Artéfact

Artéfact.

Un roman qu’il faut lire deux fois plutôt qu’une. Et peut-être encore plus. Non seulement pour le fond mais aussi pour la forme.

Carl Leblanc réussit un tour de force avec son roman Artéfact. Il est capable de décrire une violence comme celle que les déportés juifs et autres ont connue dans les camps de concentration allemands durant la deuxième grande guerre mondiale en un récit rempli de douceur et de tendresse. Le coeur d’Auschwitz, l’artéfact dont il est question dans le roman, en est le symbole.

Carl Leblanc avait une excellente base historique pour écrire ce roman car il a réalisé un documentaire sur le sujet.

La question qui demeure à la fin de la lecture est : est-ce que les douleurs subies hier peuvent excuser les douleurs d’aujourd’hui et cautionner celles de demain ? Au moment où une autre guerre se termine entre Israéliens et Palestiniens la question se pose avec encore plus d’acuité. Comme l’exemple d’Elie Wiesel, ancien prisonnier d’un de ces camps et Prix Nobel de la paix le suggère, il ne sert à rien de cultiver une culture de la vengeance. Mais un devoir de mémoire s’impose. À cet effet les Juifs font un travail immense même si la parole des survivants «  durerait le temps que s’éteignent les voix usées par le devoir de mémoire ; après, il y aurait les enfants des survivants et, plus tard, les petits-enfants ; dans ce relais des générations, la mémoire se tendrait et s’amincirait peu à peu jusqu’à devenir un fil ténu, même pour la culture juive, si rigoureusement mémorielle ».

Un roman à lire absolument.

 Un homme, un objet, un passé, douze femmes. Peut-être treize. On ne sait pas. L’artéfact, un carnet fabriqué à Auschwitz dans des conditions impossibles, deviendra vite pour François Bélanger, reporter pour un grand quotidien montréalais, cette invitation au voyage à laquelle, un jour ou l’autre, nous succombons tous. Vers où? Dans ce cas-ci, vers ce passé déjà lointain de la Seconde Guerre mondiale. Cette « autre rive du temps » sera toutefois difficilement atteinte, car Bélanger est un intrus dans cette histoire de femmes. C’est d’ailleurs une autre affaire qui l’y mène : le cas de Krylenko, présumé criminel de guerre réfugié depuis de nombreuses années au Canada sous un faux nom, et qui s’apprête à être extradé. Croisement d’une sale affaire et d’une belle histoire donc, car l’artéfact en question est un carnet de vœux confectionné au cœur des ténèbres, dans le camp d’Auschwitz en décembre 1944, par un groupe de jeunes femmes qui voulaient souligner le vingtième anniversaire de l’une d’entre elles. D’où vient ce carnet? Est-il authentique? Comment est-il arrivé là, dans la vitrine du Musée de l’Holocauste de Montréal? Qui l’a ramené de l’enfer? Qui sont ces femmes? Et cette histoire, finalement, est-ce vraiment une belle histoire?

Carl Leblanc

 

Carl Leblanc a été journaliste et documentariste avant de signer un premier livre en 2006, Le personnage secondaire, paru chez Boréal. Il a réalisé Le coeur d’Auschwitz, un documentaire nommé aux prix Jutra 2011, diffusé récemment à plusieurs reprises sur Radio-Canada et présenté en début d’année au MOMA à New York. Le film raconte « l’histoire vraie » de l’artéfact dont il est question dans ce roman.

 

Nombre de pages : 155

Prix suggéré : 18 $

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