Le 20 janvier prochain Barack Obama, 44ème président des États-Unis et premier noir à accéder à cette fonction débutera officiellement son second et dernier mandat présidentiel.
Il y a fort à parier que la cérémonie sera revêtue de moins d’ampleur, d’émotion mais aussi d’espoir que la première, quatre ans auparavant et pas seulement parce qu’il s’agit là d’un deuxième mandat. C’est qu’en quatre années d’exercice du pouvoir, le rêve, les promesses mais aussi les attentes des Américains comme du reste du monde comme la perception de la personnalité d’Obama se sont frottés à la réalité.
Le livre de Tangi Quéméner, Dans les pas d’Obama, au cœur du pouvoir américain, paru en septembre 2012, aux éditions JC Lattès, en pleine campagne électorale mais avant que n’en soit connue l’issue, nous aide à comprendre le comment et le pourquoi.
Tangi Quéméner, est un observateur particulièrement bien placé pour nous accompagner dans ce décryptage. Journaliste depuis 38 ans, longtemps correspondant de l’Agence France Presse à Los Angeles, il est depuis 2005, parmi les rares journalistes qui travaillent au sein de la Maison Blanche, y ont leur bureau et ont pour mission de suivre pas à pas le président américain que ce soit à Washington mais aussi lors de tous ses déplacements y compris privés. Mais Tangi Quéméner en qualité de journaliste de l’Agence France Presse, ne fait pas partie du service de presse de la présidence. La nuance est primordiale puisqu’il appartient de ce fait au fameux «4ème pouvoir».
L’auteur présente ainsi sa mission et plus généralement celle de toutes les agences de presse qui bénéficient d’une présence permanente à la Maison Blanche (Reuter, Americain Associated Press et Getty) : Faire le tri (de ce que nous délivre comme information la Maison Blanche) entre ce qui peut intéresser ou non nos clients, rédiger des dépêches en conséquence en les mettant en perspective, en interrogeant des experts, et nos sources au sein de l’administration. Si l’on rappelle que l’Agence France Presse ou AFP est la seule agence de langue française présente à la Maison Blanche et plus généralement la seule agence non anglophone on aura compris le poste stratégique d’observateur et d’analyste qu’occupe Tangi Quéméner. Il est la bouche, les yeux et les oreilles pour ses clients c’est à dire toutes les personnes, institutions, grandes entreprises ou média qui lui confient le soin de l’informer et à travers eux, nous, sur ce qui se passe dans le « cœur du réacteur ». Lourde responsabilité qui requiert comme il le souligne lui-même : Une attention de tous les instants, une grande humilité, un sens prononcé de la paranoïa. Lorsque rien ne se passe c’est que quelque chose est en train de se passer mais que nous ne sommes pas encore au courant!!!
Le portrait qu’il nous livre de la présidence Obama est celle de la Realpolitik, ce terme venu à l’origine de Bismarck, maître en la matière et qui aujourd’hui, dans sa double acceptation positive et péjorative souvent indissociables, signifie tout à la fois que l’on délaisse ses idéaux pour composer avec la réalité pour obtenir un résultat jugé finalement positif mais aussi un manque de vision politique conduisant à un règlement uniquement à court terme des problèmes le plus souvent utilitariste et parfois au seul bénéfice de celui qui la met en œuvre.
Ainsi tout au long de son livre, on découvre au rythme des actions du président mais aussi de ses adversaires ou « Amis démocrates » un portrait bilan contrasté souvent loin du doux rêveur angélique qui voulait changer le monde que l’on croyait porté au pouvoir en 2004 et de l’image d’Épinal ou people bien léchée de la présidence d’Obama qu’un service de presse de la Maison Blanche aux ordres aimerait bien faire passer.
On comprend que dans la vie d’un président du fait même de la fonction et du système politique américain qui fait que le pays vit au rythme d’élections majeures permanentes (tous les deux ans) mais aussi de la façon dont il l’interprète avec son équipe, rien n’est laissé au hasard et que finalement sa marge de manœuvre est étroite pour garder l’équilibre entre des enjeux le plus souvent contradictoires qui laissent peu de place pour révolutionner les relations internationales, la politique, l’économie, la société…. Elle rappelle aussi de façon salutaire que l’homme le plus puissant de la planète comme l’impérialisme américain aime à le dire n’est pourtant pas Deus ex machina et qu’il doit faire avec une réalité et une Histoire faite autant des Autres que de lui-même y compris de ses faiblesses dont certainement celle, comme tous ses prédécesseurs et il y a fort à parier ses successeurs, d’aimer le pouvoir.
Les chapitres du livre conçus comme des tranches de vie racontées sont autant d’axes du décryptage.
Dans les pas d’Obama, au cœur du pouvoir américain, grâce à son écriture efficace et fluide se lit comme un roman, d’un seul trait. On l’aura compris ce livre est tout sauf hagiographique. Et si Obama n’en sort pas grandi le président américain se révèle à nous plus humain parce que moins parfait même si surement plusieurs d’entre nous l’auraient souhaité parfait. Il nous permettra d’aborder le second mandat d’un président passé de Yes we can à forward avec peut-être moins d’espérances mais en étant plus à même d’en apprécier les avancés et en comprenant mieux pourquoi 51% des Américains qui vivent les États-unis et leur président ont voté Obama quand presque 80% des Canadiens ou des Français déclarent qu’ils auraient eux voté pour lui.
Ce faisant, il nous permet néanmoins de ne pas céder au cynisme ambiant du « tous pourris » et de ne pas jeter aux oubliettes de l’Histoire une part de cet espoir de 2004 en nous conviant à faire nôtre sa conclusion : même s’il reconnaît que ses cheveux ont blanchi et qu’il est « cabossé » de partout après quatre ans de pouvoir il s’agit toujours d’espoir, il s’agit toujours de changement assure Obama à ses partisans lors de ses discours électoraux de 2012. Mais s’il semble évident qu’il regrette de n’être plus seulement le candidat des grandes promesses, il s’emploie à faire mentir un slogan cinglant du camp Romney : Obama n’est « qu’un homme politique comme les autres » ou encore celui de « Obama is not working » affirmant en une même phrase qu’Obama ne travaille pas et/ou ne fonctionne pas.
Dans les pas d’Obama, au cœur du pouvoir américain
Auteur : Tangi Quéméner
Photographie de la couverture Win McNamee; Getty Images
Maquette de couverture : Atelier Didier Thimonier
395 pages.
ISBN : 978.2.7096.4255.2; dépôt légal septembre 2012.
Prix suggéré : 29,95 $ avant taxes. Offert dans toutes les librairies
Éditions : Jean-Claude Lattes www.editions-jclattes.fr
Directrice de publication : Pascale Amaudric
Pour commander ce livre : http://www.ruedeslibraires.com/livres/dans-les-pas-obama-262313.html/55577a46e4c4aadc932db2236ecf2b9a7abff4072daa49b2415506f073041419ff81004ab73483076b7bf25bddfcce56610e274585255446fd3950e8d42534b7/?u=4850
© photo: courtoisie
