Après avoir été présenté comme film de clôture des Rendez-vous du cinéma québécois, voici que le long métrage Chorus, de François Delisle prend l’affiche dès le 6 mars prochain. Mettant en vedette Sébastien Ricard, Fanny Mallette, Geneviève Bujold, Pierre Curzi et le groupe rock montréalais Suuns, ce film en noir et blanc aborde entre autres les thèmes du deuil d’un enfant et des séquelles que cela entraine pour un couple.
Hugo avait huit ans lorsqu’il a disparu. Après des recherches infructueuses, le couple de parents formé par Christophe et Irène s’est brisé sous le poids de l’attente insoutenable. L’un s’est exilé au Mexique. L’autre a repris sa carrière d’alto au sein d’un chœur de musique ancienne. Vivant des solitudes parallèles et habités par la disparition d’Hugo, un jour, on leur annonce que des restes humains ont été retrouvés. Tout porte à croire qu’il s’agit de leur fils, Hugo. Face à la mort de leur enfant, chacun chemine différemment pendant leurs retrouvailles forcées à Montréal. Autour de la perte coupable se révéleront non sans difficulté, la confiance en la vie, l’acceptation de la mort et même la possibilité d’une réconciliation. Chorus est une histoire d’amour qui émerge d’un deuil et qui se termine par une étreinte entre deux survivants, comme pour cicatriser une blessure fondamentale.
La première scène du film capte immédiatement l’attention du spectateur, alors qu’un prisonnier (joué avec sobriété et brio par Luc Seney) se confesse d’un enlèvement et d’un meurtre, survenu 10 ans plus tôt. La tension est palpable et nous sommes pendus aux lèvres de ce pédophile, alors qu’on s’attend au pire. Sans musique, en noir et blanc, avec l’image presque toujours figée sur ce criminel, le spectateur est instantanément embarqué dans l’histoire.
Par la suite, on part à la rencontre des parents de ce jeune garçon disparu, alors que tous deux, à leur manière, tentent de survivre à la disparition de leur fils, sans jamais en avoir fait le deuil. L’une a trouvé refuge dans le chant choral tandis que l’autre s’est exilé au Mexique et se laisse emporter par les vagues de la mer et le sexe sans lendemain. Tous deux ont cependant continué de faire vivre leur fils dans leur cœur, dans leur tête. Ils l’ont fait grandir, lui ont gardé cette place en eux, car incapable de le laisser aller. Il y a des scènes magnifiques dans ce film. Les répétitions du chant dans une église. C’est poétique et apaisant. Également, voir le père (Sébastien Ricard) se laisser fouetter par les vagues en se roulant nu dans la mer du Mexique, c’est à la fois fascinant et douloureux à regarder. On sent toute la douleur qui se cache en lui.
Lorsque ces deux êtres déchirés se retrouvent pour l’identification du corps de leur enfant, ainsi que les funérailles, ceux-ci sont confrontés à la réalité de la mort, mais aussi aux souffrances de leur fils avant sa mort et ils doivent cette fois-ci faire vraiment le deuil de leur fiston. Ce processus ne se fera pas sans heurt. Encore une fois, François Delisle met en scène des moments très forts émotionnellement. Lorsque les parents écoutent les confidences du prisonnier auteur du crime atroce sur leur enfant, Sébastien Ricard est une boule de douleur et ça se voit à l’écran.
Également, lorsque Fanny Mallette se laisse finalement aller à pleurer son fils, dans les bras de sa mère, magnifiquement incarnée par Geneviève Bujold, on ne peut retenir nos propres larmes.
Des performances d’acteurs magistrales ! Autant Fanny Mallette est accablée de culpabilité et se sent incapable de surmonter ce deuil elle-même, autant Sébastien Ricard semble montrer une maitrise de lui-même, comme un arbre inébranlable. Malgré cela, on ressent leur douleur à tout moment. Il y aussi Pierre Curzi que l’on voit peu dans le film, qui livre une performance très habile, où on le découvre dans un rôle empreint de douceur, d’amour et de tendresse pour son fils.
Ce n’est que lorsque ces deux parents démunis ne savent plus comment se sortir de cet état de deuil pour reprendre goût à la vie qu’un ancien copain de leur fils refait surface et leur donnera une façon de garder leur fils dans leur cœur, tout en se donnant une autre chance de vivre leur vie. Et à la fin du film, on voit une performance musicale du groupe rock montréalais Sunns qui nous donne espoir et nous permet de quitter la salle sans nous sentir trop démolit par la tristesse.
Un film sobre qui parle d’un sujet douloureux, sans jamais tomber dans le mélodrame. Bien que le fait que le noir et blanc permet de garder le focus sur ce sujet et ces émotions plutôt noires, je crois que ce film aurait eu un aussi gros impact, s’il avait été tourné en couleur, car c’est la performance des acteurs que l’on retient. Aussi, d’habitude, je ne raffole pas des voix hors champ narratives qui parfois peuvent agrémenter un film, mais dans le cas présent, les quelques phrases prononcées par le père et la mère, à certains moments, ne fait que renforcer les émotions qu’ils ressentent et nous les imprégner un peu plus en nous.
Le film a été très bien reçu au festival de Sundance et à la Berlinale, et on pourra le voir sur nos écrans dès le 6 mars prochain.
CRÉDITS
AVEC
Sébastien Ricard, Fanny Mallette, Geneviève Bujold, Pierre Curzi, Antoine L’Écuyer, Luc Senay, Didier Lucien, Suuns
RÉALISATION, SCÉNARISATION, IMAGES, MONTAGE
François Delisle
DIRECTION ARTISTIQUE
Geneviève Lizotte
CRÉATION DES COSTUMES
Caroline Poirier
DISTRIBUTION DES RÔLES
Pierre Pageau
DIRECTION MUSICALE
Robert Marcel Lepage
SON
François Grenon, Martyne Morin, Simon Gervais, Stéphane Bergeron
DIRECTION DE PRODUCTION
Marie-Claude Beaulieu
PRODUCTEURS
François Delisle, Maxime Bernard
FORMATS
DCP, DVD, HDCAM, Bluray, noir et blanc
DURÉE
96 minutes
ANNÉE
2015
PRODUCTION
François Delisle et Maxime Bernard pour Films 53/12
DISTRIBUTION AU CANADA
FunFilm Distribution
Site officiel : chorusfilm.com
Facebook : Facebook.com/chorusfilm
Crédit photos : Courtoisie