Entrevue avec Géraldine, invitée au MEG Festival

Géraldine
Géraldine

Dans le cadre du MEG Festival qui s’était déroulé du  25 Juillet au 3 Aout 2013, Géraldine jouait avec les Narine Les Pen en première partie de Sexy Sushi le 27 Juillet . De ses débuts avec Navet Confit et avec leur premier hit « Lance le Sapin à Géraldine », après avoir été nominée au GAMIQ puis avoir obtenu une bourse création et recherche du CALQ, l’artiste nous partage son parcours et ses futurs projets.

 

Info-culture : Peux-tu nous faire une rapide présentation ? Qu’est-ce que Géraldine ? Comment ça s’est créé ? Depuis quand ?
Géraldine : Ça a commencé en 2005. J’habitais avec Navet Confit, et c’est un peu par accident qu’on a commencé à faire de la musique ensemble, pour rire. Puis on a ouvert un MySpace avec la chanson « Lance le sapin à Géraldine« , qui est notre premier hit ! Hahaha. On a eu beaucoup plus de réactions que ce à quoi on s’attendait, puis après ça on a été invité à faire un premier concert au quai des brumes, et tout a déboulé de manières très naturelle ; les gens nous aimaient puis voulaient nous entendre.

 

C’est donc grâce à MySpace que vous avez été connus puis appelés à faire des concerts, sans avoir fait d’album avant ?
Oui, voilà. L’album est sorti en 2010, et donc on a fait des shows pendant presque 5 ans mais de manière très disparate, même l’album a été créé à peu près sur une période de 5 ans. Il a été enregistré dans 5 studios différents, et les musiciens ont beaucoup changé pour les shows. C’est vraiment un projet pour le plaisir, ça arrive comme ça arrive, on fait avec ce qu’on a, et on joue selon les invitations qu’on reçoit …

 

Donc le projet a été lancé avec la chanson Lance le sapin à Géraldine : d’où vient l’inspiration pour cette chanson ? Tu as tout un délire sur les sapins ?
Ouais, c’est vraiment con ! En fait c’est sorti d’un jeu, on était dans un party de puis on avait fait une crèche au plafond, il y avait un coussin sur une chaise et on m’a lancé ça sur le front, puis j’criais « lancez-moi quelque chose ! » et là les gars me lançaient littéralement le sapin dans ma face pis, je sais pas, c’est partit de d’ça et on a cherché des heures à me garocher le sapin. On a trouvé ça super drôle, puis après je ne sais plus comment ça a commencé mais c’est parti de là ! Hahaha !
Ce qu’il y a de bien avec Navet, c’est qu’il n’y a pas besoin d’être défoncé ou quoi pour trouver quelque chose. Quand on habitait ensemble avant, le matin on trouvait beaucoup de trucs, on avait une dynamique très propre à nous deux. On partageait notre quotidienneté ensemble, et c’était une dynamique de création très fun. Puis après c’est sûr que ça a évolué, on n’habitait plus ensemble, et en 5ans, entre nos 20 ans et nos 25 ans, les choses changent beaucoup.
Après, on a eu la chance d’avoir une bourse de recherche et création du CALQ (Conseil des Arts et Lettres du Québec). C’est déjà intéressant de voir que c’est vraiment artistique ; puis on a essayé de rationaliser et mettre de l’ordre dans notre démarche – car oui on a eu une démarche finalement ! Fait que ça a été pour nous un exercice intéressant d’essayer de prendre le temps de créer différemment.

 

Géraldine
Géraldine

Et de fait, est-ce que dans ta démarche tu as une manière de composer, ou est-ce que c’est tout au feeling et à l’improvisation ?
C’est pas mal au feeling. C’est drôle car, au début c’était surtout ça, avec les party de jeux, avec des idées qui venaient comme ça ; des fois c’était des chansons que Navet avait déjà faites avant avec de la musique, des fois c’est moi qui arrivais avec une mélodie … On écrits nos textes à deux aussi, et c’est rare de pouvoir faire ça avec quelqu’un. Donc c’était assez différent d’un morceau à l’autre, puis vers la fin, on s’est mis à faire ce qu’on appelait du « terrorisme » musical.

 

Du terrorisme musical ? Comme des happenings ?
C’est vrai qu’on a un côté happenings dans nos concerts, on s’adapte un peu à l’endroit où on est, c’est assez déjanté … disons qu’on se laisse porter pas mal en fait, on fait ce qu’on a envie de faire.

 

Mais qu’entends-tu vraiment par terrorisme musical ?
Dans le fond, c’est qu’on s’approprie des codes de la pop, et on en fait quelque chose d’ambigu, hahaha ! Par exemple, un des morceaux les plus clairs est Bien du me fait ça, où on a écrit un texte vraiment mauvais, et on chante à l’envers avec des arrangements vraiment très pop. À la limite, on ne se rend pas compte que je chante à l’envers. Elle est en pièce cachée sur l’album [Sold-Out Capitalism], et avec I’m Singin in English, ce sont les 2 pôles extrêmes de Géraldine. Dans I’m singin in English je fais juste qu’hurler dans un ventilateur, en disant comme quoi ma vie est pathétique, et je chante en Anglais, hahaha. Elle, c’est la toune la plus expérimentale, la plus fuckée, l’autre c’est la plus pop ; ce sont vraiment les deux qui représentent les pôles extrêmes de Géraldine.

