Combats d’écorchés au Théâtre Prospero

Carl Béchard
Carl Béchard

Combat raconte des petites gens. Leur déclassement dans la société, leur quotidien désœuvré et leurs rêves prisonniers d’un prolétariat d’hier à la réalité toujours d’actualité.
Combat raconte des parts d’humains qui mettent à table leurs batailles de ratés, sans se plaindre et sans bavarder.
Ces combats, ce sont :

Une mère, qui termine sa vie à trimer avec une médaille de travail en prime de retraitée.
Une femme, qui repasse les plis de son mariage triste et froissé pour le malheur et pour le pire, humiliée.
Un frère, bâtard non voulu sans travail et désabusé, qui reste, chips écrasée, en n’attendant plus rien arriver.
Une sœur, adoptée élue partie réussir dans plus de beauté, qui revient pour payer sa dette envers sa révolution ouvrière embourgeoisée.
Une famille, qui se retrouve un grand soir au cœur d’un triangle social délimité par une gare d’arrivée, un abattoir et une prison avec parloir.

Mais tout peut arriver, même ici, tout peut se rallumer dans ce milieu au soleil assombri par la misère silencieuse et brimée.

La fille relâche son fou affairé en offrant un couteau au creux du ventre d’un inconnu reconnu croisé.
Le fils trouve très vite un sens à sa vie en se dénonçant, en endossant l’évanouissement de sa sœur adorée.
La bru cesse de se laisser piétiner en rendant justice à son mari après sa pause déjeuner.
La mère, hors-scène, écorchée, contemple son troupeau combattre dans le sang des bêtes égorgées.

Carl Béchard, Isabelle Leclerc
Carl Béchard, Isabelle Leclerc

Dans quel état seront les combattants lorsque retentira la sonnerie qui annonce l’au revoir au parloir de la vie ?
C’est la question à laquelle s’attelle Odette Guimond, assistée par Emilie Coulombe, en mettant en scène une tragédie grecque ancrée dans un paysage désindustrialisé.

Accompagnés par la prestation du musicien Yannick Parent, qui multiplie les instruments pour rythmer leurs répliques, Odette Guimond, Isabelle Leclerc, Carl Béchard et Danny Carbonneau livrent une prestation rude, peu lyrique, collant mot pour mot à un (con)texte universel (d)écrit en français par Gilles Granouillet.

Combat s’inscrit dans le cycle Gilles Granouillet entamé par le Réverbère Théâtre en 2009 avec La maman du petit soldat et qui se terminera en 2014 avec Un endroit où aller.
Le Réverbère Théâtre, qui est né l’univers de Gilles Granouillet, offre avec Combat des temps de confrontation tantôt prenant aux tripes tantôt pleins de tendresse, entrecoupés de temps pendant lesquels ce thriller sur les travailleuses, travailleurs se prend à son propre jeu pour manquer de souffle et respirer la pesanteur.

Odette Guimont, Isabelle Leclerc
Odette Guimont, Isabelle Leclerc

La scène, elle, est épurée, laissant l’espace à la pièce pour pleinement s’exprimer sur l’immense intimité du Théâtre Prospero.

Du 30 avril au 18 mai.

Dramaturgie : Florent Siaud
Direction de production et régie : Sandy Caron
Scénographie et costumes : Elen Ewing et Geneviève Lizotte
Conception des éclairages et direction technique : David-Alexandre Chabot
Conception visuelle : Danny Carbonneau
Conception graphique : BungaloBungalo
© Bernard Dubois