaire ? LP «J’avais d’abord accompagné le film précédent de Fernand Dansereau, le vieil âge et le rire, dans une mini-tournée, pour animer les rencontres après visionnement du film. Ensuite, Fernand m’a appelé très rapidement pour que je participe à son prochain film, avec mon conjoint Jacques. Il voulait qu’on incarne le couple tout habillé de blanc qui se démontre de l’affection et des caresses. Mais Jacques ne voulait pas, car il disait ne pas être un comédien et ne voulait se retrouver dans un lit à l’écran. Et moi, je ne me sentais pas à l’aise de le faire avec un comédien. Mais on était prêt à faire un témoignage de notre parcours comme couple dans la soixantaine, malgré que Jacques avait certaines réticences.» 

Pourquoi vous ne vouliez pas participer Jacques ? JH« Parce que j’étais traumatisé devant les caméras. Je perdais mes moyens. Et elle, Louise, est tellement bonne et habile que j’aurais eu l’impression de jouer au hockey avec Guy Lafleur.  J’étais sûr que j’aurais l’air poche. Mais finalement, j’ai décidé d’embarquer quand même. Je suis content d’y avoir participé, car j’adore le travail de Monsieur Dansereau.» 

 

Que représentez-vous dans ce documentaire ? LP «Dans ce documentaire, nous, on est le plus jeune couple, dans la soixantaine. Ensuite c’est le couple de Édith et Michel qui sont dans le début de leurs soixante-dix ans. Et on monte en âge par la suite. Je crois qu’il était important de témoigner que dans la soixantaine tu mets le pas sur le sentier de la vieillesse. Il faut l’accueillir et l’accepter. Ça peut être un moment de vie formidable. Mais si tu résistes à tout ce qui est en lien avec cet âge-là, alors tu manques l’épanouissement. Moi, ça fait longtemps que je me prépare. À 58 ans je me préparais déjà, à 63 ans je me disais être prête pour mes 65 ans et là, je marche vers mes soixante-dix ans et je me suis dit qu’il serait temps de revenir à ma couleur naturelle de cheveux. Vieillir c’est un processus et plus on l’accueille, plus cet âge qui avance devient lumineux. »

L'érotisme et le vieil âge à l'affiche dès le 10 février
L’érotisme et le vieil âge à l’affiche dès le 10 février

Vous avez participé à une partie du film seulement. Alors, lorsque vous avez vu le produit final, qu’en retenez-vous ? Comment avez-vous réagi ? JH « Dans le film, il y a un couple qui vit dans un CHSLD et c’est de toute beauté ce qu’ils vivent.  J’ai aimé voir ça, car cela me montre vers quoi je m’en vais. Je me suis vu dans ce monsieur, bon, en présence de sa femme. Ce film est vraiment inspirant. Il y a tellement de volets à l’érotisme, à l’intimité, à la tendresse, à la volupté. »

LP «Nous les femmes, on a besoin d’avoir un homme bon à nos côtés. J’appelle ça la délicatesse du cœur. Et ça, ça fait partie de l’érotisme. On s’entend que passée la cinquantaine, l’érotisme change. On n’est pas habillés en cuir avec le fouet, on n’est pas dans les fantasmes. On est dans la réalité de notre âge qui avance, dans nos limites. »

JH « C’était rassurant pour moi d’entendre des hommes plus âgés parler d’érection, de libido, la performance qui n’a plus besoin d’être là. La femme recherche beaucoup plus une qualité de présence que de performance. Il y a une dame colorée dans le documentaire qui dit : Enfin l’éloge de la lenteur!!»

LP «C’est là qu’on voit les grandes qualités de ce cinéaste, Fernand Dansereau. Il a 88 ans.  Il a tout un vécu, avec deux familles. Il a fait du cinéma toute sa vie. Il a vu partir plusieurs de ses compatriotes. Il a fondé l’INIS où il a travaillé jusqu’à il y a quelques mois. Que cet homme-là ait le courage de faire un film sur quelque chose qui le concerne, je trouve ça formidable. Et on doit le dire, le vieil âge n’est pas assez présent au cinéma et à la télé. Et pourtant, on s’en va tous là.» 

Dans le vox pop vous posez des questions aux gens dans la rue. Est-ce que les gens étaient gênés de vous répondre ? Ou même avez-vous essayé des refus ? LP «Non pas vraiment. C’était beaucoup des jeunes à qui j’ai parlé et ils aiment ça passer à la télé.  Mais, on le voit bien, ma question les déstabilisait. On voit juste quelques vox pop dans le film, mais dans la réalité, j’en ai fait pendant 2 heures. C’était très intéressant de voir ces jeunes entre 15 et 25 ans adresser le sujet de la sexualité du vieil âge. Ils étaient parfois gênés. Mais tout le monde était d’accord pour dire que lorsqu’ils voyaient leurs grands-parents avoir beaucoup d’affection l’un pour l’autre, ça les inspirait. Ils deviennent des exemples pour eux.»

