Opéra de Montréal – Dead Man Walking

Joseph De Rocher et Sister Helen Prejean (Étienne Dupuis et Allyson McHardy) (photo : Yves Renaud)
Joseph De Rocher et Sister Helen Prejean (Étienne Dupuis et Allyson McHardy) (photo : Yves Renaud)
Joseph De Rocher et Sister Helen Prejean (Étienne Dupuis et Allyson McHardy) (photo : Yves Renaud)
Joseph De Rocher et Sister Helen Prejean (Étienne Dupuis et Allyson McHardy) (photo : Yves Renaud)

On se souviendra du très beau film Dead Man Walking (La dernière marche) sorti en 1995 mettant en vedette Susan Sarandon et Sean Penn tiré du livre de Soeur Helen Prejean dans lequel elle raconte sa dure expérience de l’accompagnement vers la peine de mort d’un prisonnier qui résiste à se repentir. Par ce refus de reconnaître sa culpabilité et d’accepter sa peine, le condamné ne peut connaître la paix d’esprit et, par la même occasion, enlève la possibilité aux familles des adolescents que son frère et lui ont assassinés de faire un deuil serein. C’est sûr ce même livre que s’est basé le compositeur américain Jake Heggie pour créer cet opéra touchant et résolument contemporain.

Après une scène d’une rare violence en ouverture, celle du crime commis par les deux frères De Rocher, s’enchaîne la suite contrastante : dans une ambiance des plus joyeuses, Ally McHardy (Soeur Helen Prejean) apparaît sur une scène bondée d’enfants tapant des mains et nous ravit immédiatement de son énergique voix de mezzo-soprano. Les premières mélodies de l’Orchestre Métropolitain semblent tout droit sorties d’une comédie musicale des années 50 et pour peu on se mettrait à taper des mains en choeur avec les jeunes acteurs qui rythment la scène. Difficile de s’imaginer une introduction plus enthousiasmante pour un opéra, McHardy est sublime et la soprano Chantale Nurse, dans le rôle de Soeur Rose qui tentera de dissuader sa consoeur d’aller plus avant dans sa rencontre avec le criminel, n’est pas en reste en donnant la réplique. Qui a dit que les bonnes soeurs n’ont pas d’humour?

Soeur Helen convaincra-t-elle De Rocher à se libérer? (photo : Yves Renaud)
Soeur Helen convaincra-t-elle De Rocher à se libérer? (photo : Yves Renaud)

Car dans Dead Man Walking, de l’humour, il y en a. Soeur Helen est décidément un brin arrogante, têtue et surtout convaincue qu’une âme perdue, si monstrueuse soit-elle, mérite de la compassion. Et ce prisonnier, Joseph De Rocher (le baryton Étienne Dupuis), est sûrement celui qui en a le plus besoin. Leur rencontre sera difficile mais ni l’un ni l’autre ne peut se résoudre à mettre fin à cette relation qui se tisse. Pendant que Soeur Helen tente de faire se confesser De Rocher, celle-ci se voit témoin de l’émouvant plaidoyer de la mère du condamné, prise entre culpabilité et désir de voir son fils sauvé, pour ensuite être prise à partie par les familles anéanties par la mort horrible de leur enfant par un déchirant appel à la vengeance qu’est la peine de mort. Sa sensibilité aux douleurs des uns et des autres la fera douter mais sa Foi en l’amour du Christ pour tous ses enfants l’emportera. Elle sauvera De Rocher de son enfer intérieur, peu importe ce qui lui en coûte.

Jake Heggin a bien vu en faisant de son opéra une pièce contemporaine. Jouée en anglais et surtitrée en français, Dead Man Walking touche un large auditoire et attirera de nouveaux adeptes à l’opéra. Les scènes de groupes sont littéralement enlevantes et les jeux de décor avec les grillages de la prison sont réussis mais trop peu nombreux. Les solos dans des décors dénudés sont répétitifs et, avec une durée de spectacle de 2h45, auraient gagné à être limités. Autre bémol pour le mélange des genres vocaux qui sont parfois jazzés, parfois à légère tendance rock qui détonnent avec la musique qui, quant à elle, est superbement interprétée par l’Orchestre métropolitain. Ces bémols, par contre, ne sont pas des raisons pour se priver de cette production qui s’éloigne de la rigidité de l’opéra classique.

 

Jake Heggie, compositeur (photo : courtoisie)
Jake Heggie, compositeur (photo : courtoisie)

Jake Heggie a composé les opéras Moby-Dick, Dead Man Walking, Three Decembers, The End of the Affair, To Hell and Back et écrit les pièces For a Look or a Touch et At the Statue of Venus. Son catalogue comprend aussi quelque 200 mélodies, des pièces pour orchestre, chœur et de la musique de chambre.

Dead Man Walking
Par l’Opéra de Montréal
Place des arts  
9, 12, 14 et 16 mars 2013
Prix (frais inclus, taxes en sus) : de 51$ à 127$

Billetterie Place des Arts 

Distribution
Sister Helen Prejean : Allyson McHardy
Joseph De Rocher : Étienne Dupuis
Mrs. Patrick de Rocher : Kimberly Barber
Sister Rose : Chantale Nurse
George Benton : Alain Coulombe
Owen Hart : Thomas Goerz
Kitty Hart : Mariateresa Magisano
Father Grenville : John Mac Master
Jade Boucher : Mia Lennox-Williams
Howard Boucher : Kurt Lehmann
Sister Catherin : Aidan Ferguson
Sister Lilianne : Rachèle Tremblay
Policier à moto : Philip Kalmanovitch
1er gardien de prison : Patrick Mallette
2e gardien de prison : Jeremy Bowes
Frère de Joseph : Olivier Bergeron
Frère de Joseph, le plus vieux : Aaron Sheppard
Prisonniers : Gaétan Sauvageau, Geoffroy Salvas, Clermont Tremblay, Benoît Leblanc et Normand Richard
Une mère : Catherine Lavoie
Mrs. Charlton : Valérie Bélanger
Un enfant / Huissier / Chef : Wayne Marshall

Metteur en scène : Alain Gauthier
Décors : Harry Frehner et Scott Reid
Costumes : Scott Reid
Éclairages : Éric W. Champoux
Chœur de l’Opéra de Montréal / Petits Chanteurs du Mont-Royal / Voix Boréales
Orchestre Métropolitain