« Hurlevents » ou les hurlements de l’amour romantique au théâtre Denise-Pelletier

Hurlevents © Gunther Gamper
Hurlevents © Gunther Gamper

Le romantisme n’est pas le seul apanage du XIXe siècle et de sa littérature pleine de grands sentiments, à l’exemple du roman Les Hauts de Hurlevent d’Émily Bronté. Peut-être en effet le romantisme existe-t-il toujours aujourd’hui, en dépit des changements culturels et des pseudo libérations que la société prétend avoir connu. C’est en tout cas ce que semble vouloir dire Fanny Britt dans sa pièce Hurlevent spécialement conçue pour la production du théâtre Denise-Pelletier et de son directeur artistique et metteur en scène Claude Poissant.

Hurlevents © Gunther Gamper
Hurlevents © Gunther Gamper

Avec le célèbre roman victorien en filigrane de la pièce, Fanny Britt nous transporte dans le milieu universitaire québécois contemporain, avec ses téléphones intelligents et ses réseaux sociaux.

Marie-Hélène est professeure de littérature et a justement mis au programme de son cours le roman d’Emily Bronté. Les garçons sont rares à s’y être inscrits mais il y en a quand même dont Edouard qui est présent pour une nouvelle session. C’est qu’il apprécie particulièrement Marie-Hélène, comme d’ailleurs la colocataire du jeune homme, mais pour d’autres raisons. À un souper organisé chez les deux étudiants, Marie-Hélène est attendue ainsi que leur amie Isa tourmentée par une relation amoureuse impossible avec un professeur marié de la même université. Débarqueront aussi Catherine, la sœur d’Émilie, et Sam avec qui elle entretient une relation amoureuse. Au fil de la soirée et des propos des protagonistes, on comprendra que les intérêts intellectuels des trois étudiants en particuliers se confondent avec leurs manières de concevoir l’amour, de le rêver et de le vivre. Ce sont des amours sombres, sublimes et passionnés; amours impossibles, voués à l’échec et pleins de douleurs et de déconvenues comme l’a si bien décrit la littérature romantique. Mais tout cela n’appartient-il pas à un passé révolu ? Eh bien, il semble que non…

Dans le petit appartement, très simplement meublé, d’Émilie et d’Édouard, les conversations vont bon train tout en étant décousues, fragmentaires et rapides, intelligentes et drôles. La pudeur fait que certaines choses sont difficiles à avouer et, de manière très subtile, les dialogues dévoilent quand même sous une forme tout à fait contemporaine un fond idéologique qu’on pourrait croire appartenir à un autre âge et qui agit sur le réel des personnages. C’est que l’amour avec un grand A n’a peut-être ni âge ni époque. Il n’appartient pas seulement à la littérature romanesque et revêt la même quête que l’on soit une jeune fille quasi recluse dans le milieu conservateur et puritain de celui d’Emily Bronté au XIXe siècle, ou un garçon ou une fille du XIXe siècle, en apparence avertis et libérés de ces carcans anciens.

Dans une belle mise en scène et avec six acteurs de grand talent, la pièce montre bien la confusion qui peut exister entre les rêves, les fantasmes, l’identification à certains personnages de la grande littérature et les sentiments vécus réellement, qui poussent à des actions bien concrètes ou à des interprétations du réel. Contrairement à ce que l’on croit parfois, il n’y a pas de séparation entre la logique de la pensée rationnelle et le ressenti du corps, surtout lorsqu’il s’agit de questions qui touchent à l’amour. Et d’ailleurs, existe-t-il des questions humaines qui ne touchent pas à l’amour ?

 

Hurlevents, du 31 janvier au 24 février 2018 au théâtre Denise-Pelletier à Montréal

Texte Fanny Britt

Mise en scène Claude Poissant

Production Théâtre Denise-Pelletier

Avec Alex Bergeron, Kim Despatis, Benoît Drouin- Germain, Florence Longpré, Emmanuelle Lussier- Martinez et Catherine Trudeau

Assistance Andrée-Anne Garneau Scénographie Patrice Charbonneau-Brunelle  Lumières Erwann Bernard  Costumes Linda Brunelle Assistance aux costume Marie-Audrey Jacques Maquillages-coiffures François Cyr Conception sonore Nicolas Basque Dramaturgie Alexia Bürger Stagiaire à la mise en scène Cédrik Lapratte-Roy Remerciement spécial à Adèle Trottier-Rivard Production Théâtre Denise-Pelletier

Informations : http://www.denise-pelletier.qc.ca/spectacles/69/