« Pour » ou variations sur les écoulements féminins au théâtre La Chapelle

Pour © Daina Ashbee
Pour © Daina Ashbee

« Pour » signifie écoulement en français. À la fin de l’adolescence, les menstruations – « ce que les femmes ont coutume d’avoir » comme on disait autrefois –  peuvent être très douloureuses. Douleurs cachées dans les tréfonds de l’abdomen, certaines femmes les subissent chaque mois, en silence. Dans une chorégraphie signée Daina Ashbee, la jeune danseuse Paige Culley  interprète avec émotions une de ces nombreuses femmes aux prises avec de tels tourments répétitifs.

Quand les spectateurs prennent place sur les gradins du théâtre La Chapelle, la scène est plongée dans la pénombre où une silhouette se laisse discrètement entrevoir. On la devine à peine mais on perçoit sa voix aigüe qui par moments perce le silence. Est-ce un chant ou un cri de douleur ? La voix se fait de plus en plus stridente et ne laisse plus de doute. C’est le cri d’une femme qui souffre. Une profonde tristesse se laisse bien percevoir également. Car cette souffrance a quelque chose de paradoxal, ce qui augmente le malaise : elle est à l’œuvre dans un corps jeune et en parfaite santé.

Tout à coup une lumière aveuglante éclaire la scène où seule cette jeune femme apparaît avec sa souffrance. Elle est impuissante face à ce mal. Malgré son corps superbe et parfait d’adolescente, sa vulnérabilité est totale et elle porte en elle ce mal-être sans savoir quoi en faire.

Pendant une heure que dure la performance, on assiste au spectacle de ce corps éblouissant de beauté qui se tord et se retourne dans des convulsions au ralenti. Pas de larmoiement ou de grimacement maladroits et inutiles. Dans sa nudité et avec une grande sobriété, seuls la beauté et l’émotion se font voir et entendre. Chaque tableau révèle une esthétique superbe tout en renvoyant à des petits comportements que tout le monde a pu avoir à un moment ou à un autre de sa vie. Comment se distraire d’une douleur bien présente dans son corps et dont on désespère un peu qu’elle finira par passer ? La douleur se diffuse dans le bas du ventre de la jeune femme, alors ce sont ses bras qu’elle agite, ou ses jambes, dans des mouvements répétitifs qui peut-être la feront oubliée… Mais il n’en est rien. Elle est là, elle s’apaise mais elle revient et elle revient encore…

Pour © Daina Ashbee
Pour © Daina Ashbee

Diane Ashbee qui a aussi signé la scénographie de la très belle performance de Paige Culley est d’origine à la fois hollandaise, cries et métisses. Ses créations combinent de la danse très contemporaine à d’autres éléments traditionnels. Sa création Une autre de ses créations, Unrelated sera prochainement représentée au Mexique, en Norvège et à Londres, au Royaume Uni.

Pour, du 26 au 30 septembre 2016, au théâtre La Chapelle à Montréal

Chorégraphie et scénographie Daina Ashbee

Interprète Paige Culley

Musique Jean-François Blouin

Lumière Hugo Dalphond

Informations : http://lachapelle.org/fr/calendrier/pour