Et vous, Jacques, de vous voir à l’écran pour la première fois, ça vous a fait quoi ? JH « La première fois qu’on se voit, on remarque tout ce qui dépasse. Je trouvais que je manquais de stabilité. Je jouais avec mes mains. Moi, je l’ai remarqué, mais le public ne voit pas ça, je le sais. Les autres fois, j’ai pu apprécier ce que j’ai fait. Je trouve que j’ai bien réussi à articuler ce que je voulais dire. »

LP «Il a de l’humour Jacques. Et sa spontanéité est une de ses belles qualités. Et cette qualité on la retrouve tout au long du film, avec les témoignages des autres personnes aussi qui ne sont pas des comédiens. Et ce film, bien qu’il y ait un moment plus émouvant vers la fin, avec le témoignage de Jean Beaudin, il y a beaucoup de moments joyeux, drôles et qui fait sourire. Ça donne une certaine légèreté au sujet abordé. »

Éditions Druide, le collectif :  Aimer encore et toujours
Éditions Druide, le collectif : Aimer encore et toujours

Avez-vous d’autres projets ensemble ou en solo que vous voulez me parler ? «On va revenir à Québec pour le Salon du livre de Québec en avril prochain. Je suis sur deux collectifs, dont l’un aux Éditions Druide Aimer encore et toujours (où Jacques participe également). On est 14 auteurs et nous avons adressé le sujet de l’amour dans une nouvelle. Et il y a beaucoup de ces nouvelles qui concernent le vieil âge.  Également, Jacques et moi sommes dans le début d’une tournée pour notre spectacle-conférence qui s’appelle Elle et lui. On s’en va au Saguenay. Aussi, on a des conférences en solo. Jacques en fait dans un milieu carcéral, et moi dans une résidence pour personnes âgées à Roberval. Ensuite on va au Salon du livre de Trois-Rivières. Et la semaine prochaine, je reviens à Québec pour présenter, dans le cadre de Rideau, un extrait d’une pièce de théâtre que j’ai jouée à Sherbrooke en début de saison, l’ile aux sabots. Je suis aussi à l’écriture d’un nouvel ouvrage à publier à l’automne. Et finalement, je viens de faire un film en anglais dont mon réalisateur est en montage présentement. Cela a été tourné en novembre dernier au lac St-Joseph, avec David Findly (jeune homme de Québec qui a étudié le cinéma à Vancouver). Ce long métrage, il l’a écrit pour moi et ça s’appelle Everything outside. Je joue avec un acteur de Toronto dans la trentaine qui s’appelle Ahmed Musliman. Dans le film, je joue le personnage d’une peintre qui est en remise en question de sa carrière. Et  lui, il est en pleine effervescence. C’est la rencontre de deux générations de créateurs. »

BANDE-ANNONCE de l’Érotisme et le vieil âge : http://bit.ly/2hMBm73

Le documentaire sera à l’affiche dès le 10 février.

Les spécialistes

Dre Cara Tannenbaum, professeure à la Faculté de médecine et à la Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal ;

Le docteur Gilles Trudel, Ph.D., psychologue et professeur titulaire du Département de psychologie de l’Université du Québec à Montréal, chercheur au Centre Universitaire en Santé Mentale de Montréal et professeur à l’Institut Santé et Société de l’UQÀM ;

Gilbert Leclerc, détenteur d’un doctorat en théologie et d’un doctorat en éducation des adultes, professeur retraité du Département de psychologie et du Centre de recherche sur le vieillissement de l’Université de Sherbrooke, enseignant au doctorat en gérontologie et à l’Université du Troisième Âge ;

Martine Lagacé, professeure et chercheure à l’Université d’Ottawa (Département de communication et École de psychologie) ;

Jean Lalonde, détenteur d’un Baccalauréat ès Arts et d’un Baccalauréat en éducation de l’Université du Manitoba ainsi que d’une licence en sciences sociales de l’Université catholique de Louvain en Belgique ;

Isabelle Wallach, professeure et chercheure en anthropologie à l’UQAM ;

Lise Gratton, du Centre de recherche sur le vieillissement et de l’Université du troisième âge à Sherbrooke.

Avec la participation de La maison des grands-parents de Sherbrooke, La cité des bâtisseurs Pointe-Saint-Charles etLe Manoir-de-Verdun, du Souper communautaire des aînés et retraités de la communauté gaie (ARC).

FICHE TECHNIQUE

Scénario et Réalisation FERNAND DANSEREAU

Recherche FERNAND DANSEREAU, LUCETTE LUPIEN

Direction de production SYLVIE LAPOINTE

Producteurs JACQUES W. LINA, MARIE-PIERRE CORRIVEAU, BRUNO DUBÉ, ROBERT MONTOUR

Direction photo JULIEN FONTAINE, ALEX MARGINEANU

Prise de son STÉPHANE BARSALOU

Montage DOMINIQUE SICOTTE

Conception sonore LUC MANDEVILLE

Musique FRANCINE BEAUDRY

Produit avec la collaboration de CANAL D

Interprètes:      JANETTE BERTRAND, LOUISE PORTAL, JACQUES HÉBERT ÉDITH FOURNIER, MICHEL CARBONNEAU et JEAN BEAUDIN

https://www.lerotismeetlevieilage.com/

http://louiseportal.com/conference4.htm

http://www.editionsdruide.com/livres/aimer-encore-et-toujours

Crédit photos : Réjeanne Bouchard