« Rites », José Navas en solo

José Navas © Nina Konjini
José Navas © Nina Konjini

Assis en costume noir dans une demi-obscurité sur la scène de la Cinquième Salle à Montréal, José Navas prend son temps. Il retire son pantalon, le plie et le dépose sur une petite table près de lui. Il suspend sa veste sur le dossier de sa chaise et se lève lentement en chemise blanche, se concentre pendant un temps et commence à danser. C’est la chanson Ain’t no use, langoureusement interprétée par Nina Simone, qui engage le danseur à se mouvoir pour ce premier solo.

Ses gestes sont purs, parfois au ralenti; son corps est désarticulé. José Navas danse avec tous ses membres et surtout avec ses bras. Les mouvements sont décomposés; il semble parfois s’envoler. Jamais il ne regarde le public. On le sent concentré sur lui-même, animé par la seule musique qui le pénètre de l’intérieur.

Pour chacun des trois solos qui suivent, le même cérémonial est présenté. José Navas, assis sur sa chaise, retire lentement ses chaussures et ses vêtements pour les remplacer ou non par d’autres. Il change de tenue, comme s’il s’agissait de rechercher ce qui sied le mieux à son corps en vue d’être réellement possédé par la musique.

Après Nina Simone, c’est sur un extrait de la symphonie du Nouveau Monde de Dvorak que se meut José Navas, puis sur un superbe Liede de Schubert, interprété par le baryton Matthias Goerne, pour s’achever sur le Sacre du printemps de Stravinsky.

José Navas © Valérie Simmons
José Navas © Valérie Simmons

Le grand rite sacral païen de Stravinsky sert donc d’apothéose au spectacle de José Navas.

Dépouillé de tout artifice vestimentaire qui pouvait symboliser son humanité, il ne reste du danseur que sa part animale, un corps nu et un seul souffle musical pour l’animer.

La musique agit comme des électrochocs sur lui. Les spectateurs observent de l’extérieur les mouvements du danseur agité par les seules vibrations musicales. Lui demeure dans sa bulle narcissique, comme un animal sauvage et puissant qui ne se soucierait pas d’être observé ou admiré par quelque humain que ce soit.

Sans doute tous les danseurs du monde sont-ils animés par l’une ou l’autre musique. Mais José Navas semble réaliser une performance à la recherche du mouvement pur et de ce lien encore plus intime qu’il peut instaurer avec la musique qui n’entre pas par ses oreilles pour être relayée par son cerveau, mais agit sur toutes les cellules de son corps comme s’il s’agissait de vibrations terrestres et primordiales.

Le chorégraphe vénézuélien José Navas qui danse depuis 30 ans, et fête son cinquantième anniversaire cette année, démontre que la longévité en danse contemporaine est non seulement envisageable mais aussi pleine de ressources et de découvertes possibles pour cet art.

Rites, de José Navas / Compagnie Flak – Danse Danse

Du 11 au 28 novembre 2015 à la Cinquième Salle, Place des Arts à Montréal

Informations : www.dansedanse.ca

José Navas © Valérie Simmons
José Navas © Valérie Simmons

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