Alain Chartier : peindre le parc La Fontaine avec les mains

Alain Chartier
Alain Chartier

« Je ne cherche pas, je trouve », affirmait Picasso. L’été passé, le peintre Alain Chartier est descendu dans son jardin, le parc La Fontaine au pied de son atelier, pour « aller voir s’il y [avait] quelque chose » à y trouver. Lui qui s’était fait la main sur les Floralies du parc Jean-Drapeau dans les années quatre-vingt a promené son chevalet à travers l’un de deux poumons verts du Plateau, jusqu’à l’automne pour revenir cette année à sa série de quinze toiles, et la terminer.

« Qu’est-ce que je vais chercher dans le paysage? » C’est ce questionnement qui a poussé Alain, l’a fait avancer dans le parc jusqu’à se placer devant des vues, des vécus et s’installer. Tenter de saisir Lafontaine et son esprit, toujours selon le même modus operandi. Après avoir cadré sa vision, le peintre commence par trouver son horizon, et trace son premier trait. Il peut alors sketcher. « C’est toujours du dessin » avant la mise en couleur au pastel (de préférence des Sennelier), dont le peintre dit avoir appris les rudiments auprès d’un « monsieur », un maître alors qu’il avait une vingtaine d’années. Alain peint la lumière avec les mains, presque sans médiation, pose ses couleurs pures et claires même lorsqu’elles interprètent l’ombre du parc et ses recoins, un peu à la façon du paysagiste Marc-Aurèle Fortin, une source d’inspiration.

« Qu’est ce qui est là? Comment je le vis? C’est quoi la vision que je veux donner de ça? » Alain élimine volontairement des éléments de détail non indispensables à l’ambiance générale, comme le mobilier urbain, et va même parfois jusqu’à se libérer des ombrages en vue de partir plus loin dans sa créativité. Ses toiles ne sont pas des reproductions du réel, mais des impressions, et le résultat de l’art et du travail pour les restituer. En ce sens, chaque œuvre est un autoportrait, qui reflète autant un climat extérieur qu’intérieur. Il faut juste au peintre contrôler son trait pour maintenir sa cohérence d’une séance à l’autre, puisque « même pour un plan figé, tout est changé le lendemain. » Tout est apothéose de l’instant et déclin, et Lafontaine ne se laisse entrevoir que sous ce délicat rapport de force et de fragilité. L’œil et la main s’allient pour se saisir d’atmosphères fugitives et déjà passées, même si Alain assure peindre au présent.

« C’est de la méditation » : prendre le temps de capter l’énergie presque musicale qui circule dans le végétal et les gens qui restent sur la toile ou ne font que passer. Après, la transe et la transpiration. Il faut à peu près une semaine à Alain pour finaliser une oeuvre, qu’il laisse reposer pour la reprendre puis la figer une fois satisfait. À la fin, dans son atelier, s’empilent quinze moments de ce parc en constante transformation qui ne se laisse pas figer, dont l’esprit ne se laisse approcher qu’entre lumières et obscurités.

À l’origine de son projet, il y avait cette idée qu’il a toujours d’accrocher quelques-unes des ses toiles sur les murs du service des soins palliatifs de l’hôpital Notre-Dame, en face du parc afin d’offrir aux patients une fenêtre sur le printemps, même quand l’hiver rend Lafontaine froid et blanc. Prendre le beau et le donner, c’est le but de ce diplômé des Arts plastiques de l’UQÀM et membre de la Société de Pastel de l’Est du Canada qui songe à transmettre à nouveau son « pourquoi pas l’art » aux enfants. « Et quand je serai plus là, il restera peut-être de l’anonyme qui parlera. »

Pour prendre rendez-vous avec Alain Chartier dans son atelier :
514 525 3219
alain.j.chartier@gmail.com

Crédits photographiques : Augustin Charpentier