Entrevue avec Mesparrow

Mesparrow
Mesparrow

Le 1er Aout, pendant le festival MEG, Mesparrow jouait au Divan Orange. Travaillant surtout sa voix, elle nous livre une musique originale et particulière, basée sur des boucles de chant. Voici le récit d’une artiste française qui commence à faire beaucoup parler d’elle.

Info-culture : Salut, peux-tu faire une présentation rapide, et nous dire quand et comment le projet de Mesparrow a commencé ?
Mesparrow : J’ai commencé en 2008, à Londres. J’étais parti à Londres après avoir fait les Beaux-Arts en France. J’ai vécu 2 ans là-bas, et c’est vraiment là où j’ai commencé à composer, à jouer des morceaux en concerts.


Mais tu as eu d’autres petits projets avant Mesparrow je crois ?

Avant j’avais d’autres groupes, plus jeunes au collège, fin de lycée etc. Puis j’ai un peu arrêté, je faisais juste un peu de musique pour moi mais je ne montrais pas, j’en faisais pas grand-chose. Aux Beaux-Arts, j’ai d’abord fais de la vidéo, du dessin, et je me suis mise à faire des choses à la voix, à la pédale de boucle … et c’est là que je me suis remise à faire de la musique, via les Beaux-Arts.


Tu avais déjà appris la musique avant, et après les beaux-arts ; tu avais vraiment cette nécessité de créer j’imagine ?

Oui oui, vraiment. J’avais besoin de faire de la création. J’ai fait du textile, j’ai fait les Beaux-Arts, j’ai fait plein de trucs différents, et je cherchais un peu le mode d’expression qui me convenait le mieux et qui me correspondait. Et j’aime toujours pouvoir faire un peu de tout en fait. J’aime la musique, c’est un peu le centre des choses, mais j’aime aussi le visuel, etc., et être pluridisciplinaire.


C’est vrai que dans tes concerts il y a pas mal de lumière. De la photo et de la vidéo aussi peut-être ?

Il n’y a pas de vidéos, mais il y a tout un travail de lumière avec des reflets, des projections de lumières. J’ai un ingénieur qui a fait tout un travail là-dessus, en rapport avec ce que je fais en musique. Ce sont vraiment plusieurs choses qui correspondent à cela, et non un éclairage classique.


J’imagine que tu n’aimes pas cette question, mais te classes-tu dans une catégorie de musique, dans un style particulier ?

Non. Justement, ce que j’essaie de faire en musique, je ne me dis pas « tiens j’aime bien tel truc de tel groupe et je vais faire pareil » ; c’est plutôt l’inverse : j’essaie de chercher des nouvelles choses, et de pousser le plus loin possible dans la singularité. C’est d’essayer de faire quelque chose qui correspond à moi, et en espérant que ça parle aux autres, mais le but, plutôt que de rentrer dans une case, c’est de créer la propre case.

 

Mesparrow
Mesparrow

Actuellement, quels sont les artistes qui t’influencent le plus ?
J’ai plein de groupes différents ; en ce moment, il y a Melody’s Echo Chamber, que j’aime beaucoup. Après je ne sais pas si ça influencera vraiment, mais peut-être indirectement. Il y a beaucoup de notes de clavier que je trouve vraiment intéressantes. Il y a aussi Alt-J, lorsqu’ils ont sorti leur album, j’ai vraiment adoré tout le travail des rythmiques et le travail des voix, j’ai trouvé leur musique vraiment intéressante. Après j’aime aussi les groupes qui sont un peu à l’ancienne, avec des sons et un grain particuliers, comme avec les Black keys, où il y a vraiment un grain de voix, de guitare. J’apprécie aussi le groupe Dark Dark Dark, où là c’est encore différent, ils font quelque chose un peu à l’ancienne, mais qui avec des voix et des arrangements …
PJ Harvey je l’écoutais avant, bien que j’ai écouté les derniers albums aussi mais ça fait partie de mes influences constantes, qui sont là depuis longtemps, et qui doivent se ressentir dans ma musique d’une certaine manière, dans la voix je pense de temps en temps. Il y a Shannon Wright aussi, j’aime beaucoup ses morceaux où il y a guitare-basse-batterie, mais ça s’entends moins dans ma musique ; je pense que ses morceaux piano-voix par contre, je m’en rapproche un peu parfois.


Et as-tu des influences autres que musicales, comme la littérature, la peinture … ?

