Au programme de l’OSM pour ce début du mois de novembre, ce sont trois œuvres du milieu du XXe siècle qui ont été sélectionnées, dont une qui met l’alto à l’honneur. Relativement rares sont les compositeurs ayant écrit des concertos pour alto et orchestre. Le britannique William Walton est de ceux-là. Et c’est à l’incroyable altiste Antoine Tamestit qu’il revient d’en être l’interprète.
Antoine Tamestit ne se contente pas de faire vibrer les quatre cordes de son instrument en produisant, chez les spectateurs, des émotions à lui donner la chair de poule, il danse véritablement avec son instrument avec lequel il fait corps.
Le concerto pour alto qu’achève de composer William Walton à l’âge de seulement 27 ans en 1929, est encore empreint de romantisme mais aussi de musique plus moderne. La mélancolie est à l’œuvre, avec des moments de ressaisissement presque joyeux. L’alto d’Antoine Tamestit semble entrer en conversation avec le monde qui l’entoure, un peu comme s’il racontait son histoire personnelle à la vie, à la nature et à lui-même.
Entouré de l’orchestre symphonique de Montréal sous la direction d’Edward Gardner, son jeu débute par de la douceur. On croirait qu’il cherche à émouvoir en sa faveur les éléments de son environnement représentés par les instruments de l’orchestre, mais la mélancolie le gagne. Il a alors des accents plus nerveux, presque révoltés et on croirait qu’il se rebiffe en entant dans l’action pour se soumettre ensuite à l’harmonie du monde ou réagir de nouveau par rapport ou contre lui. Le spectateur imagine en l’écoutant tous les états psychologiques par lesquels il parait passer pour lutter contre son état de tristesse, le tout avec virtuosité et une extrême beauté.
Avant ce magnifique concerto, c’est la superbe Sinfonia da Requiem, op.20 de Benjamin Britten qui est proposée par l’orchestre de l’OSM. Cette œuvre forte et tourmentée, dramatique et pleine d’action aborde le thème du souvenir et de la mort, mais aussi de l’espoir. Composée en 1940, au début de la Seconde Guerre mondiale, alors que Britten n’avait que 26 ans, cette commande du gouvernement japonais alors allié de l’Allemagne nazie fut refusée à cause du titre qui faisait référence au christianisme et non à la fondation de l’empire japonais.
Après l’entracte, les Danses symphoniques, op. 45, de Rachmaninov ont achevé ce très beau programme. Le grand compositeur russe est en fin de carrière lorsqu’il s’attelle à cette création, au moment même où Britten rencontre le succès avec sa Sinfonia da Requiem. Les trois mouvements de ces danses symphoniques naviguent elles aussi entre la mort dont il pressent peut-être l’arrivée prochaine et une exubérance sans motif face à la vie et à l’existence humaine.
Dans la splendide salle de la Maison Symphonique de Montréal, face à ces artistes talentueux, inutile de dire que tous les sens sont en éveil pour ces trois œuvres dirigées par Edward Gardner. Antoine Tamestit est déjà venu se produire à Montréal par le passé. C’est une chance de pouvoir profiter de si grands artistes et il ne faut pas manquer leur passage sur notre scène.
Edward Gardner et les Danses symphoniques de Rachmaninov, les 9 et 10 novembre 2019 à la Maison Symphonique de Montréal
Orchestre symphonique de Montréal
Britten, Sinfonia da requiem, op. 20
Walton, Concerto pour alto
Rachmaninov, Danses symphoniques, op. 45
Edward Gardner, chef d’orchestre
Antoine Tamestit, alto
Information https://www.osm.ca/fr/concerts/edward-gardner-et-les-danses-symphoniques-de-rachmaninov/
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