TOC TOC

 

Le 13 mars 2010

 

« Marcel Leboeuf… Une performance physique et mentale à la hauteur de l’immense talent de ce comédien.

Olivier Morin… une belle gymnastique de jeu que nous offre ce jeune homme.»

 

C’est le vendredi 12 mars que la Salle Albert-Rousseau était l’hôte de la pièce TOC TOC, en provenance de Montréal. Cette pièce de Laurent Baffie nous transporte dans la fascinante rencontre de six patients souffrant de divers Troubles Obsessionnels Compulsifs (TOC) dans la salle d’attente du réputé Dr. Stern, éminent psychiatre aux méthodes apparemment révolutionnaires et radicales. Le Syndrome de Gilles de la Tourette, l’arithmomancie (fascination des chiffres), la nosophobie (peur des maladies), le toc de vérification, la palilalie (répétition sans arrêt) et le toc d’ordre ou encore de symétrie sont les TOC qui affectent nos sympathiques patients. Le spécialiste est en retard. Il tarde à revenir de Toronto. Si bien que nos six obsédés finissent par s’administrer eux-mêmes une petite thérapie de groupe. Les patients réussiront à s’entraider dans l’attente du médecin.

Dès la levée du rideau, le rire est rapidement déclenché par Édgar Fruitier (atteint du syndrome de La Tourette) que l’on retrouve assis, seul dans la salle d’attente du médecin. Cet homme érudit, que l’on connaît avec un langage très soigné, surprend le public par un juron et un geste vulgaire, signe de son TOC, qui fait éclater de rire les gens. Arrive par la suite Marcel Leboeuf, dont le personnage de chauffeur de taxi obsédé par les chiffres est de loin le plus drôle et le plus attachant. En plus de vouloir tout calculer, il a des tics nerveux et ne cesse de bouger, au plus grand bonheur du public. Une performance physique et mentale à la hauteur de l’immense talent de ce comédien. Par la suite, les autres personnages arrivent les uns après les autres, avec leurs diverses obsessions Danièle Lorain(obsédé par les microbes), Élisabeth Chouvalidzé (terrorisée par l’idée d’avoir laissé un rond de poêle allumé) etAnne-Élisabeth Bossé (qui répète tout ce qu’elle dit et sur le même ton). Ces personnages ont des TOC un peu moins intéressants à voir et écouter, les rendant même parfois agaçants à entendre. Bien qu’elles jouent leurs rôles de façon très convaincante, on devient éventuellement saturés de leurs agissements. Arrive finalement le dernier patient, Olivier Morin, qui incarne un merveilleux jeune homme qui a un faible pour la symétrie et une peur terrible des lignes. Les contorsions qu’il exécute, pour tenter de ne pas marcher sur les lignes du plancher, sont hilarantes. Il grimpe sur les cadres de fenêtre, sur la bibliothèque, se promène sur les chaises. Bref, une belle gymnastique de jeu que nous offre ce jeune homme. Quant à la secrétaire qui veille à retenir tout ce beau monde, elle est jouée par Amélie Dallaire et elle semble tout aussi névrosée que ces patients.

 



Cette pièce, bien qu’elle parle d’un sujet grave, est jouée avec beaucoup de respect pour les gens avec ce genre de troubles compulsifs. Il y a beaucoup de dérision, de rigolade face aux situations. Par contre, le texte procède à une véritable démystification des TOC et permet d’humaniser ces gens aux prises avec ces dérèglements de la nature qui tendent à leur donner une dimension de robot ou de machine.

Cette pièce repose entièrement sur le jeu des acteurs. Comme les six personnages sont presque toujours ensemble dans la salle d’attente, dans une sorte de huis clos et qu’ils interagissent ensemble fortement avec leurs manies, il y a un défi de taille en matière de rythme et réussir à garder le focus dans tout ce qui se passe. On a l’impression qu’ils sont comme des hamsters dans une roue. Au début, la nouveauté de tous ces personnages flamboyants excite le public et les rires éclatent à profusion. Il est amusant pendant un certain temps, de voir ces toqués apprendre à se moquer du malheur des autres pour, finalement, arriver à se moquer de leurs propres troubles. Cependant, bien que ces six comédiens défendent leurs personnages avec une ferveur indéniable, l’ennui s’installe et l’aventure thérapeutique tourne rapidement en rond. Après avoir vu quelqu’un glisser sur une peau de banane 20 fois, la 21e fois risque d’être moins drôle. C’est vraiment ce qui se produit dans cette pièce. Les jurons d’Edgar deviennent prévisibles et moins risibles, les répliques répétitives d’Anne-Élisabeth en viennent à taper sur les nerfs. En fait, seul l’affrontement en douce complicité entre Marcel Leboeuf et Élisabeth Chouvalidzé semble tenir le coup pour nous faire rire, de même que les chorégraphies d’Olivier Morin continuent de nous éblouir.

Personnellement, j’aurais coupé environ 30 minutes de cette pièce de presque deux heures sans entracte. La scène où les gens jouent au Monopoly s’éternise et, avant que la thérapie de groupe s’installe, il aurait été préférable de couper plusieurs chamailles et confrontations des personnages qui devenaient redondantes.

 


Somme toute une bonne pièce, qui a tout de même déclenché bien des rires et qui nous a fait passer une belle soirée.

Cette pièce est présentée à nouveau le 13 mars 2010 à 20h à la Salle Albert-Rousseau.

De Laurent Baffie
Mise en scène de Carl Béchard
Adaptation de Jean-Philippe Pearson
Avec Marcel Leboeur, Edgar Fruitier, Danièle Lorain, Anne-Élisabeth Bossé, Olivier Morin, Amélie Dallaire et Élisabeth Chouvalidzé.

 Salle Albert-Rousseau 
www.sallealbertrousseau.com

Mercure Communication

 

 

Crédit photos : Pascal Dumas