Alors, oui, plutôt de la vidéos, il y a plein d’images que j’adore. En ce moment ce sont les vidéos de Pipilotti Rist. C’est une artiste vidéaste qui a fait plein d’installations très intéressantes, et qui a fait de la musique également, elle a eu un groupe un moment. J’aime aussi le travail de Laury Anderson, qui est une chanteuse américaine qui a fait un tube (O Superman), mais a également fait beaucoup de performance. Elle a été la première à utiliser des éléments électroniques, elle a utilisé son corps avec des capteurs sur scène, ou un violon avec des capteurs aussi. Il y a toujours avec elle quelque chose de très visuel dans ses live, c’était très art contemporain pour l’époque, elle était très avant-gardiste, futuriste. En fait j’aime généralement le travail des artistes qui font plein de choses à la fois, comme Patty Smith qui  écrit des poèmes et des bouquins, en rapport avec la musique. Ce sont des parcours qui m’intéressent, parce que ce sont des artistes qui touchent à différentes choses, et toutes les disciplines se nourrissent.
J’aime beaucoup le cinéma aussi. Je ne vais pas citer des films car il y en a plein, mais j’ai beaucoup d’images en tête et ça me nourrit beaucoup effectivement.


Au niveau des textes de tes chansons, as-tu des thèmes particuliers dont tu désires parler ? Par exemple avec le titre Next Bored Generation, les paroles émanent-ils d’une réflexion particulière ?

C’est tout un sentiment général. J’ai écrit lorsque j’étais en Angleterre, à Londres, donc Next Bored Generation est vraiment un morceau qui parle de Londres aussi, et puis c’était un ressenti sur cette vie et sur la jeunesse qui est beaucoup dans les excès pour oublier l’ennui et la morosité ambiante. Je trouvais que cela correspondait bien à ce que je considère comme ma génération. On retrouve aussi ce thème dans le cinéma, plusieurs réalisateurs en ont parlé, comme Gus Van Sant ou Larry Clark ; ils en parlent d’une manière différent mais à chaque fois ça évoque de jeunes qui s’ennuient et qui vont prendre de la drogue, vont faire la fête, et trouver des moyens d’échapper à la réalité. Next Bored Generation traite de ce sujet, I don’t Want to Grow Up également : la volonté de s’échapper du réel et continuer à s’amuser, à rêver, garder le coté créatif et sans peur et sans barrière de l’enfance – la naïveté.


As-tu une manière particulière de composer tes chansons ? Est-ce plus au feeling, ou arrives-tu avec une mélodie puis tu cales les arrangements ?

C’est plus au feeling. Et j’écris toujours après la musique. Ça commence toujours par la voix, je fais une mélodie avec la voix, je fais des choses à la pédale de boucle, je laisse tourner, je laisse tourner, puis là je me mets à écrire les paroles. Soit lorsque c’est piano-voix, la mélodie au piano et la mélodie à la voix viennent un peu ensemble, puis les paroles ensuite. C’est souvent assez instinctif. Après je reviens dessus par contre, je retravaille les textes après ce premier jet, car j’aime bien jouer avec les mots, avoir des métaphores etc.


Et donc n’as-tu pas certains auteurs sur lesquels tu te penches le plus ?

En fait je ne lis pas beaucoup, j’adore les mots, j’adore l’écriture mais … j’ai appris quelques trucs à des endroits, mais je suis vraiment autodidacte dans ce domaine. Je n’ai pas une grande connaissance littéraire, il y a beaucoup de chose que j’aime bien, mais je n’ai jamais trop creusé.


Lorsque tu es partie à Londres, as-tu eu un certain rapport avec le voyage ? Est-ce le fait de partir qui a été le déclenchement d’un certain processus créatif ?

Oui, le fait justement de partir de mon quotidien, d’être balancée ailleurs, qui m’a fait je pense prendre du recul sur ma vie de tous les jours, sur ce que je voulais faire, et je pense que c’est ça qui m’a permis de me rapprocher sur ce que je voulais faire moi, et de mieux savoir qui j’étais. Je n’ai pas réfléchi tant que ça, mais c’est comme ça que ça s’est passé, et avec le recul je me dis que le fait d’être loin de chez moi, de mes habitudes, de ma culture, ça m’a permis de sortir quelque chose de vraiment personnel. Et l’ennui aussi. S’ennuyer, le fait d’avoir du temps, cela m’a permis de faire sortir des choses. L’ennui est propice à la création je pense, quand la vie est remplie, on n’a plus le temps, on n’a plus le temps de se poser et de prendre du recul sur la vie, et on a rien à dire en fait.


As-tu des projets d’autre album ?

Je commence à composer pour mon prochain album, le deuxième donc. J’aimerais vraiment y consacrer du temps, et le voir abouti pour printemps prochain. Je commence les compositions tranquillement. Au niveau des collaborations, on verra, ça sera selon mes envies, selon la forme que prennent les morceaux ; ça sera en fonction de ce qui arrive.
Merci bien pour cet entrevue
Merci à toi !

Plus d’informations :
Site web de l’artiste : mesparrow.com/
Page Facebook : www.facebook.com/mesparrow
Vidéos : www.youtube.com/mesparrow

Crédit photos : Jonathan Le Borgne
article du concert : https://info-culture.biz/2013/08/04/mesparrow-au-festival-meg-une-traversee-onirique/