Mon ami Walid d’Adib Alkhalidey et Julien Lacroix, une adorable et drôle de façon d’aborder la solitude et la santé mentale!

Mon ami Walid

La tragi-comédie Mon ami Walid des humoristes Adib Alkhalidey et Julien Lacroix était présenté, le 31 janvier dernier au Grand théâtre de Québec, en présence des deux créateurs du film, qui se sont mis à la disposition du public après le visionnement pour une séance de questions réponses ainsi que des photos et autographes.

 Synopsis : Walid voulut s’enlever la vie. Malheureusement pour lui, Antonin croisa son chemin au moment de l’acte. Walid voulut ensuite retrouver la quiétude de la solitude, mais il était trop tard: Antonin avait déjà décidé de faire de Walid son meilleur ami. Dès lors, au grand dam de Walid, les deux devinrent inséparables. Parce que dans la vie, on ne choisit ni nos détresses, ni nos amis.

Si je voulais résumer ce fabuleux film concocté par Adib et Julien, je dirais que c’est une adorable et drôle de façon d’aborder la solitude et la santé mentale! Et quand je dis drôle, je pense à rire à gorge déployée plusieurs fois durant le visionnement. Mais c’est aussi drôle dans le sens d’original et différent, dans son propos et sa manière d’amener le drame en sous-couche des moments comiques.

À première vue, ce film est une comédie hilarante, bourrée de personnages décalés, «over the top», une belle brochette de mésadaptés de la société. On a, dès la première scène, la vieille dame (excellente Danielle Fichaud) avec son jeune de 12-13 ans (savoureux Iani Bédard), tous deux crasseux et mal engueulés, qui s’insultent en ramassant des canettes dans les rues. Ils sont jouissifs à écouter, chaque fois qu’on les voit pour de courtes apparitions dans le film. On a aussi le gérant d’épicerie, joué avec tellement de conviction et d’aplomb par un Guy Jodoin qui fait rire juste à le regarder. Pathétique bonhomme qui se branle en regardant les dames dans la section des fruits et légumes, sur ses caméras de surveillance. Et que dire de Christian Bégin en gourou des AA, au bord de la secte bizarroïde qui nous donne une performance digne des oscars, comme seul lui peut le faire! Il est entouré de ses disciples tout aussi dysfonctionnels et hilarants, joués avec cœur et conviction aussi par Debbie Lynch-White, Sophie Cadieux, Yannick De Martino et Dominic Paquet.  Finalement, Hubert Proulx est sublime dans son petit rôle du philosophe itinérant qui rénove sa maison en carton et qui protège son parc des intrus.  Naturellement, il y a Adib, le sobre, solitaire, silencieux,  un peu perdu et inadapté caissier à l’épicerie qui n’arrive pas vraiment à s’intégrer et qui en vient à vouloir se suicider, en désespoir de cause.  Et il y a Antonin, joué énergiquement par Julien Lacroix, ce petit commis d’épicerie, verbo moteur, qui dit tout ce qui lui passe par la tête, et dont l’imagination débordante l’empêche de réussir à vivre en harmonie en société. Ceux qui aiment cet humoriste déjanté qu’est Julien Lacroix, seront comblés par son jeu dans ce film. Autant il est hilarant dans ses envolées lyriques, autant on sent son isolement et son rejet par les autres. Même nous, on n’en peut plus un moment donné de cet hyperactif au flot incessant de paroles. Mais il est aussi attachant et plus on avance dans le film, plus on comprend ce qui se cache derrière ce grand dada joyeux et énergique.

Guy Jodoin

Car, au-delà de ces personnages colorés, dont plusieurs autres que je n’ai pas mentionnées,  il y a tous ces drames autour de ce monde différent, de ces personnages exclus. On sent toute la solitude de chacun d’eux. On voit toute la détresse, peu à peu, de ces êtres qui tentent de contrôler leurs démons, que ce soit des dépendances à l’alcool, drogue, ou autre, ils ont surtout besoin de rapprochements humains.

Alors, c’est ce que j’ai aimé le plus dans ce film, de me faire surprendre par le drame sous-jacent, alors que j’étais occupé à rigoler des travers de ces beaux personnages.

 Séance de questions réponses avec le public

 Après le visionnement du film de 73 minutes, soit 2 minutes de plus que le temps requis pour en faire un long métrage (selon ce qu’Adib nous a dit), les gens dans la salle Louis-Fréchette sont presque tous restés pour en apprendre plus sur ce projet audacieux amorcé par ces deux humoristes.

Donc, on apprend que c’est grâce à une campagne de sociofinancement au printemps 2018 que ce film a vu le jour. L’objectif de 80 000 $ a été atteint en deux mois grâce à 753 contributeurs dont on peut voir les noms dans le générique. Mais au final, il a fallu un budget de 150000$ pour produire le film, et ce, sans payer la multitude d’acteurs qui ont accepté de jouer dans ce long métrage. C’est avec un scénario de 70 pages, dix jours de tournage et de beaux moments d’improvisation (en grande partie par Julien Lacroix) que ce film est devenu ce petit bijou.

En plus de plusieurs comédiens et humoristes du Québec, la famille et les amis proches d’Adib et Julien ont participé au tournage, dont la mère d’Adib et ses voisines qui font une apparition dans la mosquée, comme femmes voilées.

Quand on leur a demandé s’ils ont aimé leur expérience de faire un film, ils ont été unanimes à affirmer qu’ils sont en écriture pour un deuxième projet, mais que cette fois-ci, ils vont essayer d’être financé par les institutions. En espérant que le film ne prenne pas quatre ans à voir le jour.

Au final, cette tragi-comédie, bien qu’elle soit très drôle, c’est plutôt son côté dramatique que l’on retiendra à la fin du visionnement. Car ce sont dans les dernières images du film que l’on comprend ce qui se cache derrière Walid et Antonin, qui fait qu’on a envie de voir ce long métrage à nouveau, pour retracer les indices que l’on a manqué au premier visionnement.

 Mon ami Walid est présentement disponible via une tournée de 15 villes à travers le Québec, dans des salles de spectacles. Et grâce à tout ce bouche à oreille, et aux belles critiques du film, on pourra voir enfin Mon ami Walid au cinéma.

C’est la a salle de cinéma Le Clap qui sera la première de Québec à ouvrir ses portes au premier long métrage Mon ami Walid coécrit par Adib Alkhalidey et Julien Lacroix. Le film y sera à l’affiche sur grand écran, à raison d’une ou deux représentations par jour, entre le 8 et le 14 février 2019.

Pour se procurer des billets pour une des 15 représentations en salle de spectacle dans les diverses villes allez sur monamiwalid.ca.

Crédit photos : Courtoisie