La demeure présente Émily Dickinson

La Demeure présente Émily Dickinson
Larissa Corriveau

Le duo composé d’Oleg Kisseliov et de Larissa Corriveau se fait le visiteur intime de la poète anticonformiste Emily Dickinson dans un solo de théâtre poétique inédit.

La poésie flirte peu avec le théâtre, comme si l’intériorité de l’une pouvait difficilement s’allier à la nature publique de l’autre. Pour le metteur en scène Oleg Kisseliov et l’actrice Larissa Corriveau, les deux arts font pourtant bon ménage dans la pièce qu’ils présenteront autour de la poète américaine

C’est Emily, celle qui a traversé le gouffre entre les vivants et les morts. Il y avait longtemps que sa voix n’avait pas résonnée. Au coeur de cette camera obscura, la voilà qui revient.

Apparaîtront devant elle ce qu’elle fut jadis: à l’aube de ses jours terrestres, aux prises avec les doutes et les tourments du génie mais aussi au crépuscule de ces mêmes jours, sereine devant l’attente de la mort.

Emily Dickinson, c’est le drame exquis de quelqu’un qui se sait immortel avant même que la mort l’aie mis à l’épreuve.

Larissa Corriveau

QUI EST EMILY DICKINSON ? Une âme en incandescence

De la citoyenne Emily Dickinson, il y a peu à dire. Elle est née le 10 décembre 1830 à Amherst, Massachussetts, y a vécu toute sa vie et y est morte le 15 mai 1886, à 56 ans. Quant à ce que fut son apparence physique, une seule image d’elle est connue : un daguerréotype montrant une jeune femme de 17 ans au visage  indéchiffrable à force d’impassibilité.

L’OEUVRE D’EMILY DICKINSON

Ceci est ma lettre au monde qui jamais ne m’a écrit

Écrite à cette époque où la modernité commençait à saper de son dynamisme la société traditionnelle américaine, l’oeuvre d’Emily Dickinson est le témoignage à vif d’une conscience se découvrant libre dans un monde encore soumis à des règles morales rigides.

Près d’un siècle a passé depuis le décès de Dickinson. Le monde dans lequel elle a vécu et créé son oeuvre contenait en germe celui dans lequel nous vivons présentement. Dickinson a senti au plus profondd’elle-même que quelque chose d’important mourrait dans la société des on époque, mais aussi que quelque chose d’important affleurait à la surface des moindres choses. Qui entend la poésie de Dickinson ne peut éviter d’avoir parfois l’impression de plonger dans une hallucination

Comment transmettre l’oeuvre visionnaire de cette artiste atypique et faire exploser, sous forme théâtrale, toute la charge émotive e physique qui se dissimule dans ses mots ?

Tout d’abord, une actrice d’âge différent endosseront le même personnage afin de faire vivre Emily dans un cadre intemporel et multidimensionnel. Au niveau de l’action scénique du spectacle, les envolées musicales et improvisées que l’on retrouve dans le jazz pourraient ici servir d’exemple: entre le début et la fin d’une phrase musicale, le soliste crée un rythme et une mélodie impromptue, sans jamais se concentrer sur le résultat de cette phrase. Par l’improvisation, il fait naître un air nouveau au coeur d’une pièce déjà existante. C’est cette même virtuosité et liberté que nous cherchons à matérialiser sur scène. Il en résulte une esthétique expressionniste où l’espace-temps théâtral devient une matière malléable. Sa propre réalité, sous un angle qui est à l’image de son oeuvre, c’est-à-dire irrationnelle, intemporelle et libre.

LA DEMEURE

La poésie interroge le mythe. Elle est l’ombre de son essence.

Walter F. Otto, Essais sur le mythe. La Demeure a été fondé par Larissa Corriveau pour permettre la transmission d’oeuvres poétiques de répertoire et inédite. Elle accueille la poésie comme le langage incorruptible qui fait face au mythe et l’interroge. La Demeure s’établit là où elle trouve une parole vivante : dans la langue écrite, théâtrale ou cinématographique.

L’accident s’appelle Larissa Corriveau, une jeune actrice croisée lors d’un de ses ateliers. « C’était un match parfait entre Larissa, sa nature, son talent, et mon idée de Dickinson », explique dans un anglais cassé d’un fort accent russe celui qui a émigré au Canada en 1991. « Ce spectacle traduit les raisons à l’origine de la poésie de Dickinson, la naissance de l’impulsion créatrice. Dickinson n’avait rien contre la société, ni contre les règles de la poésie. C’est là qu’a commencé son drame personnel, familial et social, mais aussi cosmique, le drame de l’être humain et de l’univers. Sommes-nous seuls ou pas? »

Avec les voix de Sarah Desjeunes, Sharon James, Maxime Laurin, Gaétan Nadeau et Sophie Côté à la régie.

www.lademeure.org

crédit photos: Zed Touati