« Filles en liberté » au théâtre La licorne à Montréal

Filles en liberté © Claude Gagnon
Filles en liberté © Claude Gagnon

En quoi consiste la liberté ? Qu’est-ce qu’un être libre ? Pourquoi la liberté est-elle perçue comme la valeur la plus haute ?

Dans la pièce très comique, Filles en liberté de Catherine Léger, trois jeunes femmes semblent exercer à fond leur liberté. Elles sont libres de leurs corps, il va sans dire, libres dans leur manière de trouver des ressources et de réussir, libres de paroles à l’égard des autres qui les entourent.

Mélie est au centre de cette histoire où gravitent aussi Cynthia et Chris, ses deux copines, Nick son chum et Pascal l’ami de celui-ci. Nick et Pascal, plus âgés que les filles, sont tous deux profs de cegep. Ils jouent au hockey, défendent le nationalisme québécois, semblent inséparables. Nick est un bel homme à qui tout réussit. Pascal, pas très doué au hockey et abandonné par sa copine, est plutôt son souffre-douleur. Parmi les hommes, il y a aussi le concierge de l’immeuble où vit Mélie, un narcotique anonyme qui se contente de petites jobs et de petites conquêtes amoureuses.

Dans cette société québécoise décrite par Filles en liberté, les hommes jouent clairement le second rôle et paraissent devenus des objets parmi d’autres dont disposent les femmes « libérées » et libres…

Mélie est jeune (22 ans), belle. Elle était l’élève de Nick au cégep et a arrêté son cours pour pouvoir sortir avec lui. Ils se disent amoureux l’un de l’autre et Mélie désire entrer entièrement dans la vie de Nick, rencontrer ses parents, ses amis, et élever leurs enfants. Mais pour Nick, une « vie normale », c’est une femme qui songe d’abord à sa carrière en faisant des études ou en travaillant, et qui, ensuite, crée une famille en ayant des enfants. Mélie entend bien le message et se lance dans les affaires…

Filles en liberté © Claude Gagnon
Filles en liberté © Claude Gagnon

Parmi cette petite bande d’amis qui se retrouve soit chez Mélie (dans sa belle cuisine mais où manquent tous les électros) soit chez Chris qui vient d’acquérir un condo tout neuf, on aimerait trouver une trace de l’amour ou même de l’amitié. Autant Mélie que Cynthia ou Chris ne pensent qu’à elles seules et exercent cette liberté de la femme enfin conquise, sans aucun égard aux autres. Chacune ne pense qu’à elle et, certaines d’avoir enfin conquit cette précieuse liberté de penser, de parler et de vivre comme elles l’entendent, elles l’exercent en retombant dans les clichés ou en tout cas pour n’obtenir que de l’avoir personnel et sans créativité ni intérêt pour autrui. Ainsi, entre la psychologie évolutionniste pour la porno éco-responsable de l’une, l’abortion doping pour la réussite aux examens de l’autre, ou encore les importantes indemnités obtenues lors d’un accident douteux de la troisième, chacune – et peut-être chacun (les hommes ont finalement la même attitude mais avec moins d’agressivité) – ne recherche que le chemin le plus court pour tirer son épingle du jeu de la vie et en oubliant qu’on n’y est pas tout seul.

La pièce est menée tambour battant. Très bien jouée, très drôle, on y rit beaucoup des répliques et des coups de théâtre. Mais à bien y réfléchir, si la pièce est vraiment le reflet de la société québécoise actuelle pour la génération décrite, le rire a quelques raisons de tourner au vinaigre. Il serait temps de redéfinir ce que l’on nomme liberté et d’y mettre un peu plus de créativité et un peu moins de narcissisme.

Filles en liberté, du 7 novembre au 2 décembre 2017 au théâtre La licorne à Montréal

Production Théâtre PÀP en codiffusion avec La Manufacture

Texte Catherine Léger

Mise en scène Patrice Dubois

Avec Hugues Frenette, Laetitia Isambert, Etienne Pilon, Clara Prévost, Christian E. Roy, Catherine St-Laurent

Assistance à la mise en scène Charlie Cohen

Décor Odile Gamache

Costumes Julie Breton

Éclairages Julie Basse

Musique Andréa Marsolais-Roy

Maquillage Sylvie Rolland-Provost

Informations : https://theatrelalicorne.com/lic_pieces/filles-en-liberte/