« Bashir Lazhar » au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui à Montréal

Rabah Aït Ouyahia © Valérie Remise
Rabah Aït Ouyahia © Valérie Remise

Un homme seul sur une scène de théâtre. Un maitre d’école face à une classe d’enfants de 6e année dont l’ancienne professeure Martine Lachance a eu la très mauvaise idée de se suicider par pendaison dans sa classe. Difficile de faire pire en matière de cadeau d’adieu à des enfants dont on avait la charge, que l’on devait accompagner sainement dans leur développement vers la vie adulte…

Le nouveau maître est exigeant avec ses élèves : Honoré de Balzac, Jean de la Fontaine, des dictées difficiles, des rédactions et des débats de fond. Il n’en est pas moins apprécié par eux. Les enfants se surpassent. En particulier la petit Alice qui compose un texte émouvant sur son école qu’elle aime et sur le vide qu’a laissé la maîtresse.

Le maître aussi a une blessure. Une grosse blessure. Sans doute originaire d’Algérie où le terrorisme islamiste a fait quelque 150 000 morts, il est lui-même la victime de cette horreur où sa femme et ses trois enfants ont péri assassinés. Les intégristes ne font pas la guerre qu’à ceux qui ne sont pas musulmans, ils la font aussi aux musulmans qui ne le sont pas assez, et lui se dit athée. Mais ces nuances sont peut-être un peu trop compliquées pour l’administration de l’école, embourbée dans cette crise de l’établissement scolaire, qui se méfie de ce remplaçant immigrant et qui préfère recourir aux activités extrascolaires, aux projets d’équipe, à une psychologue pour continuer à fonctionner, et peut-être à un autre remplaçant, plutôt qu’à un enseignement traditionnel à la personnalité de qui l’on fait confiance pour remettre des enfants sur une bonne voie. Un peu trop compliqué aussi pour les services d’immigration qui, dans la pièce, se méfient de cet immigrant venu seul demander un asile alors qu’il a laissé sa famille au pays où elle s’est fait assassiner.

Rabah Aït Ouyahia © Valérie Remise
Rabah Aït Ouyahia © Valérie Remise

Ce tête à tête entre le maître d’école et ses jeunes élèves est plein de tendresse et de considération de part et d’autre. Evelyne de la Chenelière a l’art du découpage et son texte permet d’avancer dans l’action et dans les sentiments par petites touches délicates. Sans décor quasiment, avec seulement des éclairages bien menés et une belle mise en scène de Sylvain Bélanger, Rabah Aït Ouyahia qui tient le seul rôle sur scène, celui de Bashir Lazhar, nous permet de découvrir non seulement son personnage dans toute sa complexité mais aussi tous les autres protagonistes de l’histoire, certains enfants dont Alice, et aussi l’administration plutôt méfiante, butée et dépassée.

Bashir Lazhar, du 19 septembre au 14 octobre 2017, au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui à Montréal

Texte Evelyne de la Chenelière mise en scène Sylvain Bélanger interprétation Rabah Aït Ouyahia assistance à la mise en scène et régie Julien Veronneau scénographie Julie Vallée-Léger conception lumière Cédric Delorme-Bouchard costumes Marc Senécal musique originale Guido Del Fabbro maquillages Angelo Barsetti

 

Informations : https://theatredaujourdhui.qc.ca/