 

Donc là tu parles de pop. Avez-vous des influences musicales particulières, des groupes phares ?
C’est le genre d’affaire que j’aime pas trop rentrer parce que j’aime mieux n’être pas trop consciente de mes influences (rires). Et je déteste les étiquettes … C’est une musique qui est très éclectique et dure à clarifier, mais quand on a eu une nomination en 2010 ou 2011 aux GAMIQ (Gala Alternatif de la Musique Indépendante du Québec) pour l’album pop de l’année, j’étais très contente ! Je trouvais ça le fun d’être en catégorie pop. Ça reste des chansons étranges, mais la plupart des chansons sont composées comme de la pop : c’est quand même catchy, ça reste dans la tête. Enfin pas pour toutes non plus …

 

Au niveau des textes, est-ce que tu as des thèmes précis dont tu as envie de parler, as-tu un message que tu veux véhiculer ?
Avec ce qu’on a fait jusqu’à présent, c’est vraiment issu de toute ma vingtaine, qui surtout une période de désillusion à bien des égards, beaucoup sur l’amour justement (rires), ainsi que dans le capitalisme et dans toute la société de fous dans laquelle on vit. C’est pas mal « fuck l’amour, fuck la guerre ». J’aimais beaucoup jouer avec ce slogan hippie, et en faire une variation de ce slogan-là des années 70s. Mais au-delà du sexe, ça parle de comment on a des rapports humains désincarnés, comment on est perdu, justement dans la 20aine, où on commence à être assez obsédés par la sexualité.  C’est d’ailleurs peut-être le genre de trucs que je comprends plus aujourd’hui ! Puis ça fait partie de la pop, la sexualité (rires !).
Après ça, on a aussi fait un morceau en rapport à la crise étudiante de l’an passé, qui s’appelle Charest dans un coffre de char. On a mis un peu la main à la pâte à ce niveau-là. Ça vient comme ça vient finalement.

 

Là tu as 2 albums, avec le dernier qui est plus des reprises des chansons du premier, mais version low …
Le deuxième on ne peut pas vraiment appeler ça un album, mais plutôt un mini-album. C’est plus une version familiale, quelque chose qui est encore plus pour le plaisir, qu’on n’a vraiment pas diffusé. Ça s’appelle Baiser avec un miroir. L’idée, c’est qu’à un moment on avait plusieurs invitations avec Navet pour faire des formules réduites de nos concerts, entre autres pour une pièce de théâtre qui s’appelle Ville morte de Sarah Berthiaume, ainsi que pour La Nuit Blanche.  On s’est dit qu’on allait essayer de monter quelque chose en duo. On a réussi à monter un truc minimal, on a pris les beat d’un clavier casio intégré et de la basse, et on a noyé ça dans des effets. Pour moi c’est une formule quand même amusante et intéressante, puis ça donne un autre ton aux chansons. Fait qu’on a fait ça en spectacles, puis on a enregistré ça chez nous avec un mini-4 tracks et un ami à la bonne franquette, et voilà.

 

Et maintenant est-tu en train de composer, as-tu un autre album est-il en cours ?
Oui, et pour moi c’est vraiment une nouvelles démarche, dans le sens où avec Navet, c’est très … Il a une idée, puis il est vraiment multi-instrumentiste donc il enregistre ça, il fait tout lui-même, et donc c’était vraiment hyper facile. Et la je suis dans un trip où j’ai envie de voir qu’est-ce que je peux faire par moi-même. J’essaie des trucs au Ukulélé, à la basse, je demande à des collaborateurs aussi. Mais pour l’instant, j’essaie moi-même les compositions, surtout que maintenant j’habite dans un vrai appartement ! J’ai un local de musique, j’ai une démarche, j’essaie de structurer et de trouver des nouvelles façons de composer, d’écrire les textes avant et essayer de mettre de la musique dessus … Mais finalement ça ne reste pas très carré ! Hahaha ! C’est vraiment plus sérieux que ce que c’était avant, je le sens, mais c’est vraiment pas clair encore … Ça s’appelle fourrer, manger, dormir, courir (rires).
C’est aussi un album qui découle d’une grosse penne d’amour. Donc ce sera aussi quelque chose de plus intime, de plus cru. Avec Géraldine, jusqu’à maintenant ce qu’on a fait il y a beaucoup de degré d’interprétation, même si c’est de choses étaient complètement sincères, il y avait beaucoup d’ironie et de second degré. Là j’aimerais faire quelque chose de plus épuré, plus cru, plus intime.

 

Et qui sont vraiment les narines Le Pen ?
A chaque concert, on avait un band est assez changeant, et on aimait bien faire des jeux de mots avec des artistes connus, comme les Cagoules Duguay, Leopards Cohen, China Twain, Les Verge Gainsbourd, Pratiques Watson, Velveeta Franklin … Il y en a eu toute une coupe. Et là comme on ouvrait pour Sexy Sushi, on avait envie d’en trouver un Français. Celui-ci était assez facile et on le trouvais ben drôle, donc on l’a pris (rires). Donc avec eux il y a Navet Confit, il y a eu aussi Carl-Éric Coudon qui a écrit Je ne suis pas ta secrétaire. Lors des derniers shows, avant qu’on prenne une pose, c’était avec cette formation-là qu’on jouait, et j’ai trouvé ça très efficace.

 

Merci beaucoup pour cet entretien !
Merci à vous !

 

Pour en savoir plus sur Géraldine : http://www.cagoule.ca/
Son bandcamp : http://geraldine.bandcamp.com/
Pour voir ce que fait navet Confit : https://www.youtube.com/watch?v=sRs7TRKknWU et http://navetconfit.bandcamp.com/

 

Entretiens réalisé le 26 Juillet 2013
Crédit photos : Jonathan Le Borgne
Article du concert au MEG : sur ce lien