Nabucco : Un opéra grandiose pour le plaisir des amoureux de Verdi

C’était soir de première, samedi le 11 mai dernier, alors que l’Opéra de Québec nous présentait ce spectacle à grand déploiement qu’est Nabucco de Verdi.

Cette oeuvre magistrale, autant musicale que politique, a vu le jour en 1842 à la Scala de Milan. Ce troisième opéra composé par Verdi lui a permis de se hisser au sommet et d’atteindre la célébrité.

Quand on évoque Nabucco, il nous vient tout de suite en tête un des choeurs de musique des plus connu du répertoire: « Va pensiero ».  Cet hymne célèbre chanté par le choeur des  esclaves évoque la quête de liberté, la délivrance du peuple Hébreux face au roi de Babylone, Nabuchodonosor.

À l’époque où Verdi a composé cet oeuvre, le peuple Italien était sous l’emprise de l’Autriche. Fortement interpellé par la quête de liberté des Hébreux dominés par les Babyloniens, le public Italien en a fait un lien très fort en lien avec sa propre oppression face à l’Autriche. Lien tellement fort, que « Va pensiero » est devenu un hymne patriotique. Un véritable symbole d’indépendance pour le peuple Italien.

L’histoire se déroule en l’an 584 av. J.-C où Nabucco, roi de Babylone, triomphe face au peuple Hébreux. Zaccaria, le grand prêtre des Hébreux, implore son peuple de garder espoir car il tient en otage la fille de Nabucco, Fenena. Il menace de tuer Fenena si aucune action n’est entreprise afin de mettre fin au conflit entre les deux peuples.

Seul espoir de liberté pour le peuple Hébreux, Fenena est confiée à Ismaël, le neveu de  Zaccaria, afin que ce dernier puisse la surveiller. Mais revirement de situation: Fenena et Ismaël sont follement amoureux l’un de l’autre…

La situation se corse lorsque les deux amants, sur le point de fuir, sont surpris par la « supposée » fille de Nabucco, Abigaïlle. Cette dernière est aussi amoureuse d’Ismaël. « Supposée » fille, car elle apprends qu’en réalité elle n’est qu’une esclave et non la fille légitime de Nabucco. En échange de la libération du peuple Hébreux, elle demande
à Ismaël de la choisir. Devant le refus de ce dernier, il n’en faut pas plus pour qu’éclate colère et désir de vengeance envers sa soeur Fenena, sa rivale, et son père Nabucco.
Son but ultime : détrôner son père.

Elle profitera d’un moment de folie durant lequel Nabucco se proclame « Dieu et Roi » et qu’il sera puni par les Dieux pour ce blasphème.  La colère des Dieux fait tomber la foudre sur Nabucco, il perd sa couronne et Abigaïlle s’en empare et se proclame « Reine de Babylone ».

Nabucco, sous les menaces d’Abigaïlle, est forcé de signer le document de mise à la mort du peuple Hébreux. Réalisant trop tard que le même sort sera réservé à sa fille Fenena, il rappelle à Abigaïlle qu’elle n’est qu’une esclave. Elle s’empare du document attestant de ses origines et le détruit devant lui.
C’en est fait de l’avenir du peuple Hébreux et de Fenena. Personne ne pourra les sauver.

Et c’est ainsi que le choeur des esclaves entament le très bel hymne « Va Pensiero ». Le moment fort de la soirée, une musique qui touche droit au coeur.

Interpréter le rôle de Nabucco demande une grande versatilité de jeu. Les émotions s’entremèlent, passant du ton autoritaire du Roi à l’émotion à fleur de peau d’un père face au destin tragique de sa fille. Celui qui incarne Nabucco, le baryton James Westman sait rendre au personnage tout son aspect dramatique grâce à sa riche voix. Il incarne avec brio un Nabucco qui se transforme radicalement. L’être initialement assoiffé de pouvoir devient au fil des tableaux un être déconcerté et impuissant face à son adversaire Abigaïlle, invoquant même pitié et pardon.

Dans le rôle d’Abigaïlle, la soprano Michele Capalbo qui détient une feuille de route impressionnante. Interprète renommée de Verdi et Puccini, elle se produit depuis plus de 20 ans sur des scènes réputées.

Une mention spéciale au ténor Montréalais Steeve Michaud pour son interprétation d’Ismaël. Il se démarque avec sa voix puissante et juste. À ses côtés, la mezzo-soprano Geneviève Lévesque (Ferena), reconnue pour sa voix puissante et chaleureuse complète bien le duo.

Parmi la distribution deux jeunes talents locaux à surveiller: le ténor Jonathan Gagné  (Abdallo) et la soprano Jessica Latouche (Anna).

La mise en scène est particulièrement très réussie au moment où le choeur y va de son « Va pensiero ». Emprisonnés derrière un mur barbelés, les esclaves chantent leur quête de liberté. Le tout sous la surveillance étroite de soldats armés.

Et bravo au choeur de l’opéra. Fort de sa présence, il a séduit littéralement le public.

Présentée par l’Opéra de Québec les 11, 14, 16 et 18 mai 2019 à la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec

Sous la direction de maestro Giuseppe Grazioli, Nabucco est présenté en version originale Italienne avec des surtitres français.

Nabucco, roi de Babylone : James Westman (baryton)
Ismaël, neveu du roi des Hébreux, amoureux de Fenena : Steeve Michaud (ténor)
Zaccaria, Grand prêtre de Jérusalem : Giovanni Battista Parodi (basse)
Abigaïlle, esclave, présumée fille de Nabucco : Michele Capalbo (soprano)
Fenena, fille de Nabucco : Geneviève Lévesque (mezzo-soprano)
Le Grand prêtre de Belos : Alain Coulombe (basse)
Abdallo, vieil officier au service de Nabucco : Jonathan Gagné (ténor)
Anna, sœur de Zaccaria : Jessica Latouche (soprano)

Orchestre symphonique de Québec

Choeur de l’Opéra de Québec

Chef d’orchestre : Giuseppe Grazioli

Mise en scène et décors : Michael Cavanagh

Costumes: Judith Fortin

Éclairages: Serge Gingras

Maquillage: Élène Pearson

Crédit photos: Louise Leblanc