« Le jardin des Délices » de Marie Chouinard, en première montréalaise

Jérôme Bosch : Le jardin des Délices © Nicolas Ruel
Jérôme Bosch : Le jardin des Délices © Nicolas Ruel

Toujours pour débuter la vingtième saison de Danse Danse, le public montréalais a, pour trois soirs seulement, la chance de découvrir le ballet de Marie Chouinard sur le tableau énigmatique et fascinant de Jérôme Bosch : Le jardin des Délices.

Tout le monde a en tête ce triptyque en bois on ne peut plus singulier du peintre flamand du 16e siècle. Fermé, il représente notre planète dans des couleurs grises très légèrement bleutées. Ouvert, il éclate de ses couleurs sur trois panneaux très différents qui font encore couler beaucoup d’encre sur leurs significations. Le panneau central serait l’humanité avant le déluge, celui de droite (pour le spectateur) représenterait l’enfer, et celui de gauche l’union d’Eve et de Adam.

Le ballet imaginé par Marie Chouinard sur cette œuvre grandiose est lui aussi grandiose et divisé en trois parties. Quand le spectacle commence, le tableau est fermé et visible sur un immense écran qui couvre le fond de la scène. Puis on le voit s’ouvrir lentement et se concentrer sur sa partie centrale avec ses nombreuses arbouses qui colorent le tableau de rouges, ses centaines de personnages nus, hommes et femmes, tournant autour d’une vasque centrale, ses animaux fabuleux, sa végétation luxuriante et ses constructions invraisemblables. Au son du chant des oiseaux, de l’eau qui coule et de bruits d’animaux indéfinissables, les danseurs s’approchent doucement. Ils paraissent tout droit sortis de l’œuvre du peintre avec leurs gestes imités de leurs représentations. Deux médaillons en vidéo sur les côtés montrent certains détails de l’œuvre de Bosch qui sont reproduites exactement par les danseurs. Marie Chouinard nous fait ainsi découvrir des détails de la gestuelle précise que l’on aurait moins remarqué sans elle, fasciné que l’on peut être par la foule d’autres éléments picturaux. Toute la chorégraphie magnifiquement pensée découle de l’observation précise des personnages imaginés par le peintre. Toute la grâce et l’élégance de leur gestuelle est restituée et offre ainsi une nouvelle interprétation du panneau, selon laquelle les personnages seraient peut-être des danseurs…

Jérôme Bosch : Le jardin des Délices © Nicolas Ruel
Jérôme Bosch : Le jardin des Délices © Nicolas Ruel

Le deuxième panneau est comme dans le tableau, illustré par une chorégraphie bien différente et qui en restitue l’ambiance; l’atmosphère à la fois effrayantes et grotesque. Pendant qu’une sorte de chanteur se contorsionne et pousse des cris, des êtres affolés pénètrent sur la scène et l’envahissent de dizaines d’objets, machines extraordinaires, outils de torture et autres instruments de musique, comme pour dire que l’enfer est celui des objets. Dans la troisième partie du spectacle, Adam et Eve sont démultipliés autour d’une figure divine qui permet leurs rencontres dans un monde tout à fait apaisé et qui clôt le spectacle.

C’est pour commémorer le 500e anniversaire de la mort du peintre flamand, en 2016, que Marie Chouinard a créé cette œuvre en son honneur. En se basant avec une grande précision sur les attitudes des personnages du tableau, elle a créé une chorégraphie qui restitue fidèlement ses impressions et permet d’en saisir les détails avec une grande acuité.

Jérôme Bosch, Le jardin des Délices, les 28, 29 et 30 septembre au théâtre Maisonneuve, à Montréal

Compagnie Marie Chouinard

Danse Danse

Interprètes : Charles Cardin-Bourbeau, Marilyne Cyr, Sébastien Cossette-Masse, Catherine Dagenais-Savard, Valeria Galluccio, Motrya Kozbur, Béatrice Larrivée, Morgane Le Tiec, Scott McCabe, Sacha Ouellette-Deguire, Carol Prieur, Clémentine Schindler.

Informations : http://www.dansedanse.ca/fr/compagnie-marie-chouinard-jerome-bosch-le-jardin-des-delices