« La dette de Dieu » au théâtre La Chapelle, à Montréal

La dette de Dieu © Gopesa Paquette
La dette de Dieu © Gopesa Paquette

Jean-François Boisvenue a du talent, beaucoup de talent. Avec son équipe de la production La nuit / Le bruit, il se présente seul dans une dramaturgie variée et originale, avec vidéos, performances dansées, théâtre, pseudo conférence et j’en passe. Il invite sur scène une dinde improbable, des étoiles qui s’illuminent ou un ruissellement d’eau qui tombe magiquement du ciel… Il est vrai qu’il se présente comme Dieu en personne au début du spectacle, Dieu qui à la fin de chaque jour de sa création du monde pique un petit somme irrésistible. C’est dire que Jean-François Boisvenue ne manque pas non plus d’humour.

La dette de Dieu : le titre est alléchant mais l’idée selon laquelle Dieu aurait contracté une dette à l’égard du diable pour fabriquer le monde entraine dans la pièce des développements que j’ai trouvé naïfs, comme s’il y avait les gentils d’un côté et les méchants de l’autre, les pauvres du côté des gentils et les riches de celui des méchants. Quant à Dieu, s’il initie le propos, on n’en entend plus parler au bout de quelques minutes de spectacle : il s’efface au profit de discours plutôt basiques de militant politique.

La dette de Dieu © Gopesa Paquette
La dette de Dieu © Gopesa Paquette

Car pour appuyer son propos, c’est à un véritable cours d’économie pour débutants que Jean-François Boisvenue nous convie avec exposé des fonctions des banques privées et de la banque centrale du Canada ou des États-Unis, explication de ce qu’est une monnaie et effets pervers du crédit pour achever sur les crises économiques périodiques dont celle de 2008 dont on a tant entendu parler dans les médias. Était-ce bien nécessaire ?

Les seuls moments touchants sont ceux où l’auteur / acteur nous parle de sa situation personnelle et de ses propres difficultés financières. Ses 18 ans en l’an 2000, la dette qu’il a contractée pour financer ses études et l’augmentation de celle-ci alors qu’il a fondé une famille… Pourquoi ne s’en est-il pas tenu à cela ? Pourquoi n’a-t-il pas approfondi sa situation personnelle? Cela aurait donné à réfléchir de manière beaucoup plus concrète et profitable. Cette option m’aurait personnellement bien plus intéressée que la présentation générale de la crise des subprimes et le surendettement des ménages dont tout le monde a déjà tellement entendu parler dans les médias.

La pièce La dette de Dieu n’en est pas pour autant désagréable, loin de là. Toute la dramaturgie est mise au service du fond de manière créative et très originale, intelligente et drôle. Il y a beaucoup de travail et d’inventivité dans cette œuvre que j’aurais trouvée excellente si on ne m’y avait pas servi des propos manichéens qui ne peuvent qu’éveiller mes soupçons. Jean-François Boisvenue est toutefois un artiste à suivre. Il me tarde de voir ce qu’il fera dans sa prochaine création.

 

La dette de Dieu, du 9 au 13 avril 2018, au théâtre La Chapelle, à Montréal

Idéateur, auteur et interprète : Jean-François Boisvenue

Assistante-metteuse en scène et éclairages : Juliette Dumaine

Conseiller à la mise en scène et concepteur sonore : Gaétan Paré

Collaboratrice à l’écriture et scénographe : Claire Renaud

Conseillère chorégraphique : Catherine Laframboise Desjardins

Consultante à la recherche : Julia Posca

Conceptrice DEL : Catherine Fournier-Poirier

Concepteurs vidéo : Jean-François Boisvenue et Claire Renaud

Assistante technique éclairage et son : Delphine Rochefort-Boulanger

Une production La nuit / Le bruit

 

Informations : http://lachapelle.org/fr