« L’homme éléphant », au théâtre du Rideau Vert à Montréal

L’homme éléphant  © Jean-François Hamelin
L’homme éléphant © Jean-François Hamelin

L’histoire est connue et véridique. Elle est authentifiée par la biographie que consacra Frederick Treves à Joseph Merrick, ce citoyen britannique que l’on surnomma l’homme éléphant à la fin du XIXe siècle. L’histoire a aussi été popularisée par le film que lui consacra David Lynch en 1981. Auparavant, en 1979, elle a fait l’objet d’une pièce de théâtre souvent représentée sur scène depuis et signée de l’Américain Bernard Pomerance. C’est cette pièce traduite et mise en scène par Jean Leclerc qui est proposé au Théâtre du Rideau Vert.

L’homme éléphant  © Jean-François Hamelin
L’homme éléphant © Jean-François Hamelin

Si David Lynch avait opté pour le noir et blanc de manière à donner peut-être un aspect documentaire à son œuvre, au Rideau Vert, ce sont des décors minimalistes mais élégants, et des acteurs en beaux costumes d’époque qui nous sont proposés pour cette œuvre.

Joseph Merrick a été abandonné par sa famille et n’a d’autre choix que de se faire exhiber comme phénomène de foire, d’être montré comme le monstre qu’il est, sur une scène de théâtre ambulant dont le directeur est sans scrupule. Sa vie est misérable, il est battu, volé, maltraité, jusqu’au jour où il rencontre un jeune chirurgien brillant, le docteur John Treves, qui décide d’étudier ses malformations monstrueuses et finalement de le prendre en charge.

C’est cette rencontre qui va permettre à Joseph Merrick de retrouver sa dignité d’être humain en dépit de la répulsion qu’il suscite chez tous ceux qui sont amenés à l’observer, y compris le personnel de l’hôpital de Londres qui se croit exercé à ce genre d’épreuve. C’est que Joseph Merrick est un être vraiment effrayant dans son corps, alors qu’il est attachant dans son âme quand on prend le temps de s’y arrêter.

La pièce est sans surprise et donne peut-être trop de place aux personnages secondaires qui tournent autour du héros.

Ce qui est intéressant, en revanche, c’est la manière d’avoir choisi de représenter Joseph Merrick et ses difformités. Si des planches d’époque le montrent comme il était au cours d’une conférence donnée par le médecin, le rôle magnifiquement tenu par Benoît McGinnis le fait apparaître en homme éléphant sans aucun grimage, grâce à son seul talent de comédien qui lui fait adopter des postures totalement tordues et asymétriques, et une respiration sifflante et audible du public lorsqu’il parle. C’est un parti pris très intéressant car on finit par voir le monstre alors qu’on a seulement un homme qui déforme son corps devant les yeux. Puis les choses s’inversent peu à peu. Et comme ceux qui ont dû être effrayés à l’époque par les ravages d’une maladie dont on ignorait tout alors, les spectateurs ne voient plus que l’homme avec son intelligence et sa sensibilité propre.

L’homme éléphant, du 30 janvier au 3 mars 2018, au théâtre du Rideau Vert à Montréal

Une pièce de Bernard Pomerance

Traduction et mise en scène Jean Leclerc

Avec Benoît McGinnis, Annick Bergeron, David Boutin, Sylvie Drapeau, Chantal Dumoulin, Germain Houde, Roger La Rue, Hubert Proulx

Informations : http://www.rideauvert.qc.ca/piece/lhomme-elephant/