(Première partie) de Philippe Ducros
Après le retentissant succès public et critique de L’affiche, les productions Hôtel-Motel reviennent à Espace Libre du 1er au 19 avril 2014 pour présenter leur nouvelle création Eden Motel…
Un homme noyé dans une dépendance pharmacologique multiple abandonne tout et s’enfuit sur les routes à la recherche d’un sens, d’une raison, de quelque chose. Il échoue sur la grève d’un motel d’autoroute. Chambre 1. Commence un séjour à mi-chemin entre la rédemption et la réhabilitation. Il rencontre peu à peu les naufragés qui occupent les chambres du motel autant de naufragés des différentes pathologies de nos sociétés occidentales en plein petroleum tremens. Ensemble, ils regardent la mer, déchiffrent le cri des mouettes et font face à leur vide.
EDEN MOTEL est une adaptation théâtrale du roman-fleuve éponyme écrit par Philippe Ducros qui sera édité l’an prochain à L’instant même. Cette adaptation sera créée en deux parties. La première, présentée du 1er au 19 avril 2014 à Espace Libre, sera un spectacle en soi, autonome. La deuxième partie verra le jour en 2015, dans un théâtre près de chez vous ! La démesure est au coeur même du projet, dans son fond comme dans sa forme. Une partition ample et variée, des personnages hauts en couleur, de la musique en direct, pour une forme plurielle et (d)étonnante qui rappelle l’obésité occidentale, la boulimie nord-américaine.
Les US consomment 40 % des médicaments qui se vendent dans le monde. L’Afrique au complet n’en consomme que 1 %.
LA VAGUE DE FOND
Certains disent que nous avons le meilleur niveau de vie, mais un des plus hauts taux de suicide. Pourquoi? Notre mode de vie nous tue, pourtant d’autres ailleurs, sont prêts à tuer pour le vivre. Pourquoi?
_Le bonheur déchu, marchandé et médicamenté en Amérique
Êtes-vous heureux? Qu’en est-il du bonheur en nos démocraties qui en font saliver plus d’un? Au Québec, la première cause de mortalité chez les hommes de 20 à 40 ans, est le suicide. Il ne faut que 15 minutes au CLSC pour se faire prescrire des antidépresseurs. Et les profits des compagnies pharmaceutiques battent des records olympiques… Qu’est-ce qui, en notre mode de vie, nous tue ? Quelle est la cause de ce malaise? Parce que le malaise est réel malgré l’abondance. Et élever les rambardes du pont Jacques-Cartier ne le réglera pas. L’Eden Motel est un microcosme peuplé de marginaux et de dépendants aux prises avec différents versants de ce malaise, avec une intensité elle-même dopée par certains stéroïdes modernes. Ils cherchent à recréer un monde meilleur, un éden d’autoroute, un motel de passes où tout se peut parce que tout est permis.
_Les démocraties olympiques et l’amour anorexique
Quand tout en nos démocraties marchandes nous pousse à la performance, à la croissance et au succès, accepter la réalité, ses bourrelets et toute sa banalité peut être un combat perpétuel. Et l’amour dans ce magma peut prendre peu à peu la forme d’un concept auquel on croit ou pas, un concept qui s’anorexie face à la puissance siliconée de la pornographie. La sexualité est elle-même subordonnée au capitalisme, devient consommation, performance, marchandise… Par sa quête constante, son ultra-accessibilité et son immense diversité, le sexe tend à devenir performatif, aérodynamique. Tout comme le bonheur d’ailleurs. Dois-je moi aussi baiser comme un marathonien contorsionniste et boulimique, au même titre que je me dois d’être soit heureux ou looser?
Nos projets des dernières années se sont consacrés aux réalités de l’autre côté du spectre économique. Eden Motel, c’est le retour en Amérique, et par ce retour, nous tentons un dialogue entre les deux extrémités de notre monde globalisé. À quel point notre malaise et nos pathologies de sociétés sont-ils responsables de la précarité des zones de conflits à l’autre bout du monde?
« Les mouettes: Et tout le reste de l’Amérique suit. Les comprimés sont en spécial. Cette semaine, le Effexor est plus en demande que le Paxil. Le Prozac est définitivement out. Les enfants ont des vitamines et des relaxants dans leurs Alpha-bits, les femmes à la maison ont des prescriptions pour supporter la télévision en pleine journée. Tout ça en vente libre sur l’autoroute électronique, tout le monde suit la ligne pointillée dans la même direction. Et les compagnies pharmaceutiques ont pas besoin de mood-stabilizer, leur chiffre d’affaires est assez puissant. Qu’est-ce qui se passe chez vous les humains ? Les crabes des neiges sont pas suffisants pour équilibrer la sérotonine de vos cerveaux obèses et défectueux ? »
Avec : FRANÇOIS BERNIER, LARISSA CORRIVEAU, GUILLAUME CYR, SÉBASTIEN DODGE, MICHEL MONGEAU, MARIE-LAURENCE MOREAU, DOMINIQUE QUESNEL, SÉBASTIEN RENÉ, SASHA SAMAR.
Texte et mise en scène PHILIPPE DUCROS
Assistance à la mise en scène : ÉMILIE MARTEL
Régie : CHARLOTTE MÉNARD
Scénographie : MAX-OTTO FAUTEUX
Costumes : ROMAIN FABRE
Éclairages : THOMAS GODEFROID
Musique : LUDOVIC BONNIER
Vidéaste : JÉRÔME DELAPIERRE
Direction de production : MARIE-HÉLÈNE DUFORT
Direction technique : CAROLINE TURCOT
Dramaturgie : SARA FAUTEUX
Chorégraphie : LINE NAULT
UNE PRODUCTION D’HÔTEL-MOTEL
1945, rue Fullum, Montréal
BILLETTERIE (514) 521-4191
EN CODIFFUSION AVEC ESPACE LIBRE
EDEN MOTEL DU 1ER AU 19 AVRIL 2014 à 20H
Sauf le jeudi 3 avril : discussion, après la représentation de 19h
Et le vendredi 4 avril : entretien thématique, après la représentation de 19h
Las Vegas, États-Unis, © Philippe Ducros 2008
