« Nina, c’est autre chose », une chronique du quotidien joyeuse et rafraichissante au théâtre La Chapelle à Montréal

Nina, c’est autre chose © Julien Benhamou
Nina, c’est autre chose © Julien Benhamou

Deux frères dans la quarantaine, deux vieux garçons qui partagent le même appartement depuis la mort de leur mère quelques mois auparavant. L’action se passe en 1976 dans une banlieue de la région parisienne. Sébastien, l’ainé, est ouvrier, syndicaliste, militant communiste, sur le point d’obtenir une petite promotion. Une femme a traversé sa vie il y a longtemps et se rappelle à lui à date fixe. Charles est coiffeur, moins raisonnable que son frère, et il a une collègue et amoureuse qui se prénomme Nina.

Dans leur traintrain quotidien, Sébastien et Charles semblent heureux, avec leurs rituels et les petits soucis d’une vie bien rangée, sans surprise.

La surprise, c’est Nina qui va la provoquer en débarquant chez eux, d’abord pour diner, puis pour s’installer. Une femme à la maison, cela fait penser à un foyer plus propre et mieux rangé, mieux organisé. Mais c’est le contraire qui se passe. Nina est légère, joyeuse, insouciante. Sa vie, elle la conduit là où la mène sa jouissance. Le changement est si brutal que l’ancien équilibre chancelle. Sébastien veut partir mais renonce sur les instances de Nina, puis les deux hommes décident de demander à la jeune femme de quitter le logement. Mais ils n’en ont pas le courage et quand c’est elle qui part, le vide qu’elle laisse est difficile voire impossible à combler.

La pièce écrite par Michel Vinaver en 1976 est très joliment mise en scène par Florent Siaud. Le sympathique décor, l’appartement des deux frères où se passe toute l’action subit lui aussi des transformations majeures avec l’arrivée de Nina. Des vidéos de films de famille, des projections sur les murs, la belle musique live au bandonéon et au piano et les tangos que les acteurs interprètent seuls ou en couple, mais aussi les incessants changements de costumes qui donnent la sensation de l’écoulement du temps, l’apparition presque magique d’une magnifique baignoire et le bain sensuel et réconfortant que les trois y prennent, sans parler de quelques acrobaties sympathiques et des sorties du cadre de la scène vers les spectateurs ou les musiciens, tout donne à cette pièce un ton charmant, rafraichissant, joyeux et aussi émouvant. Les acteurs sont remarquables. Les trois sont beaux et jouent avec la naïveté et le naturel qui s’impose pour cette pièce très bien construite, qui reconstitue à la fois leurs discussions anodines pour permettre de bien comprendre la situation des trois protagonistes, mais aussi la très grande sensibilité de chacun, avec une fin qui tout en restant sur un point d’interrogation quant à l’intrigue met le spectateur de très bonne humeur.

Nina, c’est autre chose © Julien Benhamou
Nina, c’est autre chose © Julien Benhamou

Nina c’est autre chose, raconte une tranche de vie ordinaire où l’arrivée d’un tiers rend le tout extraordinaire. La forme théâtro-musicale de la compagnie Les songes turbulents s’adapte parfaitement à ce récit du quotidien, d’autant qu’elle est portée par une troupe impeccable, de très beaux éclairages et plein de petites surprises extrêmement agréables.

Nina, c’est autre chose, du 1er au 5 novembre 2017 au théâtre La Chapelle à Montréal

Texte Michel Vinaver

Mise en scène Florent Siaud

Avec Renaud Lacelle-Bourdon, Eric Bernier, Eugénie Anselin, Chloé Pfeiffer et Lysandre Donoso (tous deux du duo Doble Filo, France)

Scénographie Philippe Miesch

Costumes Jean-Daniel Vuillermoz

Éclairages Cédric Delorme-Bouchard

Vidéo David B. Ricard

Chorégraphie Marilyn Daoust

Coiffures et maquillages Catherine Saint-Sever

Assistance à la mise en scène Valéry Drapeau, Pierre-Damien Traverso

Coproducteurs Comédie de Picardie + Compagnie Les songes turbulents + Les Théâtres de la Ville de Luxembourg + LA SERRE_arts vivants

Informations : http://lachapelle.org/fr/calendrier/nina-cest-autre-chose