Quand je pense qu’on va vieillir ensemble…

Quand je pense._._ Chiens de Navarre HD © Ph. Lebruman
Quand je pense._._ Chiens de Navarre HD © Ph. Lebruman

Une première en Amérique du nord pour cette troupe originale, les Chiens de Navarre. Déjà reconnue et appréciée en Europe, la compagnie soutenue par le FRIMAS s’essaie à Montréal. Jusqu’au 27 novembre, l’Usine C accueille une de leurs créations, osée et engagée : Quand je pense qu’on va vieillir ensemble.

La recherche du réconfort et de l’humanité. Oui, c’est exactement notre sentiment lorsque l’on sort du spectacle des Chiens de Navarre. La pensée est humaniste, le préambule fort poétique et la transmission très littérale. Sur la scène : une troupe gentillement urluberlue, des scènes qui s’enchaînent oû les acteurs semblent laissés à eux-mêmes, l’humanité au sens propre où tous les détails du corps humain sont effectivement bien mis sous les yeux et les jeux de mots catapultés violemment.

Chiens de Navarre-Quand je pense qu'on va vieillir ensemble... © Ph. Lebruman 2013 DSC_7596Les huis compères de l’équipe des Chiens de Navarre viennent encore nous chercher avec cette pièce en s’amusant à dénuder les fils de la société humaine. Une expérience déroutante avec des normes vaporeuses et une trame présentée à la mode dadaiste. En réalité, à ne pas s’y tromper, c’est impressionnant!

Dès l’entrée les artistes nous plongent dans un univers loufoque où la terre noire a envahi la scène et donne un équilibre précaire aux artistes. Le décor est sommaire mais plutôt original avec un amas d’objets jetés pêle-mêle.

Déformés, ensanglantés, pleins d’équimoses, les acteurs traversent le plateau, lancent, tirent et pointent sans agilité. La partie de boules est commencée, elle a visiblement mal tourné mais on la continue sans s’en offusquer. Et on s’assoie ensuite en cercle pour en parler, aider, s’aider. Parler du mal-être, essayer de se consoler un temps soi peu avant la prochaine séance.

On ajuste surtout à nouveau son voile devant les yeux. Une histoire de comédie humaine en quelque sorte. Tout au long du spectacle la compagnie boude les codes sociaux et le sens universel ou appris et classic. Avec brusquerie et sans crier gare, elle les jette à la tête du public.

Derrière leur jeu, leurs mises en situation burlesques et hilarantes, les Chiens de Navarre nous provoque. Ils pointent du doigt les codes classés « humains » d’une société où on rabaisse, on bafoue, on viole et on garde des institutions à vocation sociale aux pratiques déviantes pour gérer les « déviants ». Sont-ils alors vraiment marginaux parce qu’ils sont trop sensibles ou parce qu’ils sont trop conscients? Le spectacle ne nous donne pas de réponse, il frappe et vient chercher notre réaction.

Préambule

« Notre besoin de consolation est impossible à rassasier » écrivait Stig Dagerman, au fin fond de sa forêt suédoise. Au milieu de la montagne comme au milieu des feux rouges, nous avons tous e même cri désespéré, la même continuelle et difficile recherche de consolation qui nous anime pour continuer à vivre et affronter le monde. C’est si bon alors de se réunir (en cercle et chaussettes de préférence), pour s’écouter les uns les autres, pour tout remettre à zéro et panser nos plaies.
Quitte à perdre la raison ou l’élocution.
Les Chiens de Navarre tentent ainsi l’expérience spectaculaire de la réconciliation avec soi-même pour mieux interroger l’enfant triste qui claque des dents en nous.

Jean-Christophe Meurisse

Une technique de création collective

Dans chacune de leurs créations, une grande place est laissée à l’improvisation des artistes. Ainsi le metteur en scène laisse les interprètes s’approprier l’oeuvre et le sujet en ne leur donnant que succinctement les directives. Le spectacle diffusé actuellement a été créé au théâtre les Subsistances à Lyon en France. Un laboratoire de création engagé en art de la scène.

Oscillant entre la crispation nerveuse et le fou rire, la curiosité et l’étonnement, la création est assez captivante. Une chose est sûre c’est qu’elle ne nous laisse pas insensible.

Interprétation : CAROLINE BINDER, CÉLINE FUHRER, ROBERT HATISI, MANU LASKAR, THOMAS SCIMECA, ANNE-ÉLODIE SORLIN, MAXENCE TUAL, JEAN-LUC VINCENT.

Crédit Photos : Ph. Lebruman

Pour plus d’informations rendez-vous sur le site de l’Usine C ou le site officiel de la compagnie.