Entrevues pour le film Nuit #1

Artisans du film

J’ai vu, sur invitation de presse, le film Nuit #1, d’Anne Émond avec Catherine de Léan et Dimitri Storoge. Le film prend l’affiche le 16 décembre prochain et mon appréciation du film se trouvera dans la section cinéma dès cette date.

Entrevues : C’est mardi le 6 décembre dernier au cinéma Le Clap que les artisans du film Nuit #1, ont bien gentiment répondu aux questions des médias après la projection du film. Il y avait sur place la productrice Nancy Grant, la scénariste et réalisatrice Anne Émond ainsi que la comédienne Catherine de Léan.

Synopsis

Clara (Catherine de Léan), 27 ans et Nikolai (Dimitri Storoge), 31 ans, se rencontrent dans un rave et rentrent chez Nikolai au milieu de la nuit. Ils font l’amour. Puis, plutôt que de repartir chacun de leur côté, ils parlent. La nuit prend une tournure inattendue. Nuit #1 est un film sur la jeunesse moderne qui cherche le courage de vivre.

Catherine de Léan, Nancy Grant et Anne Émond

Questions pour Anne Émond : Ce n’est sûrement pas évident pour un acteur de jouer dans ce film, quand on sait que la première scène de près de 15 minutes en est une de sexe torride entre deux êtres. Est-ce que vous aviez déjà vos acteurs en tête quand vous avez écrit le scénario?

Anne : « Dans les premières versions d’écriture, je n’avais pas d’idée précise. Mais Catherine et moi, on a fait un court-métrage ensemble, précédemment, et à partir de ce moment, j’espérais de tout cœur que ce soit Catherine de Léan qui fasse le rôle. J’ai donc approché Catherine avec ce scénario. Tandis que Dimitri Storoge, c’est un acteur parisien d’origine russe qu’on a connu ici à cause de Dédé à travers les brumes. On n’a pas fait d’audition, je suis allée le voir à Paris et on l’a ramené ici pour faire des tests avec Catherine. Et Catherine avait le droit d’accepter ou de refuser tout acteur pour jouer avec elle. Et cela a fonctionné entre les deux. Il y avait la chimie que l’on recherchait. » 

Question : Pourquoi aller chercher un acteur français?

Anne «En fait il est français, mais d’origine Russe. Il avait physiquement un petit côté de l’Europe de l’Est que je voulais. Le regard creux et il devait parler bien le français, car les monologues sont tellement littéraires. Donc, je ne voulais pas nécessairement un français, mais quelqu’un qui venait d’ailleurs. Car il fallait qu’il soit un étranger qui soit à la recherche de sa terre natale, qu’il soit déraciné, un peu comme Clara se sent elle-même dans son propre pays. » 

Question : Est-ce que la scène de sexualité a été tournée au tout début du tournage ou si vous leur avez laissé le temps de s’apprivoiser un peu?

Anne: « Cela s’est fait dès le début, les deux premières nuits de tournage. On voulait garder cette fraîcheur de maladresse d’une première rencontre physique. Et comme Catherine et Dimitri ne se connaissaient presque pas, c’était idéal de procéder ainsi. Également, comme c’est très angoissant pour les comédiens ce genre de scènes, on voulait les mettre rapidement derrière nous, pour pouvoir passer à autre chose. La scène de la sexualité du début du film fait 14 pages. Il n’y avait pas de surprise sur le plateau pour les comédiens. Tout était écrit, précis, geste par geste, action par action. Ce n’est pas filmé de manière pornographique. »

Question : Bien qu’il y a cette scène de baise en début de film, tout cela n’est qu’un prétexte pour une réflexion sur les rapports humains et la jeunesse? Ce scénario est né de quoi en fait?

Anne « En fait, ce n’était pas un désir de faire un film qui m’a amené à ce scénario. C’était un désir de se confier, de démontrer ce qu’on vivait. Quand j’ai écrit ce scénario, j’avais 26-27 ans. Et je me suis réveillée un matin pour me rendre compte que moi et mes amis, on avait entre 25 et 35 ans. On n’avait pas de job, pas d’argent, pas de relation qui durait plus de 2 mois. Tout ce qui est dans le film est vrai, sans être pour autant à 100 % autobiographique. Ce sont des histoires que j’ai prises d’un peu partout. J’avais l’impression que ce n’était pas seulement moi et mes amis qui vivions cela… On est étouffé par notre liberté et on n’est pas les seuls à se sentir comme cela. Mais je ne pense pas que tout jeune québécois prend de l’ectasy et ne va pas nécessairement se reconnaître à ce niveau-là, mais peut-être dans l’angoisse et cette espèce de désespoir dans notre futur. J’ai l’impression que cela peut rejoindre beaucoup de monde.»

