Présenté le 25 février dernier, en grande première dans le cadre des rendez-vous du cinéma québécois à Montréal, voilà que le film Bunker de Patrick Boivin et Olivier Roberge prend l’affiche dans nos salles de cinéma, dès le 7 mars. Ce drame humain, huis-clos sur fond de guerre nucléaire, met en vedette Patrice Robitaille, Martin Dubreuil et Julien Poulin.
Résumé
La guerre froide étant pourtant terminée depuis près de 25 ans, deux militaires canadiens doivent passer six mois ensemble dans le Nord du Québec, bien à l’abri dans un petit bunker souterrain. Leurs ordres sont simples et clairs : attendre que l’alarme se déclenche pour aussitôt lancer une riposte nucléaire dévastatrice sur le territoire de l’ancienne URSS.
Tremblay (Martin Dubreuil), un habitué de l’endroit, a depuis longtemps cessé de prendre ce travail au sérieux et fait du mieux qu’il peut pour profiter de ses « vacances » au grand air. Gagnon (Patrice Robitaille) en est à sa première visite et, ayant quelques fautes à faire oublier, aimerait au contraire se comporter de façon exemplaire.
Les deux hommes doivent alors apprendre à cohabiter dans cet espace restreint, confrontés à la décrépitude des lieux, à la rigueur du climat et à l’inoubliable ridicule de leur affectation. Jusqu’au jour où, alors que leur garde est complètement abaissée, la brutalité de l’alarme les frappe au visage et les plonge dans une situation impossible qui va les ébranler au plus profond d’eux-mêmes.
On entend souvent parler de guerre un peu partout dans le monde, d’atrocités auxquels les militaires sont confrontés, d’actions militaires que l’on peut souvent critiquer, et surtout, sans jamais vraiment se poser de questions sur ce que vivent ces soldats. Or, avec le film Bunker, Patrick Boivin et Olivier Roberge ont voulu jeter un regard nouveau sur ces militaires et ce à quoi ils doivent faire face tous les jours. Ainsi, ce film ramène l’action au Québec, plus proche de nous, avec des personnages que l’on peut facilement s’identifier, des citoyens sommes toute ordinaires, que l’on apprend à connaitre, à apprivoiser pendant 1 h 30 et dont on découvre les forces et les faiblesses. Alors, lorsque ces deux êtres humains sont acculés au pied du mur, avec une décision à prendre lors de leur mission aux apparences absurdes, mais aux conséquences possiblement désastreuses, le public ne peut faire autrement que de sentir une énorme empathie envers eux, et va même jusqu’à se questionner sur ce qu’il ferait, à leur place. C’est du moins ce qui m’est arrivé, lorsque j’ai vu ce film. J’en suis ressortie bouleversée et songeuse face à ce qu’aurait été mon choix d’action.
Au niveau de la réalisation, Patrick Boivin réussit dès les premières minutes, à instaurer un climat propice à la confidence, en confinant ces deux soldats dans ce bunker délabré, déprimant à souhait. Au niveau des images, il y a un superbe contraste entre les scènes qui se passent dans le bunker et les paysages bucoliques de l’automne et l’hiver en forêt et sur le bord du lac. Une réalisation sobre, épurée, avec peu de musique, mais plutôt des silences et les bruits de la nature suffisent. Avec de gros plans sur les visages des deux personnages principaux, aux moments opportuns, le public ressent toute l’émotion qu’ils ont en eux-mêmes. On assiste à des moments intimes entre les deux soldats, au fur et à mesure qu’ils s’apprivoisent. Le public est voyeur de leur séjour dans ce bunker où l’humour est parfois présent, les silences sont éloquents et les réflexions très fréquentes.
Il faut dire aussi que Patrice Robitaille et Martin Dubreuil offrent de superbes performances de jeu. Le personnage de Tremblay joué par Dubreuil est un livre ouvert et on s’attache à lui rapidement. Martin démontre une belle palette d’émotions, lorsqu’il raconte par exemple son séjour au Rwanda lors du génocide. Pour sa part, le personnage de Gagnon joué par Robitaille demeure plutôt secret, introverti, à son affaire. Là aussi, Patrice fait preuve d’une belle retenue au niveau du jeu et il se laisse aller un peu, lors du réveillon de Noël, où il baisse enfin ses gardes.
Ce huis-clos entre ces deux personnages permet de bien explorer le comportement humain, surtout des soldats, ce qu’ils peuvent vivre, mais aussi les choix auxquels ils doivent faire face. Et souvent, on se rend compte, qu’ils doivent agir selon les ordres donnés par leurs supérieurs, alors que cela va à l’encontre de leurs convictions, leurs valeurs. Et l’on voit dans ce film, que le sentiment de culpabilité et de lâcheté est souvent ressenti par un militaire qui, même s’il a obéi aux ordres, il a l’impression de ne pas avoir pu faire mieux pour éviter les conséquences désastreuses de l’action qu’il a posé.
Donc, grâce à ce film, je pense que le public verra maintenant d’un autre œil le métier de militaire et les conséquences mentales de ce qu’ils peuvent vivre. Et on ne peut que ressortir de la salle en se demandant, et nous qu’aurions-nous fait à leur place ?
Distribution
Martin Dubreuil (Tremblay)
Patrice Robitaille (Gagnon)
Julien Poulin (Guérard)
Louis Tremblay (Beaupré)
Ricardo Trogi (St-Pierre)
Alex Bisping (Lepage)
Fiche technique
Genre: drame
Durée: 1h27
Tournage: octobre 2012 à Rivière Jacques-Cartier et janvier / février 2013 à Montréal, Ste-Adèle, Parc de la Jacques Cartier et Orford.
Budget approximatif: 400 000 $
Un film de: Patrick Boivin et Olivier Roberge
Réalisation: Patrick Boivin
Scénario: Olivier Roberge
Production: Stéphane Tanguay, Cédric Bourdeau
Sociétés de production: Productions Kinesis avec la participation de Téléfilm Canada, programmes de crédit d’impôt fédéral et provincial
Distribution: Les Films Séville
Équipe technique
Costumes: Valérie Gagnon-Hamel
Conception sonore: Alexis Lemay
Direction artistique: Camille Parent
Montage: Patrick Boivin
Musique: Louis Tremblay, Steve Lalonde
Photographie: Steve Asselin
Prise de son: Cyril Bourseaux
Crédit photos : Courtoisie