« J’appelle mes frères » par le théâtre de l’Opsis en tournée dans les Maisons de la culture de Montréal

J’appelle mes frères © Caroline Laberge
J’appelle mes frères © Caroline Laberge

Né en Suède d’un père tunisien et d’une mère suédoise, Jonas Hansen Khemiri, l’auteur de la pièce J’appelle mes frères, présente au spectateur une situation inspirée d’un événement qu’il a vécu de près : l’attentat terroriste au centre de Stockholm en 2010. Deux blessés légers étaient à déplorer ainsi qu’un mort, le poseur des deux bombes, un citoyen suédois né en Irak. S’il s’agissait bien d’un nouvel attentat terroriste revendiqué par son auteur au nom de l’islam, cela ne veut certainement pas dire que tous les musulmans soient des terroristes, une évidence que tout le monde a bien intégrée aujourd’hui. C’est toutefois à cette problématique qu’a réfléchi Khemiri, à savoir aux regards que pouvaient poser sur lui et sur tous ceux qui

J’appelle mes frères © Caroline Laberge
J’appelle mes frères © Caroline Laberge

paraissent venir d’ailleurs, ses concitoyens blonds à la peau claire.

Or, dans la présentation qu’en fait le théâtre de l’Opsis, en 2018 et à Montréal, je me suis demandé si le sujet pouvait encore être posé en ces termes. Du coup, l’histoire, même si elle est bien menée, à un bon rythme avec des personnages intéressants et une bonne dose d’humour, ne m’a pas semblé crédible.

La pièce a toutefois bien des composantes de qualité. Les acteurs sont excellents, le rythme fait un peu penser à du rap, on rit et on s’attache aux personnages.

Amor et Shavi sont des amis d’enfance qui entretiennent leur amitié même si leurs vies ont pris des chemins différents. Amor fait des études à Polytechnique tandis que Shavi s’est marié et n’a d’yeux que pour son adorable petite fille. Il y a d’autres personnages, Valeria, Karolina, Ahlem, des jeunes femmes qui font partie de leur cercle d’amis ou de la famille de Amor. Très rapidement, la pièce nous plonge dans les riches relations qu’ils entretiennent entre eux, le tout centré sur Amor, ses amours déçues, ses difficultés avec son père, son désir de vivre, sa relation avec Shavi qu’il trouve un peu trop envahissant parfois. Tout cela est très bien rendu et très bien interprété. On ne s’ennuie pas une seconde. Mais il reste qu’à moins d’une bonne paranoïa (ce qui se révèle d’ailleurs être peut-être le cas pour Amor), on comprend mal la panique que tous ressentent à l’annonce de l’explosion de la première bombe qui n’a fait aucun blessé et qui aurait pour conséquence leur stigmatisation immédiate. Ça fonctionne d’autant moins bien que les deux principaux protagonistes sont noirs et qu’avant de rencontrer la référence à l’attentat de Stockholm dans la pièce, je me suis demandé si l’histoire ne traitait pas des bavures policières contre les noirs aux États-Unis. C’est dommage, car la pièce a quand même des qualités, mais pour moi elle a manqué son objectif.

J’appelle mes frères, présentée en tournée du 23 mars au 3 mai 2018 dans les Maisons de la culture de Montréal

Texte : Jonas Hassen Khemiri (traduit du suédois par Marianne Ségol-Samoy).
Mise en scène : Luce Pelletier.
Distribution : Jasmine Bouchardy, Fayolle Jean Jr., Anglesh Major et Cynthia Trudel.

Une production du Théâtre de l’Opsis créée en collaboration avec le réseau Accès culture.

Informations : http://theatreopsis.org/fr/index.php/portfolio/jappelle-mes-freres/