Question : Dans le film, il n’y a pas de musique, à part dans la toute première scène et dans le générique de la fin, où il y a deux chansons. Comment s’est fait ce choix justement?

Anne « Cela s’est décidée au montage. À la base, je savais que dans le rave au début, ce ne serait pas une musique électronique. Je savais que ce serait un contre point. Je voulais que la scène dise quelque chose d’autre que ce que l’on voit. Le choix du français s’est imposé un moment donné. Je trouvais cela cohérent de donner cela à ces deux personnages-là, qui n’ont vraiment pas grand-chose dans la vie, en terme de racine, de passé, de futur, ils n’ont rien que le français. C’est pour cela aussi que les monologues sont aussi littéraires. Ce n’est pas un film où l’on sacre. Je voulais donc leur donner de beaux mots. Et en plus, j’aime bien que ce soit des chansons en français reprises par des femmes, (Les amours perdues de Gainsbourg et dis quand reviendras-tu ? de Barbara) de manière plus moderne. Et que ce soit Martha Wainwright qui chante à la fin, avec son accent anglais et qui reprend cela un peu tout croche, j’aime cela.»

Catherine de Léan

Questions pour Catherine de Léan : Pourquoi aviez-vous envie de faire ce film, écrit par une femme et où il y a une scène de sexe aussi explicite ?

[wpaudio url= »https://info-culture.biz/wp-content/uploads/audio/catherine.mp3″ text= »Cliquez pour écouter l’ audio de Catherine de Léan  » dl= »0″]
 

Question : La scène de baise était écrite sur 14 pages. Est-ce que cela s’apprend aussi bien qu’un texte ?

Catherine : « Tout le film est très détaillé. Même, une des dernières scènes du film, cela décrit comment mon personnage pleure, avec de longs temps… Anne est très méticuleuse. Alors, la scène initiale, je l’ai lu plusieurs fois et je l’ai apprise comme une partition. De plus, on ne voulait pas vraiment répéter avec l’autre acteur, parce que c’est un one-night et qu’on sait comment baiser. Alors, je ne vois pas pourquoi on s’humilierait à répéter une baise dans un local. C’est un peu absurde. Donc, on a tous deux suivi la partition et on savait où est-ce qu’on allait. Tout était écrit en détail. C’était bien d’avoir cette partition-là.»

Questions pour Nancy Grant : Le film a été présenté dans plusieurs festivals. Est-ce qu’il y a eu aussi des ventes à l’étranger?

Nancy : « Nuit #1 vient d’être présenté à l’événement Cinéma du Québec à Paris. Le dernier Festival international du film de Toronto lui a décerné une mention spéciale dans la catégorie Meilleur premier film canadien. Il a ensuite été présenté au Festival international du film de Pusan (Corée) et au Festival international du film de Vancouver, où il a été couronné Meilleur film canadien. Il a poursuivi son parcours festivalier au Québec au Festival du Nouveau Cinéma lors duquel il a remporté le Prix de l’Innovation Daniel Langlois. Nuit #1 a aussi reçu le Grand Prix du Jury, meilleur film, au Festival de Tübingen (Allemagne) et a fait partie de la sélection officielle des festivals d’Amiens (France) et de Rotterdam. Les droits mondiaux  du film ont été vendus à la société française WIDE MANAGEMENT. Le film a d’ailleurs été vendu aux États-Unis, en Russie, en Espagne, en Corée du Sud et maintenant le Japon, je crois.» 

Question : Et, à cause de la censure, le film est classé comment ici et ailleurs?

Nancy « Ici, il est classé 16 ans et plus (érotique). En Corée c’est 18 ans et plus.»

 Ce film sera à l’affiche dès le 16 décembre dans les salles du Québec.

Nuit 1

Un film de Anne Émond
avec : Catherine De Léan, Dimitri Storoge

Image: Mathieu Laverdière
Direction artistique: Éric Barbeau
Montage: Mathieu Bouchard-Malo
Production: Nancy Grant

Prod.: Metafilms
Dist.: K-Films Amérique

 Crédit photos : Lise Breton